Introduction

Introduction par Marie-Françoise Bechtel, présidente de la Fondation Res Publica, , lors du séminaire "Où va l'Italie ?" du mardi 21 mars 2023.

Introduction par Marie-Françoise Bechtel, présidente de la Fondation Res Publica, lors du séminaire « Où va l’Italie ? » du mardi 21 mars 2023.

Monsieur le Président fondateur,

Mesdames, Messieurs,

Chers amis,

Avant d’introduire le débat et le sujet de ce soir, je vais vous présenter les très éminents participants, après les avoir tous salués, y compris Jean-Pierre Chevènement, notre président fondateur ainsi que Alain et Marie-Christine Meininger qui ont été l’âme de ce colloque, à la fois sur le plan intellectuel et même un peu matériel. Merci à eux.

Nous sommes très honorés de la présence de Sabino Cassese, qui fut notamment ministre de la Fonction publique dans le gouvernement Ciampi (29 avril 1993, 11 mai 1994). Nommé juge à la Cour constitutionnelle par le Président de la République Ciampi pour un mandat de 9 ans (2005- 2014), il a vu son nom cité, notamment en 2015, parmi les candidats possibles du centre gauche à la présidence de la République italienne. Il est l’auteur de nombreux ouvrages parmi lesquels Il governo dei giudici (Le pouvoir des juges)[1], Territoire et pouvoir, un nouveau rôle pour les États[2], et puis, à l’intérieur de la Cour[3], ainsi qu’un ouvrage sur L’Italie, le fascisme et l’État en 2014[4], Culture et politique de droit administratif[5] en 2008. Il est éditorialiste au Corriere della Sera ainsi que dans d’autres journaux.

Yves Mény, éminent politologue, président émérite de l’Institut universitaire européen de Florence dont il a été l’âme pendant de nombreuses années. Professeur à l’université de Rennes, à Paris II, à l’IEP de Paris, il a enseigné dans plusieurs universités américaines (Seattle, New York) et européennes (Madrid). Il a surtout été professeur à l’Institut européen de Florence de 1978 à 1983, où il est retourné comme directeur en 2001 puis comme président de 2002 à 2009. C’est donc quelqu’un qui est très impliqué dans la vie intellectuelle et la connaissance de la politique italienne. Membre de nombreux comités éditoriaux et scientifiques, il a des responsabilités dans le domaine de la recherche en France et en Europe (Allemagne, Royaume-Uni, etc.). Il est aussi l’auteur de très nombreuses publications (dont certaines traduites en plusieurs langues), parmi lesquelles un manuel de Politique comparée en 1986, un manuel de Politiques publiques avec JC Thoenig (1989), La corruption de la République[6] (1992), un ouvrage qui fera date, et, plus récemment, Imparfaites démocraties, frustrations populaires et vagues populistes (2019), Démocraties, l’héritage politique grec (2021) qui a fait l’objet d’une magnifique critique-recension par Anne-Marie Le Pourhiet, ici présente, et d’une non moins remarquable lecture par Marie-Christine Meininger dans la Revue politique et parlementaire. Deux autres ouvrages ont suivi : Mythes antiques pour le temps présent, la vie, le sexe, la mort (2021), et Sur la légitimité, croyance, obéissance, résistance (2022) où il réinterroge, me semble-t-il, le concept weberien de la légitimité.

Quant à vous, Monsieur l’ambassadeur, après les tours normaux dans le corps diplomatique au plus haut niveau, vous avez été secrétaire général du Ministère de l’Europe et des Affaires étrangères de 2014 à 2017. Je me souviens d’un dîner-débat de l’IFRI en 2017 où vous aviez fait un exposé passionnant sur la politique étrangère française, ses difficultés, y compris budgétaires. Vous êtes ambassadeur à Rome depuis cinq ans, ce qui rend votre parole spécialement autorisée, encore que nécessairement restreinte de par vos fonctions, pour parler de ce pays avec nous ce soir. Nous vous remercions également de votre présence à laquelle nous sommes très sensibles.

Je dois vous dire que vous avez échappé à deux introductions. La première était destinée à accueillir les intervenants dans une ville calme et paisible : c’est le printemps à Paris et Paris est une fête ! Ce qui n’est pas exactement l’expérience qu’ils peuvent en avoir en ce jour…[7]

La deuxième introduction à laquelle vous échappez est le sempiternel hommage à ce grand écrivain français qui aimait tant l’Italie et que je vous épargne car vous avez dû l’entendre un trop grand nombre de fois On peut souligner d’ailleurs qu’il y quelque chose de très singulier dans l’amour d’Henri Beyle pour l’Italie : j’avance avec précaution cette idée, mais il me semble que la tradition intellectuelle française a été moins marquée par la passion de l’Italie que ne l’a été la tradition allemande – on pense à Hölderlin et aux Romantiques – et surtout la tradition britannique. On pense à la fascination pour l’Italie, au moins depuis le XIXème siècle, de Byron jusqu’àEM Forster, des élites intellectuelles et artistiques britanniques.

Est-ce à dire que la France n’a pas la même fascination pour l’Italie ? Je n’avance rien de tel mais c’est peut-être sur un tout autre terrain, celui des rapports politiques, que la France et l’Italie, à travers des orages et des temps plus calmes, ont mené leur cheminement historique commun. Nous n’allons pas remonter à Dante et aux accusations portées par ce grand poète national contre la monarchie capétienne, accusée, à juste titre d’ailleurs, d’avoir voulu détruire le Saint-Empire romain germanique. Nous ne remonterons pas plus haut que l’indépendance italienne (je ne parle pas du Consulat et de l’Empire) dans laquelle la France a joué un rôle de soutien, jusque dans son ambivalence. Ensuite le fracas des deux guerres mondiales nous a gravement séparés. Et, comme dans ces symphonies où l’adagio paisible arrive après des mouvements tumultueux, ce fut la création de l’Europe sous la forme de la CEE, dans laquelle la démocratie chrétienne italienne et la IVème République ont à l’origine joué conjointement un rôle majeur.

Pour situer l’esprit de ce séminaire je dirai que, dans cette Fondation, nous attachons une grande importance à la singularité des nations. Nous pensons que c’est de cette singularité que devrait naître, ce qui n’est guère le cas aujourd’hui, la richesse de l’Europe. C’est la raison pour laquelle nous aimons creuser la situation dans laquelle se trouvent les pays voisins, notamment ceux qi comptent le plus sur l’échiquier européen.

C’est donc aujourd’hui le tour de cette nation proche qui a connu des évolutions politiques majeures, dont nous ne discernons pas toujours la logique tant chacun est aveuglé par sa propre singularité.

Autre caractéristique de cette Fondation : nous aimons regarder la situation géopolitique telle qu’elle est. Aujourd’hui nous sommes frappés, comme tout le monde, de voir que l’Europe est à nouveau en guerre ou quasiment en guerre. Je me bornerai à dire que la question de l’élargissement de l’Union européenne se pose aujourd’hui. Je crois qu’elle est inévitable. Quel que soit le terme auquel cet élargissement se produira, la chose est devant nous. D’où la question que nous pourrions poser : y a-t-il quelque chose à faire entre la France et l’Italie pour éviter le déséquilibre total d’une Union européenne basculant vers l’Est, partiellement vers le Nord également ? Y a-t-il quelque chose à faire entre l’Ouest et le Sud ? Et, dans cette hypothèse, peut-on trouver en France et en Italie des voix – et des voies – d’avenir ? Je vais passer la parole pour commencer au ministre Sabino Cassese qui va nous dire ce qu’il a à nous dire sur l’état, la situation actuelle de l’Italie.

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[1] Sabino Cassese, Il governo dei giudici, éd. Laterza, 2022.

[2] Sabino Cassese, Territori e potere. Un nuovo ruolo per gli Stati ?, Bologne, Il Mulino, 2016.

[3] Sabino Cassese, Dentro la Corte. Diario di un giudice costituzionale, Bologne, Il Mulino, 2015.

[4] Sabino Cassese, L’Italie, le Fascisme et l’État (traduit et préfacé par Éric Vial), Paris, Éditions Rue d’Ulm, Presses de l’École normale supérieure, 2014.

[5] Sabino Cassese, Culture et politique du droit administratif, Paris, Dalloz, 2008.

[6] Yves Mény, La corruption de la République, Paris, Fayard, 1992

[7] Ce séminaire s’est tenu le 21 mars 2023, journée marquée, comme les semaines précédentes par des grèves et des manifestations liées à l’adoption par le Parlement de la réforme des retraites.

Le cahier imprimé du séminaire « Où va l’Italie ? » est disponible à la vente dans la boutique en ligne de la Fondation.

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