Le droit à la différenciation, les dangers d’une révision constitutionnelle

Par Benjamin Morel, maître de conférence en Droit public à l’Université Paris II Panthéon-Assas, docteur en Science politique de l’École Normale Supérieure Paris-Saclay.

Loin des grands débats sur le nombre de parlementaires ou la proportionnelle, la différenciation territoriale semble un sujet technique de la révision institutionnelle. Elle intéresse peu les médias et mobilise peu les politiques. Pourtant, si l’on prend la peine de se pencher sur le contenu de ce que propose le gouvernement, on ne peut que saisir l’ampleur de la révolution. Dans la France de la différenciation, l’égalité de chacun devant la loi ne sera plus acquise, puisque la loi sera susceptible d’être modulée à la frontière de chaque commune. Dans la France de la différenciation, l’idée d’un territoire organisé en niveaux de collectivités identifiables aura vécu. Chaque collectivité disposera de compétences et d’appellations propres. Ainsi passera-t-on de la collectivité européenne d’Alsace à l’eurodépartement de Moselle. La faible cohérence juridique maintenue du cadre départemental ou régional ne permettra guère d’effacer la réalité d’une singularité érigée en règle.

En cela le droit à la différenciation n’a rien de girondin. Aucun Girondin n’a interrogé l’unité de la loi ou le cadre départemental. En cela, le droit à la différenciation n’a rien de républicain. Ce qu’il remet en cause a représenté la colonne vertébrale de la République depuis 1792 et apparaît, en fait, comme un retour à l’organisation administrative d’Ancien Régime. C’est-à-dire : un territoire découpé selon une multiplicité de statuts répondant aux revendications locales et une loi à géométrie variable.

Ce papier vise à comprendre les enjeux du droit à la différenciation et de montrer les risques qu’il fait encourir. Une fois posé le cadre juridique, les enjeux du droit à la différenciation ne sont pas que du domaine des principes. S’il foule aux pieds l’ADN de la République, il représente aussi un poison lent pour la décentralisation, l’unité de la République et l’égalité territoriale.

Un cadre normatif source d’insécurité juridique

Revenons rapidement sur ce qu’est le droit à la différenciation qui regroupe en fait plusieurs choix politiques [1].

Le premier est à cadre constitutionnel constant. Il vise à encourager la mutation de l’organisation des collectivités territoriales à travers leurs fusions et en permettant le transfert de certaines compétences de l’État ou d’une autre collectivité. C’est notamment ce qui a donné lieu à la création d’une collectivité européenne d’Alsace ou à la signature, en février dernier, par Édouard Philippe, d’un pacte breton.

Le cadre constitutionnel actuel a déjà permis d’aller très loin en rendant possible un statut propre à la Corse dès 1991. Le Conseil constitutionnel reconnaît ainsi que « le principe d’égalité ne s’oppose ni à ce que le législateur règle de façon différente des situations différentes, ni à ce qu’il déroge à l’égalité pour des raisons d’intérêt général, pourvu que, dans l’un et l’autre cas, la différence de traitement qui en résulte soit en rapport direct avec l’objet de la loi qui l’établit » [2]. Dès lors, une différenciation des compétences entre collectivités est possible si elle respecte le principe d’égalité, répond à une différence de situation et est motivée par l’intérêt général. Par ailleurs, la loi elle-même peut permettre de prendre en compte des différences objectives comme en témoignent la loi littorale [3] ou la loi montagne [4].

Le second implique de modifier le cadre constitutionnel et devrait faire l’objet d’une révision du texte fondamental. Cette dernière vise principalement à faire sauter les garde-fous posés par la jurisprudence en matière d’égalité et de caractérisation d’un intérêt général.

La réforme devrait compléter ainsi le second alinéa de l’article 72 : « Dans les conditions prévues par la loi organique et sauf lorsque sont en cause les conditions essentielles d’exercice d’une liberté publique ou d’un droit constitutionnellement garanti, la loi peut prévoir que certaines collectivités territoriales exercent des compétences, en nombre limité, dont ne disposent pas l’ensemble des collectivités de la même catégorie. ». Pour l’heure, la jurisprudence du Conseil constitutionnel implique qu’une telle différence de traitement soit motivée par l’intérêt général [5]. En ne reprenant pas cette nécessité dans la nouvelle formulation de l’article, « le projet de loi conduira le Conseil constitutionnel à assouplir son contrôle sur le fondement du principe d’égalité, de sorte qu’il soit plus facile au législateur » [6] de s’en écarter. Une telle rédaction permet dès lors qu’une différence de compétence ne soit plus strictement motivée par un intérêt général. Nous verrons qu’ainsi elle ouvre la porte à toutes les revendications. La notion de « nombre limité » est par ailleurs très floue. Le contraire de limité étant illimité, il n’y a pas vraiment de borne évidente qui s’impose à l’interprétation d’une telle disposition. Devant de tels risques, les rapports parlementaires préalables considèrent qu’« il appartiendra au législateur et au pouvoir réglementaire de veiller à ce que les différenciations de compétences ne répondent pas seulement à des accords locaux, mais poursuivent a minima un but d’intérêt général précisément identifié » [7]. Cela ne représente pas, pour le moins, une garantie convaincante, d’autant que la formulation « conditions essentielles d’exercice d’une liberté publique » prête également à interprétation. Elle l’implique en effet pas une égalité stricte en matière de liberté comme le montre la jurisprudence concernant les outre-mers [8].

Le projet de loi constitutionnel remplace ensuite le quatrième alinéa de l’article 72 de la Constitution par la disposition suivante : « Dans les conditions prévues par la loi organique, et sauf lorsque sont en cause les conditions essentielles d’exercice d’une liberté publique ou d’un droit constitutionnellement garanti, les collectivités territoriales ou leurs groupements peuvent, lorsque, selon le cas, la loi ou le règlement l’a prévu, déroger, pour un objet limité, aux dispositions législatives ou réglementaires qui régissent l’exercice de leurs compétences, éventuellement après une expérimentation autorisée dans les mêmes conditions. » C’est là une atteinte à l’unité de la loi et à l’égalité des citoyens devant cette dernière qui est évidente. Elle a déjà été introduite dans la révision de 2003 pour les collectivités d’outre-mer. Toutefois, les concernant, elle est justifiée par l’existence de situations particulières. C’est là un renversement du principe d’échelle de différenciation, implicitement introduit entre les articles 72, 73 et 74 de la Constitution. Là encore, les effets pratiques d’une telle disposition sont importants. Remplaçant le droit à l’expérimentation introduit par la réforme de 2003, il peut être fait un parallèle avec la jurisprudence du Conseil sur ce dernier [9]. Celle-ci révèle une marge de manœuvre relative à la dérogation au principe d’égalité devant la loi et au domaine de la loi. La garantie proposée en matière de droit et liberté reste par ailleurs sujette à caution. La notion de « conditions essentielles de l’exercice d’une liberté publique ou d’un droit constitutionnellement garanti » n’a pas vraiment fait l’objet d’une précision par le Conseil constitutionnel. Il n’est toutefois qu’à voir les marges de manœuvre existant en matière de police administrative pour concevoir la portée toute relative de l’expression. L’insécurité juridique en la matière risque d’être importante tant pour les collectivités que pour les administrés. Si seules les « conditions essentielles » doivent être maintenues, cela veut dire que la liberté du citoyen peut se voir réduite. Si le cadre est flou, cela implique que le nombre de recours pour excès de pouvoir devrait faire le malheur des collectivités et le bonheur des avocats. L’insécurité juridique, pour les communes notamment, introduite par le droit à la différenciation est immense.

Le tombeau de la démocratie locale

La différenciation rend illisibles pour l’électeur les enjeux des élections locales. Aussi, elle favorise l’abstention et le désengagement. C’est là un danger pointé tant par le Conseil d’État [10] que par la Mission « flash » sur l’expérimentation et la différenciation territoriale [11]. Le juge administratif note ainsi qu’à la complexité dans l’organisation des compétences des collectivités territoriales « s’ajouterait celle tenant à l’existence de compétences différenciées entre collectivités relevant d’une même catégorie ».

L’idée même de responsabilité démocratique implique que l’électeur discerne les compétences de l’autorité publique et puisse apprécier son bilan. La décentralisation a, jusqu’à présent, échoué à établir cette distinction claire qui permettrait d’identifier à un échelon un groupe de politiques publiques. Pire, les dernières réformes, notamment les lois NOTRe et MAPTAM, ont amplifié ce phénomène en encourageant la différenciation des compétences. Ce système de différenciation a également été accru par la possibilité pour les métropoles d’exercer des compétences de l’État ou par la possibilité pour les régions d’exercer certaines compétences des départements. À l’échelon communal aujourd’hui, ce qui relève de la collectivité ou l’EPCI ne dépend plus seulement du type de ce dernier (communauté de communes, d’agglomération, métropoles…). Il existe également des compétences optionnelles dont un certain nombre, au choix, doivent être transférés par la commune à l’EPCI. Ainsi, dans une communauté d’agglomération l’article L. 5216-5 du CGCT impose aux communes de confier à l’EPCI trois des sept compétences suivantes : voirie et parcs de stationnement d’intérêt communautaire ; eau ; assainissement ; environnement ; action sociale, équipements culturels et sportifs d’intérêt communautaire ; maisons de service public.

Autrement dit, un électeur de bonne foi qui vote lors des élections municipales et qui a à se plaindre de l’entretien de la voirie doit comprendre :

– Qu’il existe plusieurs types d’EPCI, dont une partie seulement à la compétence d’entretien de la voirie.
– Dans quel type d’EPCI lui-même vit.
– S’il vit dans une communauté d’agglomération, si la voirie fait partie des trois compétences transférées parmi les sept au choix.

Soyons clairs, et sans mépris pour les électeurs, un tel degré de technicité n’est déjà pas évident pour les élus locaux. Il ne l’est pas non plus pour les étudiants en droit public qui craignent le droit des collectivités au regard de son extrême complexité. Pour un électeur qui n’a pas eu la bonne idée de passer, récemment, un master 2 de droit des collectivités territoriales, voter aux élections municipales en pleine conscience des enjeux est presque impossible.

Le droit à la différenciation vient ajouter à la complexité. Il n’est, en ça, pas tant une rupture que la continuité de ce qui fait aujourd’hui l’échec de la décentralisation. Avec lui, le cadre encore à peu près clair des niveaux de collectivités devient illisible. S’il est possible de dire que la Région s’occupe du développement économique et le département de l’action sociale, que dire de la collectivité européenne d’Alsace ? Au vu de ses compétences en matière de tourisme ou de collaboration transfrontalière, n’est-elle pas également chargée du développement économique ? Comme elle ne s’appelle plus département, en est-elle encore un ? Pour le Conseil d’État, c’est le cas [12]. Pour le législateur, cela l’est moins comme en témoigne l’intervention de Philippe Bas devant le Sénat [13]. Pour l’électeur, avouons cette fois que l’ensemble est d’une grande ambiguïté. Comment apprécier le bilan et comprendre la mission d’une telle collectivité par rapport aux autres, par rapport à l’État ?

Le droit à la différenciation est donc la marque d’une décentralisation construite par les élus et pour les élus… ou plutôt par et pour les associations d’élus. On est loin de la lisibilité nécessaire pour permettre à l’électeur d’exercer un vrai contrôle et réaliser un choix conscient. La différenciation n’est que le dernier acte d’une pathologie qui a peu à peu éloigné les citoyens de la vie locale alors que la décentralisation devait signer leur engagement dans cette dernière.

Les conséquences en sont triples.

D’abord, le principal risque est celui de l’apathie électorale. Celle-ci se vérifie au regard d’un taux de participation décroissant aux élections locales. Plus les collectivités se sont vues dotées de compétences, moins les électeurs se sont mobilisés pour les scrutins territoriaux. Le paradoxe n’en est un que si l’on oublie que chaque nouvel acte de décentralisation a rendu cette dernière plus illisible. Ainsi peut-on expliquer que, alors qu’ils ont vu leur pouvoir croître, le taux d’abstention lors des élections renouvelant les conseils régionaux est passé de 25,2 % en 1986 à 50,09 % en 2015. Devant des enjeux peu clairs et un bilan impossible à vraiment apprécier, les électeurs n’ont que peu d’allant à se déplacer. Encore le font-ils dans le cadre de campagnes nationales qui permettent au moins de mettre en lumière quelques enjeux du scrutin. Avec le droit à la différenciation, la trop grande variété des situations locales, d’une commune à l’autre, conduira à priver la campagne nationale elle-même de ce sens. Pour ce qui est des campagnes locales, on sait qu’elles ne touchent qu’une infime minorité de l’électorat le plus politisé.

Ensuite, la campagne nationale n’en sera pas pour autant oubliée. Les élections locales ont une répercussion nationale en ce qu’elles permettent de sanctionner ou de soutenir un gouvernement. En rendant plus illisibles les enjeux locaux, la différenciation devrait encore accroître ce phénomène. L’électeur sera perdant, lui qui ira voter à une élection sur un sujet qui y est étranger. La décentralisation en sera la victime, dont l’essence démocratique sera oubliée ou réduite à un tour de chauffe avant les présidentielles.

Enfin, l’illisibilité démocratique conduit généralement au triomphe des régionalistes comme le note bien Lori Thorlakson [14]. Si les électeurs régionalistes se déplacent, ce n’est pas pour apprécier la façon dont la collectivité exerce ses compétences. Il s’agit pour eux d’amener à la tête de cette dernière une majorité censée défendre son identité et la conduire à l’autonomie ou à l’indépendance. Ces électeurs-là se rendent à l’isoloir aux élections locales, car pour eux l’enjeu est fort. Or dans une élection à forte abstention, leurs voix sont précieuses. Cela se traduit par une surreprésentation des mouvements régionalistes et une transformation des discours et programmes des autres partis pour capter ce vote. Par ailleurs, la ligne régionaliste, simplificatrice des enjeux de l’élection est bien plus audible pour les électeurs. Elle est donc mise à profit afin de mobiliser sur un sujet clair et palpable. Il est plus facile d’attirer l’électeur en lui parlant de la culture bretonne millénaire que du bilan régional relatif au développement des ports maritimes et des aérodromes… In fine, le malaise démocratique local, accentué par la différenciation, conduit à une fuite en avant régionaliste débouchant sur une liquidation de l’unité de la République.

La liquidation de l’unité républicaine

Il est assez intéressant de noter que le droit à la différenciation a, jusqu’à présent, surtout permis de faire droit à des revendications régionalistes. Il a par ailleurs été vendu ainsi par Emmanuel Macron dans ses discours en Bretagne [15] ou en Corse [16]. Dans son rapport relatif à la collectivité européenne d’Alsace, le préfet Marx ne motive pas tant sa création par des considérations d’intérêt général, ou même local, que par « un désir d’Alsace » [17]. De son côté, Édouard Philippe voit dans le « pacte breton » une avancée décentralisatrice « dont les plus avisés spécialistes nous disent qu’elle est totalement inédite depuis Philippe Le Bel » [18]. On peut s’interroger sur la solidité des spécialistes que le Premier ministre a consultés. Ils ont oublié de lui signaler que, au temps de Philippe le Bel, la Bretagne jouissait d’une indépendance de fait et que les parlements régionaux existaient sous l’Ancien Régime. Par ailleurs, la guerre civile incessante qui marquait la féodalité avant Saint-Louis, dans la France dont hérite Philippe le Bel, n’est pas tout à fait à prendre en exemple.

La différenciation conduit à la montée du régionalisme d’abord en ce qu’elle accrédite l’idée d’une exceptionnalité de la communauté régionale ainsi différenciée. C’est notamment ce que révèlent les recherches de Michael Keating [19] ou Frans Schrijver [20]. La différenciation renforce le sentiment d’une identité insoluble dans l’unité nationale, dont la reconnaissance passe par l’attribution de compétences spécifiques. Il est absurde de lier identité régionale et compétences. Ce n’est pas parce qu’une collectivité à une identité plus ancrée qu’elle est plus à même d’exercer des compétences en matière de police routière ou de gestion de l’eau. Mais en obtenant des compétences dont ne disposent pas les autres, elle introduit l’idée d’une autonomie plus grande justifiée par cette identité. Ainsi note-t-on une corrélation directe entre le niveau de compétence des collectivités et le sentiment régionaliste [21]. L’identité est un outil permettant de revendiquer des compétences, les compétences permettent d’attester la reconnaissance d’une identité. Cela conduit des auteurs comme Keating à renoncer à différencier un régionalisme motivé par des intérêts locaux et un nationalisme identitaire local [22]. Dans la mesure où la différenciation amène chaque collectivité à acquérir, selon l’identité qu’elle pense incarner, des compétences en négociation avec l’État, le phénomène ne peut être qu’accentué. Déjà, Frans Schrijver [23], montre que le statut de 1991 en Corse a mené à une exacerbation du régionalisme. Quelques années plus tard, en 1999, 70,8 % des habitants se disent attachés à la région, seulement 40,1 % à la France. Le même phénomène est encore plus marquant dans les nations concernées par la devolution en Grande-Bretagne ou les communautés autonomes en Espagne.

Les ressorts de ce phénomène sont divers et sont assez bien connus par la littérature scientifique.

D’abord, la différenciation conduit à reconnaître une légitimité aux revendications des partis régionalistes [24], ce qui modifie profondément le système partisan. Ces derniers sont dès lors les vainqueurs d’un combat dont ils peuvent se vanter d’être les précurseurs et dépositaires. Ainsi, l’accès au pouvoir du Scottish national Party a été facilité par la devolution, comme celle des nationalistes corses par la création de la collectivité unique. Si le combat a débouché, c’est qu’il était juste. Si le combat est juste, alors c’est que ces formations ont eu raison de le mener contre le reste des partis politiques. Un tel constat stimule le vote de leurs partisans et amène des électeurs de ces anciennes formations à les soutenir [25]. Face à cette montée en puissance des groupes régionalistes, les partis classiques réagissent en exacerbant eux-mêmes le discours et en entrant dans une surenchère identitaire [26]. Emmanuele Massetti et Arian Schakel [27] analysent assez bien le débouché d’un tel phénomène. Les formations régionalistes peuvent l’emporter totalement et se diversifient en se substituant aux partis nationaux. C’est notamment ce qui s’est passé en Catalogne ou l’ECR a fini par remplacer le PSOE à gauche et Junts per Catalunya, le Parti populaire, à droite. Le seul parti national résistant, Ciudadanos, se caractérise justement par son opposition à la rhétorique régionaliste. Quand les partis nationaux parviennent à se maintenir, ce n’est qu’au prix d’une exacerbation par le personnel politique local du discours régionaliste. C’est notamment le cas dans le cadre de scrutins que le flou électoral engendré par la différenciation a rendus imperméables à tout autre enjeu. Quoi qu’il en soit, la surenchère conduit à l’impasse [28]. L’autonomie croissante obtenue par la région amène les régionalistes modérés à se voir marginalisés par les séparatistes ; les premiers ayant obtenu gain de cause ne peuvent se prévaloir que d’un programme gestionnaire. De même, le personnel politique traditionnel doit, soit rompre avec les formations nationales qui ne peuvent s’accommoder du séparatisme, soit accepter de perdre leur course de vitesse contre les régionalistes.

Par ailleurs, la différenciation a aussi pour résultat de créer un effet de mimétisme entre régions bien étudié par la science politique [29]. Si l’identité est liée à la compétence, alors disposer de moins de compétences qu’une autre collectivité implique de considérer son identité comme moins respectée. Or si une collectivité dispose des mêmes compétences qu’un grand nombre d’autres, son exceptionnalité n’est plus si singulière. Autrement dit, à la surenchère au sein du personnel politique s’ajoute une surenchère entre collectivités. En quelques mois et avant même l’adoption de la révision constitutionnelle, le phénomène a déjà commencé. Ainsi, dans un article publié dans le point le 4 mai, Gilles Siméoni annonce clairement que le droit à la différenciation rapproche le cas corse d’un cas de droit commun. Aussi, il faut reconnaître la singularité de la Corse en lui accordant un statut plus particulier, excédant de beaucoup ce droit à présent accessible à toutes les collectivités. Au Sénat, la collectivité européenne d’Alsace a été combattue par le Sénateur mosellan François Grosdidier, au nom d’une non-exceptionnalité de l’Alsace par rapport à la Moselle. Finalement, pour marquer cette non-infériorité de l’identité mosellane, le département de Moselle a annoncé jeudi 2 mai son intention de devenir un « eurodépartement ».

Le droit à la différenciation s’inscrit ainsi dans une évolution de la question régionale en Europe. Menée 20 ans après les autres pays du continent, elle a rendu la Belgique et l’Espagne ingouvernables, la Grande-Bretagne en menace d’éclatement et a conduit au triomphe des populistes en Italie… On peut raisonnablement s’interroger sur la naïveté gouvernementale en la matière. Elle semble avoir trois fondements :

D’abord, une vision scientifique surannée qui a eu son heure de gloire dans les 1980 et 1990 et qui marque la distance des élites françaises avec l’évolution de la littérature internationale. La théorie dominante dans le monde politique était alors celle de l’accomodation [30]. Face aux régionalistes, il fallait accorder plus de compétences aux territoires où s’exprimait cette tentation afin de décrocher la branche modérée des radicaux. Contentés, les premiers gouverneraient en bonne intelligence avec l’État central, quand les seconds seraient relégués à la marginalité. Cette théorie est aujourd’hui battue en brèche et s’est vu subsister celle de l’empowerment. Elle témoigne qu’il existe un lien attesté entre décentralisation et vote régionaliste [31]. L’État entre dans un processus incrémental de dévolution de compétences à des entités infra-étatiques [32] qui mène à une plus grande autonomie. Pour légitimer cette dernière, les régions développent un logiciel identitaire de plus en plus agressif visant en priorité la politique éducative [33]. Ce discours est diffusé à grande échelle et légitimé par un sceau institutionnel [34]. Dawn Bracanti montre ainsi que l’existence d’institutions locales représentatives stimule le vote pour les formations régionalistes [35]. Emmanuele Massetti et Arian Schakel, dans une étude par régression statistique sur 227 partis régionalistes dans 329 régions et 18 pays [36], prouvent que l’existence d’un gouvernement régional multiplie par trois le nombre des partis régionalistes. Ceux-ci s’installent durablement dans le paysage en récompensant, une fois au pouvoir, leur clientèle électorale [37].

La seconde erreur est de penser le régionalisme comme un secours contre le nationalisme. Or, l’enquête de Frans Schrijver montre qu’au contraire elle le renforce. Les régions non sécessionnistes trouvent dans le nationalisme une réponse aux brocards des régionalistes. C’est là l’un des moteurs principaux du parti Vox en Espagne ou du renforcement du UKIP en Grande-Bretagne.

La troisième erreur tient à l’illusion que, à l’exception de la Corse, la France ne connaît pas de tentation régionaliste profonde. Or en la matière deux cents ans de jacobinisme ne nous ont pas tant immunisés que désensibilisés devant à une crise qui touche la plupart des démocraties voisines. Frans Schrijver [38], à partir des données de l’Observatoire interrégional du Politique, montre qu’en Bretagne le taux de ceux se disant plus bretons que français a crû de 19,2 % en 1989 à 30,7 % en 2000. En Alsace, ce même taux est passé de 17,3 % en 1985 à 26 % en 2000. Cette évolution est pour beaucoup liée à la production d’un discours régionaliste par les institutions [39]. La diversité et la richesse de la culture locale sont masquées par un discours politique militant qui devient discours officiel. Ainsi en va-t-il de la langue occitane, construction d’abord militante puis institutionnelle la transformant en arme politique [40]. De telles politiques peuvent non seulement attiser le régionalisme, mais même le faire naître à partir d’un néant historique comme ce fut le cas concernant la Padanie italienne [41]. Le régionalisme est le fruit bien plus que la source d’une différenciation territoriale qui implique de légitimer des institutions et une revendication de compétence à l’aide d’images, de symboles, de mots, de slogans, ou d’une langue [42].

Le triomphe des inégalités territoriales

L’idée selon laquelle la différenciation en permettant d’adapter la norme au plus près du terrain stimule le tissu économique repose, là encore, sur de vieilles conceptions. On peut notamment citer le théorème de la décentralisation [43] ou le néo-régionalisme [44]. Outre que ces idées sont aujourd’hui fortement contestées, la différenciation représente une rupture singulière ne pouvant conduire qu’au creusement des inégalités territoriales. L’envisager comme une réponse à la crise dite « des gilets jaunes » laisse donc perplexe.

La différenciation porte d’abord en elle-même un risque d’approfondissement des inégalités territoriales, et ce pour deux raisons.
La première tient à la désunion des collectivités face aux lobbys. Comme le notent les membres du club Marc Bloch, composé d’universitaires et praticiens locaux : « Il en irait comme pour les individus face aux grandes entreprises mondialisées : la loi du plus fort se substituerait à la règle générale. Il s’agirait alors d’une réaction et non d’une révolution… même pas d’une évolution » [45]. Dès lors que la norme peut affecter la compétitivité du territoire, sa modulation peut faire l’objet d’un marchandage, voire d’une pression. C’est ce que constate de manière assez claire Antonio Casimiro Fereira à propos des normes relatives au droit du travail au Portugal [46]. Ainsi, la différenciation pourrait bien marquer le début d’une course au moins-disant social et environnemental [47].

La seconde a trait aux conditions mêmes de la différenciation des compétences. Si une collectivité veut exercer une nouvelle compétence, elle doit en avoir les moyens. On peut toujours penser que l’État transférera également les crédits, mais, au vu de la pratique récente, c’est là une gageure. Pour une collectivité, demander une nouvelle compétence, c’est au mieux engendrer une situation d’incertitude financière. Dès lors, seules les collectivités les plus riches peuvent prendre ce risque. Or comme le montrent David Robert Agrawal et Dirk Foremny [48], à partir du cas espagnol, la différenciation entraîne une inégalité des armes entre collectivités. Certains disposent de leviers pour attirer les investisseurs que d’autres n’ont pas. Or, comme les collectivités les plus riches sont les plus susceptibles d’assumer efficacement ces compétences, elles en tirent avantage aux dépens des territoires les plus pauvres.

La différenciation représente ensuite un obstacle aux mécanismes correcteurs des inégalités induites par la décentralisation. L’idée selon laquelle renforcer l’action des échelons locaux en matière normative permet de stimuler l’économie est sujette à caution. Certaines études montrent que la décentralisation peut s’avérer un frein à la croissance [49] et qu’elle produit des inégalités économiques entre territoires. Les différences entre les régions en matière de revenus et de structures du marché du travail croissent ainsi avec le degré de décentralisation [50]. Agnese Sacchi et Simone Salotti montrent que si elle porte sur l’allocation des dépenses, la décentralisation conduit à la concentration des revenus [51]. C’est d’abord et avant tout le cas dans les territoires les plus pauvres [52]. Un récent rapport de l’OCDE démontre qu’elle accroît particulièrement le gouffre séparant classes moyenne et populaire [53]. Or la différenciation, loin de corriger ce biais l’aggrave.

D’abord, les études montrent classiquement qu’en cas d’abstention importante, le personnel politique local tend à favoriser son propre électorat [54]. Il faut rappeler le principe selon lequel la différenciation brouille les enjeux des élections et conduit les électeurs à s’abstenir ou voter sur la base de questions nationales. Il y a alors un risque de concentration des politiques publiques en faveur de segments électoraux souvent plus aisés et plus engagés dans la vie politique locale. Pour un personnel politique qui ne peut être jugé sur son bilan, rendu illisible, mieux vaut s’assurer d’une base électorale entretenue.

Ensuite, la surenchère régionaliste déjà étudiée n’est bien entendu pas étrangère au creusement des inégalités territoriales. Le sentiment régionaliste trouve des fondements et des motivations dans la redistribution des richesses comme le montrent les exemples de l’Espagne [55] ou de l’Italie [56]. Le cas italien est particulièrement probant. Depuis la régionalisation fiscale en 2008, le PIB de la riche Lombardie est passé de 346 millions à 366 millions d’euros en 2016, le chômage de 4 à 6 %. En Calabre en revanche le PIB est tombé de 33, 816 à 33, 054 millions d’euros quand le chômage est monté de 12 % à 21,5 %. Sur la même période en comparaison, en Corse, région périphérique soutenue par l’État central, le PIB a augmenté de 7, 441 à 9, 097 millions d’euros et le taux de chômage est resté stable. Encore la régionalisation fiscale s’était-elle accompagnée en Italie d’un fonds de péréquation, dont l’efficacité est restée, c’est vrai, relative. Toutefois, à la suite de plusieurs référendums et à la demande des gouvernements locaux, l’Italie s’apprête à inaugurer un « régionalisme différencié » en Vénétie, Lombardie et Émilie-Romagne. Ce dernier a notamment pour objet de rompre un peu plus la solidarité financière avec le Mezzogiorno. Le gouverneur de Vénétie a ainsi fait campagne sur le maintien de 90 % des impôts prélevés sur le territoire régional. À la suite de l’accession par l’État central à ces revendications, c’est maintenant la Ligurie, le Piémont, la Toscane, l’Ombrie et les Marches qui revendiquent en la matière plus d’autonomie et moins de solidarité.

Le droit à la différenciation n’est pas une mesure technique dont l’analyse ne devrait intéresser que les juristes spécialistes du droit des collectivités ou, au mieux, la presse spécialisée. Si la réforme constitutionnelle est adoptée, elle représentera probablement la plus grande rupture historique portée par ce gouvernement. Cette rupture sera d’autant plus nette que les exemples étrangers montrent que la solidification des positions locales et la montée du régionalisme introduisent un effet cliquet. Nous ne reviendrons pas en arrière sur le droit à la différenciation, en tout cas pas tout de suite, et pas sans chamboulement total de nos institutions. Bombe à fragmentation au cœur même du texte constitutionnel, ses effets risquent de n’être regrettés et analysés que lorsque les dégâts produits seront devenus irréparables. Son adoption porte en elle l’effet contraire de celui revendiqué par ses promoteurs. Elle n’apportera pas le dynamisme politique local, mais l’obscurité et la confusion. Elle ne conduira pas à plus d’égalité territoriale, mais à une décentralisation au profit des lobbys et des territoires les plus riches. Elle ne permettra pas l’apaisement des conflits identitaires locaux, mais leur exacerbation.

Basé sur de vieilles idées surannées qui ont échoué partout ailleurs, le droit à la différenciation est une erreur que la France peut s’éviter. Encore faut-il ouvrir le débat.

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[1] Voir les rapports de la délégation aux collectivités de l’Assemblée nationale : Jean-René CAZENEUVE et Arnaud VIALA, Mission « flash » sur l’expérimentation et la différenciation territoriale, rapport n° 912 fait au nom de la délégation aux collectivités de l’Assemblée nationale, 2018 ; Jean-René CAZENEUVE et Arnaud VIALA, en conclusion des travaux du groupe de travail sur les possibilités ouvertes par l’inscription dans la constitution d’un droit à la différenciation, rapport n° 1687 fait au nom de la délégation aux collectivités de l’Assemblée nationale, 2019.
[2] Décision n° 91-291 DC du 6 mai 1991, publié au Journal officiel du 11 mai 1991, page 6236.
[3] Loi n° 86-2 du 3 janvier 1986 relative à l’aménagement, la protection et la mise en valeur du littoral.
[4] Loi n° 85-30 du 9 janvier 1985 relative au développement et à la protection de la montagne, largement remaniée par la loi n° 2016-1888 du 28 décembre 2016 de modernisation, de développement et de protection des territoires de montagne.
[5] Décision n° 2010-618 DC du 9 décembre 2010 ; décision n° 2013-687 DC du 23 janvier 2014.
[6] Richard FERRAND, Marc FESNEAU, Yaël BRAUN-PIVET, Rapport sur le projet de loi constitutionnelle pour une démocratie plus représentative, responsable et efficace, rapport n° 1137 fait au nom de la commission des lois, p. 208.
[7] Jean-René CAZENEUVE et Arnaud VIALA, en conclusion des travaux du groupe de travail sur les possibilités ouvertes par l’inscription dans la constitution d’un droit à la différenciation, rapport n° 1687 fait au nom de la délégation aux collectivités de l’Assemblée nationale, 2019, p.39.
[8] Décision n° 96-373 DC du 9 avril 1996 ; Décision n° 2001-446 DC du 27 juin 2001.
[9] Décision 2003-478 DC du 30 juillet 2003.
[10] CONSEIL D’ÉTAT, avis sur la différenciation des compétences des collectivités territoriales relevant d’une même catégorie et des règles relatives à l’exercice des compétences, n° 393651, 7 décembre 2017.
[11] Jean-René CAZENEUVE et Arnaud VIALA, Mission « flash » sur l’expérimentation et la différenciation territoriale, rapport n° 912 fait au nom de la délégation aux collectivités de l’Assemblée nationale, 2018.
[12] CONSEIL D’ÉTAT, 28 février 2019, avis sur un projet de loi relatif aux compétences de la collectivité européenne d’Alsace.
[13] « La commission des lois s’est prononcée, de la manière rappelée par notre excellente rapporteur, Mme Agnès Canayer, qui, pour autant, n’a pas voulu attacher à cette question de la dénomination des conséquences que celle-ci n’a pas. En effet, quelle que soit la dénomination que vous retiendrez par votre vote, mes chers collègues, vous ne changerez pas la chose. Et quelle est cette chose ? C’est une collectivité déjà hybride. C’est un peu comme la recette du pâté aux alouettes : il faut, pour faire un pâté aux alouettes, un cheval et une alouette. (Sourires.) Nous avons là un département, qui n’est pas simplement un département : c’est un département plus quelque chose. Si l’on s’intéresse uniquement à ce quelque chose, on en fait déjà une collectivité à statut particulier, mais, en l’écrivant dans la loi, on irait trop loin, car la dénomination ne correspondrait plus à la chose. La chose, c’est un département créé par décret. Celui-ci n’a nul besoin d’une loi pour voir le jour. Et si le Gouvernement a estimé qu’il fallait une loi, c’est que, en réalité, nous sommes en train de créer un peu plus qu’un département. Nous-mêmes, en commission des lois, nous avons considéré que la partie “alouette”, c’est-à-dire la partie “collectivité à compétences particulières” de ce département, était insuffisante. C’est pour cette raison que nous avons voulu ajouter une deuxième, puis une troisième, puis une quatrième alouette, pour faire bon poids. C’est ainsi que, au-delà des compétences que le Gouvernement avait prévues, notamment en matière routière ou transfrontalière, nous avons ajouté la promotion de l’attractivité, qui était une compétence jusque-là réservée à la région, nous avons ajouté la qualité de chef de file en matière de bilinguisme, et nous nous apprêtons à ajouter la coordination de la politique touristique, l’expérimentation des aides aux entreprises par délégation de la région, des pouvoirs de police en matière de routes — puisque l’on transfère à cette collectivité des autoroutes, ce qui n’a jamais été fait pour aucune autre collectivité départementale. Nous proposons également la création d’un conseil de développement, ainsi que la possibilité de créer dans ce département particulier une télévision locale, pour défendre la langue alsacienne. Je comprends que dans la perspective ouverte par le Gouvernement, qui a désiré faire plus qu’un département, le Sénat s’apprête à faire beaucoup plus qu’un département, sans pour autant créer une collectivité à statut particulier. Eh bien, mes chers collègues, vous connaissez la position de la commission, mais, en votre âme et conscience, vous allez pouvoir maintenant dire si vous souhaitez que l’on s’en tienne à la dénomination “département”, ou si, tenant compte de toutes ces avancées, vous préférez aller plus loin. Peut-être choisirez-vous alors de reprendre la dénomination qu’ont retenue tant les conseils départementaux d’Alsace que la région Alsace, ainsi d’ailleurs que le Gouvernement. Cela, c’est votre appréciation. Je le rappelle encore une fois, la position de la commission était différente. », Compte rendu intégral des débats du Sénat, le 2 avril 2019.
[14] Lori THORLAKSON, « Patterns of Party Integration, Influence and Autonomy in Seven Federations », Party
Politics
, n°15, vol.2, 2009, pp.157–177.
[15] Emmanuel MACRON, Discours prononcé à Quimper le 21 juin 2018.
[16] Emmanuel MACRON, Discours prononcé à Bastia le 7 février 2018.
[17] Voir sur cette question le rapport remis au Premier ministre Jean-Luc MARX, Mission Alsace Grand-Est, Rapport au Premier ministre, Strasbourg 15 juin 2018, p.39.
[18] Édouard PHILIPPE, Discours prononcé à Rennes, le 8 février 2019.
[19] Voir sur cette question : Michael KEATING, « What’s Wrong with Asymmetrical Government ? » dans H.
ELCOCKK et M. KEATING (dir.) Remaking the Union: Devolution and British Politics in the 1990s, London: Cass, 1998, pp. 195-218.
[20] Frans SCHRIJVER, Regionalism after regionalisation : Spain, France and the United Kingdom, Amsterdam : Amsterdam University Press , 2006, pp. 185-187. Voir aussi Yves MÉNY, « The Political Dynamics of Regionalism: Italy, France, Spain », dans R. MORGAN (dir.) Regionalism in European Politics, Londres: Policy Studies Institute, 1986, p.10.
[21] Rune Dahl FITJAR, The Rise of Regionalism, London: Routledge, 2010.
[22] Keating, M. (1988) State and Regional Nationalism: Territorial politics and the European.
[23] Frans SCHRIJVER, Regionalism after regionalisation : Spain, France and the United Kingdom, Amsterdam : Amsterdam University Press , 2006, pp. 185-187. Voir aussi Yves MÉNY, « The Political Dynamics of Regionalism: Italy, France, Spain », dans R. MORGAN (dir.) Regionalism in European Politics, Londres: Policy Studies Institute, 1986, p.10.
[24] André LECOURS, « Ethnonationalism in the West: A Theoretical Exploration », Nationalism & Ethnic Politics, vol. 6, n ° 1, 2000, pp. 103–124; André LECOURS, « Political Institutions, Elites, and Territorial identity Formation in Belgium », National identities, vol. 3, no.1, 2001, pp. 51–68.
[25] Bonnie MEGUID, « Bringing Government Back to the People? The Impact of Political Decentralization on Voter Engagement in Western Europe ». Papier présenté à l’association des études européennes à Montréal, mai 2007.
[26] Eve HEPBURN et Klaus DETTERBECK, « Federalism, regionalism and the dynamics of party politics » dans Routledge Handbook of Regionalism and Federalism, Londres: Routledge, 2013, p. 83.
[27] Emanuele MASSETTI et Arjan H SCHAKEL, « Decentralisation Reforms and Regionalist Parties’ Strength: Accommodation, Empowerment or Both? », Political Studies, 2017, n ° 65, vol.2, pp.432–451.
[28] Stein ROKKAN, et Derek W. URWIN. Economy, Territory, Identity. Politics of West European Peripheries. London: Sage, 1983.
[29] Arendt LIJPHART, « Political Theories and the Explanation of Ethnic Conflict in the Western World: Falsified Predictions and Plausible Postdicdons ». dans J.M. ESMAN (dir.), Ethnic Conflict in the Western World, Ithaca : Cornell University Press,1979, pp. 53-54 ; Frans SCHRIJVER, Regionalism after regionalisation : Spain, France and the United Kingdom, Amsterdam : Amsterdam University Press , 2006, p.64 ; Luis Moreno, The federalization of Spain, London: Frank Cass, 2001.
[30] Lieven DE WINTER « In Memoriam the Volksunie 1954–2001: Death by Overdose of Success? » dans L. DE WINTER, M. GOMEZ-REINO et P. LYNCH (dir.) Autonomist Parties in Europe: Identity Politics and the Revival of the Territorial Cleavage. Vol. II, Barcelone: ICPS, 2006, pp.11–46. ; Margaret LEVI et Michael HECHTER, « A Rational Choice Approach to the Rise and Decline of Ethnoregional Political Parties » dans : A. TIRYAKIAN et R. ROGOWSKI (dir.) New Nationalism of the Developed West. Boston, MA: Allen & Unwin, 1985, pp.128–146; Joseph, Jr., RUDOLPH et Robert THOMPSON, « Ethnoterritorial Movements and the Policy Process: Accommodating Nationalist Demands in the Developed World », Comparative Politics, n ° 15, 1985, pp.291–311.
[31] Dahl FITJAR, The Rise of Regionalism, London: Routledge, 2010, p.44.
[32] Liesbet HOOGHE, Gary MARKS, Arjan H. SCHAKEL, The Rise of Regional Authority: A Comparative Study of 42 Democracies. Londres : Routledge, 2010.
[33] L’acquisition par la collectivité européenne d’Alsace de compétences en matière d’enseignement des dialectes alsaciens et de la langue allemande entre bien dans cette logique.
[34] Ce renforcement local donne également une visibilité nationale et représente un moyen d’action dans le champ politique central. Ainsi, les partis régionalistes se renforcent en élargissant leur public. L’accès aux grands médias nationaux garantit notamment à leurs idées une plus large publicité que la presse locale.
[35] Dawn BRANCATI, « The Origins and Strengths of Regional Parties », British Journal of Political Science n ° 38, vol.1, 2008, pp. 135–159.
[36] Emanuele MASSETTI et Arjan H SCHAKEL, « Decentralisation Reforms and Regionalist Parties’ Strength: Accommodation, Empowerment or Both? », Political Studies, 2017, n ° 65, vol.2, pp.432–451.
[37] Anwen ELIAS et Filippo TRONCONI, « From protest to power: Autonomist parties in government », Party Politics, n ° 17, vol.4, 2011, pp. 505–524.
[38] Frans SCHRIJVER, Regionalism after regionalisation: Spain, France and the United Kingdom, Amsterdam: Amsterdam University Press, 2006, pp. 185–187.
[39] André LECOURS, « Ethnonationalism in the West: A Theoretical Exploration », Nationalism & Ethnic Politics, vol. 6, n ° 1, 2000, pp. 103–124; André LECOURS, « Political Institutions, Elites, and Territorial identity Formation in Belgium », National identities, vol. 3, no.1, 2001, pp. 51–68; Anssi PAASI, « The institutionalisation of regions: a theoretical framework forr understanding the emergence of regions and the constitution of regional identity », Fennia vol.164 n ° 1, 1986, pp. 105–146; Anssi PAASI, « Deconstructing regions: notes on the scales of spatial life », Environment and Planning, vol. 23, 1991, pp.239-256; Anssi PAASI, Territories, Boundaries and Consciousness. The Changing Geographies of the Finnish, Russian Border, Chichester: John Wiley & Sons, 1996.
[40] Pierre BOURDIEU, « L’identité et la représentation, éléments pour une réflexion critique de l’idée de région » Actes de la recherche en sciences sociales, vol.35, 1980, pp.63-72.
[41] Michael KEATING, The New Regionalism in Western Europe, Cheltenham: Edward Elgar, 1998, p.87.
[42] Gertjan DIJKINK et Virginie MAMADOUH, « Identity and Legitimacy in the Amsterdam Region », dans S. MUSTERD et W. SALET, (dir.), Amsterdam Human Capital, Amsterdam : Amsterdam University Press, 2003, pp.331-358.
[43] Voir notamment Wallace OATES, Fiscal federalism. New York: Harcourt Brace, 1972.
[44] Pour un résumé de ces doctrines, John AGNEW. “The new regionalism and the politics of the regional question”, in John LOUGHLIN, John KINCAID et Wilfried SWENDEN, Routledge Handbook of Regionalism and Federalism Routledge, London, Taylor and Francis, 2013, p.130-140.
[45] CLUB MARC BLOCH, Citoyen ! Plaidoyer pour une démocratie locale renouvelée, Paris : L’harmattan, coll. « Logiques Juridiques », 2018, p.63.
[46] António CASIMIRO FERREIRA, La société d’austérité. L’avènement du droit d’exception, Paris : LGDJ, coll. « Droit et société », 2017, p.41.
[47] Voir sur cette question les débats sur la suppression de l’enquête publique à propos des autorisations environnementales expérimentées en Bretagne et Hauts-de-France.
[48] David Robert AGRAWAL, Dirk FOREMNY, « Relocation of the Rich: Migration in Response to Top Tax Rate Changes From Spanish Reforms », CESifo Working Paper Series, n°7027, 2018.
[49] Norman GEMMELL, Richard KNELLER, Ismael SANZ, « Fiscal decentralization and economic growth: Spending versus revenue decentralization », Economic Inquiry, 51/4, 2013, pp. 1915–1931 Andres RODRIGUEZ-POSE, Roberto EZCURRA, « Is fiscal decentralization harmful for economic growth? Evidence from the OECD countries », Journal of Economic Geography, 11/5, pp.619-643; Hamid DAVOODI and Heng-Fu ZOU, « Fiscal decentralization and economic growth: A cross-country study »., Journal of Urban Economics, 43, 1998, pp.244-257 ; Danyang XIE, Heng-Fu ZOU et Hamid DAVOODI, « Fiscal decentralization and economic growth in the United States », Journal of Urban Economics, 36, 1999, pp.228-239.
[50] Pablo BERAMENDI, « Political Institutions and Income Inequality : The Case of Decentralization », Wissenschaftszentrum Berlin für Sozialforschun, Discussion Paper, 2003.
[51] Agnese SACCHI, Simone SALOTTI, « The effects of fiscal decentralization on household income inequality: some empirical evidence », Spatial Economic Analysis, 9/2, 2014, pp.202-222.
[52] Tarkan CAVUSOGLU, Oguzhan DINCER, « Does Decentralization Reduce Income Inequality ? Only in Rich States », Southern Economic Journal, 82/1, 2015, pp. 285-306 : Le contre-exemple allemand est ainsi à considérer au regard de trois facteurs : richesse des Lands de l’Ouest ; politique de forte redistribution vis à vis de l’Est ; délocalisation internes dans le cadre d’un État où les inégalités régionales issues de la guerre froide conduisent à des écart originaux importants.
[53] Sibylle STOSSBERGI, David BARTOLINIII, Hansjörg BLÖCHLIGER, « Fiscal decentralisation and income inequality », OECD Economics Department Working Papers, 1331, 2016.
[54] Rémy PRUD’HOMME, « The dangers of decentralization », The World Bank research observer, 10/2, 1995, pp. 201-220.
[55] David Robert AGRAWAL, Dirk FOREMNY, « Relocation of the Rich: Migration in Response to Top Tax Rate Changes From Spanish Reforms », CESifo Working Paper Series, n°7027, 2018.
[56] Anna Cento BULL, « The Lega Nord and fiscal federalism: functional or postfunctional ? », Modern Italy 16/4, 2011, pp. 437-447

Pour aller plus loin, consulter les actes du colloque de la Fondation Res Publica du 27 février 2018 « Désertification et réanimation des territoires » ici.

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