La dégradation des relations diplomatiques entre l’Allemagne et les États-Unis et ses conséquences

Intervention de Bernard de Montferrand, ambassadeur de France en Allemagne de 2007 à 2011, au colloque « L’avenir des relations germano-américaines » du 18 septembre 2017.

Merci, Monsieur le ministre.

La une du Spiegel, il y a quelques jours, montrait une Mme Merkel comme accablée de fatigue et un M. Schultz très endormi en titrant « Aufwachen ! » (Réveillez-vous !). Les Allemands sont donc eux-mêmes très conscients de la faiblesse des débats de la campagne électorale.

Comme on vient de le voir, on constate aujourd’hui une dégradation très forte des relations germano-américaines. Un temps fort l’a symbolisée, le 25 mai dernier, au siège de l’OTAN où le Président Trump se rendait pour la première fois. Angela Merkel y a prononcé, sur un ton tout à fait inhabituel, quelques mots bien sentis, véritable leçon d’ouverture et de multilatéralisme au Président américain. En février dernier, l’ARD (Arbeitsgemeinschaft der öffentlich-rechtlichen Rundfunkanstalten der Bundesrepublik Deutschland), la grande chaîne de télévision publique, a réalisé un sondage selon lequel 22 % des Allemands considéraient l’Amérique comme un partenaire fiable (contre 66 % en novembre de l’année précédente).

Cette dégradation est-elle seulement le produit de l’élection de Donald Trump (dans le monde, pratiquement toutes les relations bilatérales des États-Unis connaissent une sorte de crise majeure et ont été soit déstabilisées soit fragilisées) ou s’agit-il d’un phénomène beaucoup plus profond ?
Il faut d’abord remettre en perspective ce phénomène face aux fondamentaux des relations américano-allemandes qui paraissaient jusqu’ici d’une solidité à toute épreuve.

Jean-Michel Quatrepoint a rappelé quelque chose de très important : les liens du sang. « Un Américain est un Allemand qui parle anglais », a-t-on coutume de dire. En nombre, les premiers immigrants arrivés aux États-Unis sont les Allemands, bien avant les Ecossais et les Irlandais.

Il faut parler ensuite des liens de l’histoire. Tous les livres récents sur la Première guerre mondiale montrent l’étroitesse des liens qui, à l’époque, existaient entre Américains et Allemands. Juste après la guerre, Clémenceau et Lloyd George étaient furieux contre Wilson, lequel, considérant qu’il ne devait pas y avoir de pays gagnant, que l’Allemagne ne devait pas être humiliée, avait une attitude extrêmement ouverte à l’égard de l’Allemagne. Après la Deuxième guerre mondiale, il y eut l’aide à la reconstruction puis l’aide à la remilitarisation (la protection contre la menace soviétique comptait énormément pour les Allemands), enfin l’aide à la réunification qui fut fortement ressentie par les Allemands.

Tout cela se traduit par un réseau germano-américain d’une densité exceptionnelle, une sorte d’imbrication extraordinairement étroite. Les relations d’affaires et commerciales ne se traduisent pas uniquement par les chiffres considérables d’investissements directs ou de commerce mais aussi par des relations humaines, personnelles, d’une grande étroitesse entre hommes d’affaires, par des relations universitaires et intellectuelles et, dans le domaine stratégique, par la fameuse Conférence de Munich, la Wehrkunde. Ce forum annuel consacré aux questions de sécurité, sorte de grand-messe où tout le monde se rencontre n’a nul équivalent dans le monde. Les Américains affrètent un Boeing où embarquent de nombreux sénateurs – et on ne déplace pas facilement les sénateurs américains – qui viennent passer trois jours à Munich. Cette proximité a fait que, pour des raisons fondamentales de sécurité, il ne fallait jamais demander à l’Allemagne de choisir entre l’Europe, la France et les États-Unis. De Gaulle en avait fait l’expérience lorsque les Allemands avaient imposé le fameux préambule au traité de l’Élysée, signé le 22 janvier 1963, préambule qui sera voté par le Bundestag le 15 juin 1963 [1].

Dans ce contexte, quelle est la signification des difficultés actuelles ?

Mon sentiment est que si l’imprévisibilité et la violence verbale de Trump sont un facteur de cette crise, elles accentuent et mettent en évidence une évolution assez profonde de la politique étrangère allemande qui s’est manifestée par de nombreux signes depuis les années 2000 avec la nouvelle affirmation de l’Allemagne, une fois passées les difficultés de la réunification. À une sorte d’américano-scepticisme s’est progressivement substituée une autonomie, une indépendance d’esprit, une sorte d’émancipation croissante de l’Allemagne.

Cette nouvelle attitude se traduit dans de nombreux domaines. Le plus significatif est naturellement celui de la politique étrangère et de sécurité. Dans le passé, l’Allemagne avait toujours considéré que les garanties et l’engagement américains étaient un article de foi aveugle. Adenauer s’est certes parfois interrogé sur les disponibilités au compromis des Anglo-saxons au moment des crises de Berlin mais sans véritable suite. L’Allemagne était l’élève modèle de la classe atlantique. Cette attitude a clairement évolué ces dernières années au point d’en faire pratiquement l’un des élèves les plus difficiles.

L’attitude de l’Allemagne a évolué dans une affirmation d’autonomie qui touche la défense mais aussi les questions européennes. En témoignent deux expressions emblématiques de cette attitude : Gerhardt Schröder déclare au Bundestag en 2003 : « Désormais, toutes les décisions concernant l’Allemagne se prennent à Berlin ». Quatorze ans plus tard, fin mai 2017, après le G7 en Italie, Angela Merkel déclare : « Le temps où nous pouvions totalement nous reposer sur d’autres est en partie révolu ». Dans une longue interview qui reprend son analyse de la nouvelle attitude allemande, donnée à Die Zeit le 5 juillet 2017, elle précise : « Nous ne savons pas si nous pouvons ou devons à l’avenir nous reposer sur les États-Unis, ne sachant pas s’ils sont prêts à s’investir autant qu’avant dans le travail des Nations Unies, dans les affaires du Moyen-Orient, dans la politique de sécurité européenne et dans les missions de maintien de la paix en Afrique ».

Cette manifestation d’autonomie touche des domaines aussi divers qu’essentiels.

En 2003, on l’a rappelé, Schröder décide que l’Allemagne ne soutiendra pas la guerre en Irak. Non seulement il ne participe pas, non seulement il ne soutient pas mais il ne fait pas de chèque – contrairement à Kohl lors de la première intervention en Irak – et, en plus, il s’oppose et le dit haut et fort. En 2008-2009, de nombreuses années après, c’est au tour de Mme Merkel de freiner sérieusement et, avec le Président Sarkozy, de refuser à Obama les projets américains pour franchir les premiers pas de l’adhésion de la Géorgie et de l’Ukraine à l’OTAN, considérant que les Européens n’étaient pas prêts à mourir pour Kiev ou pour la Géorgie. En 2011, l’Allemagne suit le Brésil, l’Inde, la Russie, la Chine dans l’abstention au Conseil de sécurité où l’on proposait une No Fly Zone sur la Libye, ce qui est très fortement ressenti à l’époque. C’est aussi vrai, cela a été dit, pour la présence sur le sol allemand des têtes nucléaires à moyenne portée, refusée par le ministre allemand libéral Westerwelle et aujourd’hui par Schultz, qui demande le retrait de toutes les têtes nucléaires à moyenne portée du territoire allemand. C’est aussi la position des libéraux, avec M. Lindner, successeur de M. Westerwelle.

Le second domaine qui sépare les États-Unis et l’Allemagne est la question fondamentale du multilatéralisme et du libre-échange qui en est l’expression la plus sensible. Le Président Trump, on l’a rappelé, a lancé une attaque plus que frontale contre les excédents allemands et l’industrie automobile allemande (7 % du marché américain) en introduisant l’exigence d’une contrepartie aux dépenses de défense américaine à l’abri desquelles se font ces excédents. Cela s’ajoute à l’échec des projets d’accords commerciaux, devenus très impopulaires en Allemagne, par des exigences de transparence en matière d’environnement et de santé publique, mais aussi, dans un certain nombre de milieux d’affaires, par des exigences, de la part de l’Allemagne, d’un meilleur équilibre pour résoudre les différends. Mme Merkel a réagi vigoureusement aux attaques de Trump, en particulier dans ce fameux article de Die Zeit du 5 juillet (déjà cité): « Tandis que nous cherchons comment nous pouvons coopérer pour que cela profite à chacun, l’administration américaine envisage la mondialisation, non pas en termes de gagnant-gagnant mais de gagnant-perdant. »

Le troisième domaine qui sépare de façon très forte les Américains des Allemands aujourd’hui est celui de la lutte contre le réchauffement climatique qui tient un rôle majeur dans une opinion allemande d’une sensibilité exacerbée sur ce sujet. En décembre 2009, à la conférence de Copenhague, les États-Unis s’étaient rapprochés de la Chine pour refuser un compromis qui aurait augmenté les objectifs de réduction des émissions de gaz à effet de serre. Ce rapprochement entre les deux pays qui représentent 40 % des émissions mondiales était apparu aux yeux des Allemands comme une sorte d’alliance contre-nature et une trahison. J’étais alors en Allemagne. « Comment les Américains peuvent-ils par une sorte d’alliance de circonstance se retrouver avec la Chine sur un sujet qui pour nous est absolument fondamental ? », s’indignait-on. Naturellement les positions de Trump et l’annonce du retrait, le 2 juin, de l’accord de Paris, même si M. Tillerson, ces derniers jours, a un peu rétropédalé, heurtent de plein fouet les intérêts allemands. Elles sont pour eux totalement inacceptables.

Autre sujet de divergence aujourd’hui : les questions financières. On se souvient trop peu que la crise de 2008-2009, causée par les subprimes américaines, dont pourtant les banques allemandes avaient abusé, avait terriblement choqué les Allemands. M. Peer Steinbrück, le ministre des Finances (qui fut ensuite candidat à la chancellerie), avait eu des mots très durs sur le sujet. Je me souviens qu’il se promenait partout en Allemagne en parlant de l’économie américaine comme d’une « économie de casino » qu’il présentait comme scandaleuse ! Il y avait eu dans les milieux économiques allemands une forte campagne anti-américaine. Angela Merkel a toujours eu des relations personnelles étroites avec Barack Obama mais, tout de même, en 2011, lors du G20, elle eut à subir de sa part des critiques d’une grande violence contre l’Allemagne et les Européens qui ne voulaient pas faire de relance à tout prix. Venant d’un pays qui avait causé la crise, l’effet avait été très négatif en Allemagne. On avait même vu Mme Merkel pleurer à la télévision tant elle était affectée par ces attaques.

Dernier sujet : les questions énergétiques sont devenues un problème avec le fameux gazoduc Nord Stream 2 auquel les Américains s’opposent pour des raisons stratégiques, surtout pour contrer les Russes. Les décisions américaines concernant l’exploitation des gaz de schiste sont également très mal vues des Allemands.

Quelles conséquences ces malentendus peuvent-ils avoir sur les relations entre la France et l’Allemagne, sur les affaires européennes, sur la position stratégique de l’Allemagne ?

Je crois que la nouvelle autonomie allemande ouvre potentiellement de nouvelles perspectives pour l’Europe, en particulier en rééquilibrant la relation Amérique-Allemagne et la relation Amérique-Europe en faveur d’une autonomie plus forte des Européens. Mais cette évolution n’a rien d’automatique. D’abord parce que la relation entre les États-Unis et l’Allemagne restera très forte, non seulement pour les raisons culturelles et historiques dont nous avons parlé mais naturellement pour des raisons stratégiques et de sécurité. Ce n’est ni la France ni la Grande-Bretagne mais les Américains qui, au sein de l’Alliance atlantique, sont les garants, en dernier ressort, de la sécurité allemande. Les malentendus entre l’Amérique et l’Allemagne après la première Guerre du Golfe, malgré toutes les phrases assassines qui avaient été prononcées à l’époque, ont été dissipés plus rapidement qu’on ne le croyait et Mme Merkel a joué, à sa place, à l’époque, un rôle actif. Elle a aussi démontré où étaient ses priorités en se réconciliant très rapidement avec Barack Obama, malgré de sérieuses divergences sur les frontières de l’OTAN, sur la conjoncture mondiale et malgré les fameuses crises de Wikileaks, des écoutes de son portable ou de l’expulsion en 2014 du responsable des services spéciaux américains en Allemagne. Elle a reçu des mains de Barack Obama la Presidential Medal of Freedom, ce qui est un symbole fort et, comme on l’a rappelé, ses convictions, héritées de son passé en République Démocratique Allemande, restent profondément ancrées dans l’orbite américaine. Et je rappelle que, comme on l’a dit, elle a soutenu l’intervention américaine en Irak.

Cette évolution n’a rien d’automatique non plus parce que, pour qu’une alternative plus européenne se développe, il faudrait que les projets européens soient clairs, qu’ils soient soutenus par une véritable dynamique européenne. Or ces projets sont encore trop souvent marqués par l’incertitude et les ambiguïtés. Le rééquilibrage vers une Europe plus autonome dépendra de la direction que nous saurons prendre et d’un accord franco-allemand sur quelques objectifs clairs. On nous dit que l’agenda franco-allemand est en préparation, on y travaille très activement entre la chancellerie et l’Élysée de façon à pouvoir le mettre en œuvre après les élections allemandes, mais les problèmes restent nombreux.

Par le passé, Mme Merkel a toujours montré qu’elle était très peu encline à définir des programmes. Aujourd’hui, si on essaie de définir le sien on peine, comme ses adversaires de la campagne l’ont souligné, à sortir d’un certain flou et d’une assez grande incertitude. D’où la difficulté de définir un programme franco-allemand avec la Chancelière.

Deuxième difficulté : Quels sont les objectifs possibles ? Lesquels retenir ?

En matière économique et financière, l’Allemagne ne prend guère le chemin d’un changement de politique économique et reste d’autant plus attachée à des comptes équilibrés que son endettement reste élevé et que son vieillissement l’inquiète au plus haut point. J’ai souvent entendu M. Schaüble, le ministre fédéral des Finances, interpellé sur ces sujets (sur le mode : « Pourquoi ne dépensez-vous pas plus ? »), répondre à ses interlocuteurs français : « Vous avez de la chance, vous pouvez passer le ballon de l’endettement à la génération suivante, parce qu’il y a une génération suivante en France. Mais nous, à quelle génération allons-nous passer le ballon de l’endettement allemand ? Cela nous fait obligation d’avoir une situation saine, plus saine que d’autres ». Et l’un des facteurs de désamour de Schultz dans l’opinion allemande ces derniers mois a été sa remise en cause possible des réformes de Schröder et son image « dépensière » par rapport à Mme Merkel, surnommée la « Schwäbische Hausfrau » (la ménagère souabe), en quelque sorte l’Auvergnate allemande.

Autre incertitude, pour pouvoir lancer quelque chose d’ambitieux pour l’autonomie européenne, la preuve reste encore à faire que des réformes importantes pourront être mises en œuvre en France afin que notre pays redevienne un partenaire fiable de l’Allemagne pour approfondir l’union économique et monétaire. Les Allemands, j’en suis convaincu, ne progresseront vers davantage de solidarité qu’avec le retour d’une confiance économique profonde sur les fondamentaux de l’économie française.

Enfin, autre difficulté, quand on parle des sujets précis, les interprétations restent extrêmement éloignées en France et en Allemagne.
En Allemagne, Fonds monétaire européen signifie surveillance – comme le Fonds Monétaire International (FMI) au niveau mondial –, surveillance de la vie économique de chacun et garantie de sérieux ; les Français de leur côté y voient des moyens de financement supplémentaires.

Que signifient « gouvernement de la zone euro », « ministre des Finances européen », « budget européen » ?

Que veut-on faire dans d’autres domaines très sensibles ? Veut-on véritablement un cloud européen, un « nuage » qui protège les données européennes ou un marché unique numérique ? Il n’y a jamais eu de volonté claire dans ce domaine.

Dans le domaine de la défense, deuxième grand domaine important pour l’avenir, le facteur d’incertitude porte sur ce que veulent exactement faire les Européens. Il y a une volonté affichée partout, on en parle depuis longtemps, de faire une défense européenne. Mme Merkel a d’ailleurs augmenté de manière très sérieuse le budget allemand (près de 8 %) bien que le SPD refuse l’objectif des 2 % du PIB consacrés à la défense en Allemagne. Pourtant que d’ambiguïtés ! En Allemagne on parle beaucoup d’une armée européenne alors que chacun sait que jamais les forces engagées dans une opération même multilatérale, même intégrée, n’ont cessé d’avoir un lien d’autorité directe avec leurs autorités nationales. Quand des troupes allemandes sont en Afghanistan, elles ont naturellement un lien direct avec le ministère de la Défense allemand et avec la commission du Bundestag qui suit ces affaires. Dans ce contexte, la notion d’armée européenne est évidemment quelque chose de très particulier. On parle aussi coopération en matière d’armement mais jamais les exigences du « juste retour » n’ont été aussi fortes et le comportement de l’Allemagne aussi soucieux de ses intérêts nationaux. Quand, il y a quatre ans, Airbus et EADS ont voulu racheter British Aerospace (BAE) tout a été bloqué par l’Allemagne pour des raisons stratégiques très claires. Réussira-ton à se fixer des objectifs très pragmatiques en laissant de côté les a priori idéologiques dans ce domaine, en cherchant des mutualisations, des coopérations, selon des cercles variables ? Sommes-nous prêts à créer des instruments de développement de la recherche, sorte de DARPA [2] européenne, comme on en parle beaucoup ? La voie semble aujourd’hui beaucoup plus ouverte mais ne nous faisons pas d’illusions, de même que le Brexit ne modifie pas complètement la donne de la défense européenne – de très nombreux pays membres ont la même position que Londres –, de même la nouvelle autonomie allemande ne va pas entraîner la création immédiate de capacités de défense européennes. Mais elle devrait les faciliter.

Quels effets les nouvelles dispositions allemandes auront-elles sur les relations avec la Russie et avec l’Asie ?

Je crois qu’elles n’en auront pas tellement parce que l’Allemagne n’a pas attendu Trump pour faire son « pivot asiatique » en matière économique. Il y a déjà eu, comme on l’a dit, une réorientation des investissements allemands vers les États-Unis et du commerce allemand vers l’Asie.

Vis-à-vis de Moscou et sur l’Ukraine, l’Allemagne n’a pas non plus attendu l’élection de Trump pour affirmer un point de vue allemand et européen qui n’est pas tout à fait le même que celui des États-Unis, une position relativement proche de celle de la France. Son approche à l’égard de la Russie tient aux relations économiques très fortes qu’elle entretient avec ce pays, tempérée par la conscience au moins aussi forte qu’il est aujourd’hui un partenaire beaucoup moins intéressant que ne peut l’être la Chine. Elle est aussi appuyée sur la conviction qu’un élargissement à tout va de l’OTAN vers des pays comme l’Ukraine ou la Géorgie, ou d’autres, n’aurait pas de sens aujourd’hui.

Le défi de l’Allemagne dans les circonstances actuelles et dans sa nouvelle relation avec les États-Unis, c’est un peu le défi que M. Brzeziński décrivait en qualifiant l’Allemagne de « quasi global power ». Tout est dans le « quasi » mais il y a quand même l’expression « global power ». Trump pousse l’Allemagne à évoluer vers un statut encore plus affirmé. Mais nous voyons que l’Allemagne marche dans cette direction avec la réserve et la prudence dont Mme Merkel est en quelque sorte l’image, Richelieu aurait dit « à pas de plomb et de laine ».

[1] Préambule à la loi portant ratification du traité franco-allemand, voté par le Bundestag (Bonn, 15 juin 1963) :
« Convaincu que le traité du 22 janvier 1963 entre la république fédérale d’Allemagne et la République française renforcera et rendra effective la réconciliation et l’amitié entre le peuple allemand et le peuple français.
Constatant que les droits et les obligations découlant pour la République fédérale des traités multilatéraux auxquels elle est partie ne seront pas modifiés par ce traité.
Manifestant la volonté de diriger l’application de ce traité vers les principaux buts que la république fédérale d’Allemagne poursuit depuis des années en union avec ses autres alliés et qui déterminent sa politique, à savoir :
– le maintien et le renforcement de l’Alliance des peuples libres et, en particulier, une étroite association entre l’Europe et les États-Unis d’Amérique,
– l’obtention du droit d’autodétermination pour le peuple allemand et le rétablissement de l’unité allemande,
– la défense commune dans le cadre de l’Alliance de l’Atlantique nord et l’intégration des forces armées des États membres du pacte,
– l’unification de l’Europe selon la voie tracée par la création des Communautés européennes, en y admettant la Grande-Bretagne et les autres États désirant s’y joindre et le renforcement des Communautés existantes,
– l’abaissement des barrières douanières par des négociations entre la Communauté économique européenne, la Grande-Bretagne et les États-Unis d’Amérique, ainsi que d’autres États, dans le cadre du GATT.
Conscient qu’une coopération franco-allemande conduite selon ces buts sera bénéfique pour tous les peuples, servira au maintien de la paix dans le monde et contribuera par là simultanément au bien des peuples français et allemand,
Le Bundestag ratifie la loi suivante.
»
[2] La Defense Advanced Research Projets Agency (DARPA), agence du département de la Défense créée aux États-Unis en 1958 (en réplique à Spoutnik), dans le but de faire en sorte que la technologie américaine soit toujours supérieure à celle de ses ennemis, a contribué à la création d’inventions qui ont révolutionné la technologie dans le monde militaire et civil comme l’Arpanet qui est devenu Internet ou encore le GPS. Aujourd’hui, cette agence cherche à positionner les Américains au premier rang dans le développement technologique des armes de demain dans les domaines de la cyberguerre, de la robotique, des nanotechnologies, du spatial.

Le cahier imprimé du colloque « L’avenir des relations germano-américaines » est disponible à la vente dans la boutique en ligne de la Fondation.

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