Débat final lors du colloque « Vers la fin de la globalisation, mythe ou réalité? quelle stratégie pour la France? » du 6 mars 2017.

François Lenglet
J’ajouterai un mot à propos de la technologie. Nul doute que l’invention du microprocesseur ait été une cause très importante de la chute du mur parce que la diffusion de l’information a fait beaucoup pour alimenter le ressentiment des populations contre leurs maîtres. Pour autant, peut-on en déduire que la technologie joue toujours ce rôle-là ? Je n’en suis pas sûr. Ne peut-on pas au contraire imaginer que la technologie n’est jamais qu’un outil mis au service de la pulsion du moment ? À l’heure libérale la technologie est libérale mais à l’heure protectionniste elle sert au contraire à contrôler, à surveiller, à renforcer les pouvoirs de l’État. Autrement dit, la technologie n’a pas d’âme en elle-même mais c’est bien sûr le politique, entendu au sens large, c’est-à-dire la vie de la société et l’idéologie dominante qui lui assigne une fonction, me semble-t-il.

Quant à la fermeture, jusqu’où ira-t-elle ? Regardons l’extraordinaire vitesse avec laquelle des choses que personnellement j’aurais crues impensables se produisent. Trois exemples : les relocalisations, la politique de Trump avec la réforme fiscale – dont parlait Jean-Michel Quatrepoint –, qui pourrait transformer complètement l’équilibre des échanges mondiaux par une incitation très puissante à acheter à l’intérieur des frontières plutôt qu’à l’extérieur. Le troisième exemple est l’incroyable rapidité avec laquelle la libre circulation des capitaux a disparu sur la planète, au moins entre l’Europe, les États-Unis etc., avec la fin du secret bancaire. C’était impensable ! Et c’est bien une demande politique alors que la technologie est toujours là…

Thierry de Montbrial
La fin du secret bancaire est typiquement rendue possible par la technologie. Cela n’aurait pas été possible il y a vingt ans. C’est une issue rendue possible par la technologie.
L’Internet n’est comparable en importance qu’à la découverte de l’écriture et à celle de l’imprimerie qui ont transformé entièrement le monde. Je ne veux pas dire autre chose. Dans ce cadre-là, il y aura des mouvements de flux, de reflux, d’ouverture, de fermeture mais ce ne seront jamais des fermetures complètes parce que, qu’on le veuille ou non, le monde est devenu petit.

Jean-Michel Quatrepoint
Mais Internet permet la relocalisation…
Personne ne pense qu’on va arrêter l’interconnexion. Simplement, c’est un mouvement. Par exemple, le local va reprendre un certain pas sur le global, mais seulement un certain pas. Tout est dans la position du curseur.

Jean-Pierre Brard
Les technologies sont, comme la langue d’Ésope, la meilleure et la pire des choses. Elles sont un moyen et non une solution.

M. de Montbrial a été, selon moi, unilatéral. La chute de l’Union Soviétique appartient à l’histoire. Elle a eu lieu, ce n’est plus aujourd’hui un enjeu. Mais vous n’avez pas du tout évoqué la chute de l’empire américain qui, selon moi, est en train de se produire sous nos yeux. Le 30 avril 1975, qui vit l’ambassadeur des États-Unis s’enfuir devant le Viêt-Cong, la bannière étoilée sous le bras, fut selon moi le premier acte de la chute de l’empire. Puis il y eut le rétablissement des relations diplomatiques des États-Unis avec Cuba et la reconnaissance de l’échec de la politique agressive de blocus des États-Unis (un acte que les médias n’ont pas décrypté pour ce qu’il valait).

Depuis plus d’un siècle, les États-Unis n’ont pu imposer leur domination que par la guerre. Aujourd’hui, Trump, d’une façon très empirique (on ne peut pas l’accuser d’être un intellectuel ou un idéologue), réoriente la politique américaine avec le repli dans les limites du territoire national. En même temps, à Davos, Xi Jinping parle du libre-échange, se substituant, d’une certaine manière, aux États-Unis. Mais il prend aussi la tête de la croisade pour sauver la planète. Cela devrait nous faire réfléchir.

Il y a des périodes de globalisation, avez-vous dit. En entendant François Lenglet, je pensais au petit ouvrage de Lénine : « Impérialisme, stade suprême du capitalisme » [1] où il décrivait la globalisation de l’époque.

L’histoire nous apprend qu’il n’y a pas eu de grande rupture sans guerre, sans flots de sang. À l’ère numérique, où tout va très vite, comment voyez-vous l’évolution de ces mutations, dans le contexte des menaces des uns et des autres, des bruits de bottes en Europe (ils sont nombreux), mais aussi de la nouvelle confrontation entre les États-Unis et la Chine ?

Je partage le regard lucide que Jean-Pierre Chevènement porte sur le réel. La réalité est inquiétante, et pas seulement en France. Aux Pays-Bas, au Danemark, en Finlande, en Pologne… on observe un repli très étroit sur un nationalisme chauvin qui incite à la méfiance et à la haine de l’autre.

François Lenglet
Dans l’histoire, certains de ces cycles ont été ponctués par des guerres, dans d’autres cas, la fermeture se fait tranquillement, comme après 1873. Il est vrai que toutes les phases de globalisation s’accompagnent d’une puissance mondiale qui organise l’ordre. En effet, la globalisation suppose la sécurité universelle des transactions et nécessite un gendarme universel qui fasse respecter l’ordre. À l’évidence, la période de globalisation qui se termine est dominée par les États-Unis et on peut tout à fait penser que le déclin de cette période de globalisation s’accompagne d’un déclin relatif des États-Unis, comme le précédent cycle avait vu l’effacement relatif du Royaume-Uni.

Thierry de Montbrial évoquait l’après-Première guerre mondiale. Il faut relire les pages du livre « Les conséquences économiques de la paix » [2] où Keynes raconte la vie, avant la Première guerre mondiale, d’un Londonien fortuné qui peut voyager et investir dans n’importe quel coin du monde, commercer avec tous les pays du monde, se faire livrer tous les produits. En 1913, écrit Keynes, cet homme-là était convaincu que cet ordre allait durer autant que lui. On voit que toutes ces phases de mondialisation s’accompagnent d’un ordre mondial imposé par les puissances qui, au fil des âges, cèdent le pas à de nouvelles puissances. On peut imaginer que la rivalité Chine / États-Unis sera l’un des axes qui, à la fois, déstabilisera le monde de la transition et contribuera, je l’espère, à le réorganiser ensuite.

Jean-Michel Quatrepoint
J’ai l’impression, pour ma part, que l’ennemi tout désigné, en tout cas pour les démocrates, était la Russie. Je ne suis pas dans le secret, je ne sais pas si les hackers russes ont agi ou pas mais j’observe l’hystérisation qui gagne notamment la presse américaine vis-à-vis du rôle des Russes, des rencontres entre l’équipe Trump et l’ambassadeur de Russie… alors qu’il est logique que des équipes qui vont accéder au pouvoir rencontrent des diplomates d’autres pays !

Le vrai sujet est : Que voulait vraiment faire l’establishment qui tenait le haut du pavé aux États-Unis ? Des agences de renseignement qui, aux États-Unis, s’étaient autonomisées et étaient considérées comme un État dans l’État (17 agences de renseignement très peu contrôlées, 200 000 personnes, 70 milliards de dollars de budget annuel), avaient poussé le Président Bush à faire la guerre en Irak sur des « fake news » (fausses informations). Elles ont fait pression sur Barack Obama pour qu’il ne ferme pas Guantanamo.

Un autre pouvoir considérable est celui des médias (le 4ème pouvoir). Les présidents, les politiques américains se plient aux normes des médias.

Il est amusant de constater que l’équipe Trump a gagné parce qu’elle a mieux exploité les nouvelles technologies que les équipes Clinton. Trump a gagné parce que son équipe a utilisé un logiciel de Peter Thiel (seul magnat de la Silicon Valley qui l’ait soutenu) qui permet de cibler de façon extrêmement fine les électeurs des dix Swing States (États-clés). Cela a permis de concentrer tout le porte à porte, toute l’action militante sur quelques dizaines de milliers d’électeurs en dépensant le minimum d’argent. Hillary Clinton a gagné en voix avec les gros bataillons de la Californie et du Nord-est de l’Amérique. Trump, lui, a fait l’impasse sur ces États. Il a optimisé le système des grands électeurs en se concentrant sur les Swings States. Les démocrates ont été mauvais dans ce domaine alors que les GAFA les soutenaient ! Du coup, refusant de reconnaître qu’ils ont été mauvais, ces pouvoirs, les services de renseignement, les médias et l’administration de Washington, ont fait de la Russie l’ennemi numéro un. Si Trump a gagné c’est selon eux parce que les Russes ont truqué l’élection. Je pense qu’ils essaient d’avoir la peau de Trump par tous les moyens (l’impeachment ou d’autres moyens déjà utilisés dans l’histoire des États-Unis). Les enjeux sont extrêmement forts.

L’obsession anti-russe touche également l’Europe. On parle aujourd’hui de supprimer le vote par Internet parce que les Russes pourraient intervenir ! L’hystérisation antirusse, Ayrault en tête, est en cours. Les Russes ne sont pas des enfants de chœur. Il y a beaucoup de hackers russes et israéliens (les uns et les autres sont très doués et un quart de la population israélienne est russe). Des sociétés privées russes font profession de sécuriser les systèmes informatiques des entreprises. Le Kremlin les laisse faire dès lors qu’ils ne s’attaquent pas au système russe. En revanche, il leur laisse la bride sur le cou pour agir à l’extérieur. Il est fort possible que ces spécialistes aient « hacké » le Parti démocrate et que des mails aient été transmis à wikileaks. De là à vouloir déclarer la guerre à la Russie il y a un pas.

Quant à la Chine, Trump a battu en retraite sur les relations avec Taïwan parce qu’il avait commis une erreur [3]. Je suis persuadé qu’ils trouveront un compromis. Quant aux barrières douanières, elles ne se feront pas par des taxes (sauf cas particulier, sur l’acier, l’aluminium ou autres) mais par la fiscalité. C’est une façon compliquée mais très habile de le faire.

Dans la salle
J’aimerais faire mention d’une vérité historique relative à l’économie que je considèrerai du point de vue politique. Cette vérité a été mise en lumière par un professeur d’économie à Harvard (donc peu suspect d’être un tenant de l’autarcie) qui a rappelé, dans un livre intitulé « Capital rules » [4], que la dérégulation tous azimuts, particulièrement des mouvements de capitaux, n’est pas l’enfant des Américains, de Wall Street, du Trésor, encore moins de la City mais des Français, particulièrement de quatre socialistes français, dans les années 80 et 90 : Jacques Delors [5], président de la Commission, son directeur de cabinet, l’honorable Pascal Lamy, déjà cité ce soir, Michel Camdessus [6] (plutôt chrétien-démocrate que socialiste) et Henri Chavranski [7] alors directeur du comité à l’OCDE en charge des mouvements de capitaux, une instance très importante dans la dérégulation.

Ma question s’adresse à M. Chevènement. Que pense le socialiste que vous fûtes de ce qui s’apparente à une trahison des idées socialistes, du peuple français et surtout à un sacrifice des intérêts nationaux sur l’autel d’un universalisme européiste de pacotille ?

Jean-Pierre Chevènement
J’ai lu le livre de Rawi Abdelal que vous évoquez. Je nuancerai un peu son analyse en disant que Jacques Delors, Pascal Lamy, Henri Chavranski et Michel Camdessus ont donné une forme juridique à une poussée venue du monde anglo-saxon qui s’est répercutée sur le continent européen à travers l’Acte unique négocié en 1985, ratifié en 1987 et mis en œuvre au début des années 1990, puisque la libération complète des mouvements de capitaux à l’intérieur de l’Europe mais aussi vis-à-vis des pays tiers, c’est-à-dire du reste du monde, a été le véritable acte de baptême de la mondialisation financière. Le capitalisme financier à l’échelle mondialisée repose aussi sur cette donnée juridique : des traités et des textes élaborés à l’OCDE par Chavranski et, un peu plus tard, au FMI par Camdessus, mais sans concrétisation.

Il faut bien comprendre que tout cela tourne autour de la personne de Jacques Delors. Vous le présentez comme un socialiste mais on peut le définir plus justement comme un démocrate-chrétien. Il vient de la CFTC et il était secrétaire général du Premier ministre Chaban-Delmas, à l’origine de cette « nouvelle société » dont on nous chantait la magnificence au début des années 1970. Jacques Delors travaillait au Plan à la fin des années 70 quand je le côtoyais dans l’antichambre de François Mitterrand, lequel me disait, pour me faire plaisir (je ne représentais pas vraiment la même orientation politique) : « Qu’est-ce qu’ils peuvent être casse-pieds ces gens du plan ! ». Comme vous l’avez souligné, à l’époque, le Parti socialiste se voulait encore socialiste, d’une certaine manière. En tout cas, il avait une vision des choses très éloignée du modèle néolibéral qui, porté aux États-Unis par Milton Friedman et les Chicago Boys [8], s’est transmis à l’Europe et, à travers l’Europe, au reste du monde dans le cours des années 80. La victoire politique de Jacques Delors, qui était manifeste en mars 1983, a porté ses conséquences au niveau de la rédaction d’un certain nombre de textes, au sein de l’OCDE d’abord, et ensuite au niveau européen à travers la réglementation européenne basée sur l’Acte unique. En effet, c’est sur la base de l’Acte unique que la Commission européenne a élaboré plusieurs centaines de directives et projets de règlements qui font aujourd’hui l’essentiel de notre législation en matière économique. De la même manière, au niveau du FMI des projets ont été élaborés par Camdessus mais les États-Unis ont considéré que le travail était fait, donc ils n’ont pas donné suite. C’est ce que raconte Rawi Abdelal.

Cela illustre le grand tournant de 1983 dont les suites se feront sentir très longtemps : La libération des capitaux se fait au début des années 90, l’abolition du Glass-Steagall Act, aux États-Unis, à la fin des années 90. On voit bien que nous sommes en présence de mouvements longs.

Un exemple m’est venu tout à l’heure à l’esprit : on a parlé de la mondialisation britannique avant 1914. À l’époque, la livre sterling était la principale monnaie de réserve mondiale. C’est seulement en 1955 que le dollar a remplacé la livre sterling comme première devise dans les réserves des banques centrales (le montant des réserves en dollar est devenu plus important que le montant des réserves en livre sterling). Pourtant l’hégémonie britannique était terminée depuis longtemps ! Cela illustre la très grande lenteur de certaines évolutions.

Il faut donc raisonner sur le temps long. L’intérêt du débat de ce soir est de montrer que nous entrons vraiment dans une nouvelle ère, dans un nouveau cycle. L’un se ferme, l’autre commence.

Alain Dejammet
Vous parlez de l’histoire, du temps long. J’apporterai une illustration apaisante.

À propos de la technologie et de la chute de l’Union Soviétique, phénomène politique ou influence de la technologie, je voudrais rappeler d’abord l’observation – qui me paraît sage – d’Hélène Carrère d’Encausse qui avait commencé à imaginer un éclatement de l’Union Soviétique à partir de la périphérie dans son livre « L’Empire éclaté » [9]. Puis elle écrivit « La Gloire des nations ou la fin de l’Empire soviétique » [10] après Tchernobyl, accident technologique touchant l’approvisionnement des soviétiques en électricité. Or « le communisme, c’est les Soviets plus l’électricité » [11]. C’est la fin du communisme parce que la technologie a fini par triompher. Je crois que cette observation d’Hélène Carrère d’Encausse est juste.

À propos de toutes ces affaires, Russie, Ukraine Crimée etc.il serait bon de se rappeler l’histoire et les témoignages. Quand on lit la correspondance des diplomates qui vont à Yalta en 1945, c’est très curieux, ils ne parlent pas d’Ukraine, ils ont l’impression naïve d’aller en Russie. Quand on relit la correspondance de Balzac, qui a passé trois ans en Ukraine, dans la partie d’ailleurs la plus polonaise, la plus catholique, la plus éloignée de l’orthodoxie de l’Ukraine d’alors, c’est très curieux, quand il écrit à sa mère, à sa sœur, ce fou parle de Russie, il ne savait pas qu’il était en Ukraine.
Ce sont les témoignages de l’histoire…

Jean-Pierre Chevènement
Je dois dire que j’ai eu moi-même l’impression d’être en Russie en allant à Zaporojie, ville ukrainienne sur le Dniepr, jumelée avec Belfort à l’initiative d’un de mes prédécesseurs à la mairie de Belfort, Pierre Dreyfus-Schmidt, qui était persuadé de faire un geste de rapprochement avec la Russie (à l’époque l’Union Soviétique).

Dans la salle
Vous avez beaucoup parlé ce soir du rôle de la technologie dans la mondialisation. M. Chevènement a mentionné que la politique devrait primer sur la technologie.

Je considère que l’abstraction mathématique est un outil extrêmement puissant au service de la mondialisation qui, comme l’a dit M. de Montbrial, fait disparaître les peuples derrière des modèles abstraits et les particularités des pays derrière des moyennes. C’est à l’aide de ces indicateurs statistiques et mathématiques que la France est comparée à l’Allemagne, aux États-Unis, à d’autres pays, notamment dans des domaines où on n’est pas forcément comparable.

Pourquoi les mathématiques statistiques, financières, ont-elles tant de poids dans le domaine politique ? Pourquoi les considérations liées aux particularités des pays, notamment aux traditions et à l’âme de la France, ne font-elles pas le poids face aux chiffres avancés par les experts ?

Jean-Michel Quatrepoint
Pour les journalistes, il est facile de s’appuyer sur des statistiques, des classements (les chiffres, eux, ne trompent pas… sauf qu’on sait très bien manipuler les chiffres !). Les classements gomment les différences dans une homogénéisation, une globalisation qui uniformise. J’ai toujours été pour la mondialisation mais je suis contre la globalisation dont l’idéologie est l’uniformisation alors que la richesse c’est de se nourrir de ses différences.
Il y a un langage des chiffres mais il y a des langues.

Thierry de Montbrial
Je reviens au rapprochement fait entre la « chute de l’empire américain » et la fin de l’Union Soviétique. Permettez-moi de remarquer que la chute de l’Union Soviétique est en même temps la chute de l’empire russe. C’est le dernier empire du XXème siècle qui s’effondre d’un seul coup. Mais nous avons à peine commencé à subir les conséquences de la chute de l’empire russe qui vont se faire sentir encore pendant plusieurs décennies. Nous en sommes au tout début.

Les chiffres, les statistiques, doivent être utilisés avec énormément de précautions.
Je rappellerai cependant que le PIB de la Russie est inférieur à celui de l’Italie ! Cette seule observation donne la mesure du « danger russe ». Je suis entièrement d’accord avec Jean-Pierre Chevènement et Jean-Michel Quatrepoint à propos de la « menace » que représenterait la Russie. Tout cela est bien excessif. Je raconte dans mon « Journal de Russie » qu’en 1990, avant la chute de l’Union Soviétique, faisant partie du comité éditorial du Figaro, j’avais eu accès, avec Hélène Carrère d’Encausse, F. O. Giesbert, Philippe Villin et quelques autres, à la base de Cronstadt, réputée la plus grande base navale du monde. Ce n’étaient que ruines ! Je me souviens, devant ce spectacle pathétique, avoir pensé : C’est donc ça l’Union Soviétique !

Il faut en effet relativiser les classements. Cette année l’IFRI, l’institut que je préside, est classé 3ème mondial par l’université de Pennsylvanie, sur 6 850 institutions répertoriées, devant bien des institutions américaines en réalité beaucoup plus puissantes que nous. C’est un instrument de communication qui, le cas échéant, peut être utile mais on voit bien qu’il y a quelque chose qui cloche. Donc vous avez tout à fait raison, il faut se méfier, non pas des mathématiques mais des chiffres.

Jean-Pierre Chevènement
Je remercie chaleureusement nos intervenants et le public venu très nombreux ce soir.

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[1] « L’impérialisme est le capitalisme arrivé à un stade de développement où s’est affirmée la domination des monopoles et du capital financier, où l’exportation des capitaux a acquis une importance de premier plan, où le partage du monde a commencé entre les trusts internationaux et où s’est achevé le partage de tout le territoire du globe entre les plus grands pays capitalistes. » dans L’Impérialisme, stade suprême du capitalisme. Essai de vulgarisation (Lénine, 1917), éd. de Pékin.
[2] The economic consequences of the peace, John Maynard Keynes,1919.
[3] Le président Trump s’était félicité sur Twitter d’avoir reçu un appel de la présidente taïwanaise Tsai Ing-wen, allant à l’encontre de quarante ans de rupture diplomatique.
[4] Capital Rules – The Construction of Global Finance (OISC,) Rawi Abdelal, 25 septembre 2009.
[5] Jacques Delors, président de la Commission européenne de 1985 à 1995.
[6] Michel Camdessus, directeur du FMI de 1987 à 2000.
[7] Henri Chavranski, présida, de 1982 à 1994, le Comité des mouvements de capitaux et de transactions invisibles (CMIT).
[8] Les « Chicago Boys » sont un groupe d’étudiants chiliens, pour la plupart issus de l’Université catholique du Chili, qui aidèrent à réformer l’économie chilienne dans la ligne intellectuelle de l’Université de Chicago avec laquelle leur établissement avait noué des accords d’échange depuis 1956. Ils avaient donc eu l’occasion de suivre l’enseignement de Friedman et d’Arnold Harberger.
[9] L’Empire éclaté, Hélène Carrère d’Encausse, éd. Flammarion, 1978.
[10] La Gloire des nations ou la fin de l’Empire soviétique, Hélène Carrère d’Encausse, éd. Fayard, décembre 1991.
[11] Citation de Lénine, dans son discours au 8ème congrès des Soviets en 1919.

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Le cahier imprimé du colloque « Vers la fin de la globalisation, mythe ou réalité? quelle stratégie pour la France? » est disponible à la vente dans la boutique en ligne de la Fondation.

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