Dans quelles conditions pouvons-nous augmenter les impôts pour résorber les déficits et diminuer l’endettement ?

Intervention prononcée lors du colloque du 24 avril 2006 Finances publiques et pérennité de l’Etat

La situation financière de notre pays vient de nous être rappelée… Notre endettement s’accroît nos déficits sont toujours importants et atteignent les seuils maxima prévus par le traité de Maastricht. Nous n’avons plus de moyens d’intervention à partir de la monnaie. Et aucune solution découlant d’une situation inflationniste ne paraît envisageable à court et moyen terme…
Aussi il faut s’interroger sur la possibilité de faire le choix de l’augmentation des impôts pour régler ou tenter de régler les problèmes d’endettement du pays.
Cette interrogation n’est pas de nature politique. Il ne s’agit pas de savoir si l’augmentation des impôts serait politiquement supportable, socialement équitable ou même si une telle augmentation ne serait pas défavorable à la croissance économique.
Il s’agit davantage de tirer les conséquences de ce que l’on peut appeler la « victoire de l’ultra libéralisme » au plan mondial et européen, et de mettre en évidence les contraintes juridiques et économiques qui y sont liées pour ne pas laisser naître trop d’illusions dans la possibilité de recourir à l’outil fiscal pour redresser les finances publiques, et notamment si cette perspective se limitait à la formule démagogique – explicite ou implicite – « d’augmenter les impôts des riches et des entreprises ».

En premier lieu il faut s’interroger sur la réglementation européenne qui encadre toutes décisions de nature fiscale des Etats de l’Union.
En clair il s’agit d’apprécier le degré d’autonomie fiscale des Etats. En apparence, les Etats ont gardé leur souveraineté fiscale puisque les décisions communautaires doivent être prises à l’unanimité mais en réalité ce n’est pas le cas.
La souveraineté n’existe pas pour la Taxe sur la Valeur Ajoutée. Celle-ci a fait l’objet d’une harmonisation qui en a fait un impôt « d’assiette européenne » et quasi de « taux européen ». Seule la détermination du niveau des taux – normal et réduit – demeure de l’initiative des Etats.
Chacun a pu constater la totale absence d’autonomie décisionnelle lors des discussions de Bruxelles concernant l’application du taux réduit aux travaux sur les immeubles d’habitation et l’interdiction de pouvoir l’appliquer aux restaurateurs.
Mais même pour les autres impôts les Etats ont perdu leur souveraineté fiscale. Celle-ci a perdu progressivement tout contenu réel à la suite des décisions jurisprudentielles qui ont créées petit à petit une « harmonisation fiscale par le bas ».
Ainsi on peut dire que les directives européennes et les décisions de la CJCE se sont montrées dans la période récente destructrices des fiscalités nationales.

En second lieu il faudra s’interroger sur la question de l’autonomie fiscale des Etats dans un environnement de concurrence fiscale européenne, voire mondiale, en tenant compte de la quasi impossibilité qu’ils ont de mettre en place – ou même de maintenir – des mécanismes visant à empêcher ou à limiter les possibilités d’évasion fiscale internationale. Ceci est d’autant plus vrai que la concurrence fiscale s’est accrue avec l’entrée dans l’Union de nouveaux pays qui utilisent cette arme pour attirer sur leur territoire capitaux et emplois.
Cette réalité risque de contraindre les pays à devoir faire des choix difficiles mais imposés par l’extérieur.
Pour s’en convaincre il suffit d’observer sur quels principes repose la réforme fiscale allemande : augmentation forte de la TVA et diminution significative de l’impôt sur les sociétés. Déjà les choix fiscaux de notre pays tiennent compte des mêmes contraintes.
Ainsi la concurrence fiscale entre pays de l’Union accompagnée d’une jurisprudence de la Cour de Justice de la Communauté Européenne très « libérale » mettent en cause la « souveraineté fiscale » et de ce fait limitent les marges de manœuvre.

Commençons par tenter de montrer en quoi les règles fiscales internationales – quelquefois anciennes – sont devenues de plus en plus contraignantes pour les Etats et ce parce que les jurisprudences nationales et communautaires leur donnent aujourd’hui une force qu’elles n’avaient pas par le passé.
Les règles de droit international ne sont pas nouvelles en fiscalité. Elles sont nécessaires pour déterminer le pays qui peut asseoir et recouvrer l’impôt lorsqu’un contribuable domicilié dans un pays perçoit des revenus qui trouvent leur source dans un autre. C’est le rôle des conventions fiscales.
Ces conventions bilatérales existent depuis longtemps. Elles correspondaient à une organisation réciproque des réglementations entre deux Etats. Elles visaient à éviter qu’un même revenu puisse supporter deux fois l’impôt mais aussi à éviter qu’un revenu puisse échapper à l’impôt dans l’un et l’autre Etat par application de règles de territorialité.
L’interprétation des conventions par les tribunaux est restée longtemps assez classique. Il convenait de déterminer le pays dans lequel le revenu devait être taxé. Et de fait, dans beaucoup de cas, la jurisprudence administrative reconnaissait au pays qui le premier avait découvert l’existence du revenu non imposé le droit de l’imposer dès lors qu’il ne l’avait pas été dans l’autre pays.
Cette conception bénéficiait au pays qui disposait de l’administration fiscale la plus efficace et les conventions n’étaient en réalité guère contraignantes, d’autant plus, qu’elles étaient accompagnées de mesures visant à protéger les assiettes nationales.

Parallèlement le droit communautaire, s’est développé, s’est appliqué et s’est, de plus en plus, imposé aux administrations nationales.

Les principes des traités de Rome et de Maastricht doivent être respectés par les lois nationales : principe de liberté d’établissement, (art 43 et 48 du traité de l’Union européenne), principe de liberté de circulation des personnes (art 39), principe de liberté de circulation des capitaux (art 56), et principe de liberté des prestations de services (art 49).
Ces quatre libertés sont énoncées en des termes suffisamment larges pour conduire à une assez grande latitude d’interprétation. Elles peuvent en particulier devenir le fondement juridique utilisé pour restreindre les possibilités des pays de mettre en place ou de maintenir des dispositifs « anti-abus » et « protecteurs de l’assiette fiscale nationale » parce qu’ils deviennent très rapidement des dispositifs « discriminatoires et attentatoires » à au moins une des quatre libertés. A ce titre, ils sont considérés comme illégaux et doivent être démantelés.
La loi fiscale est aussi encadrée par d’autres textes. Elle doit respecter la convention des droits de l’homme. Celle-ci ne pose de difficultés qu’en matière de procédure et de pénalités. Elle doit correspondre aux directives communautaires qui constituent le cadre incontournable du droit.

Les règles internationales ont fait irruption dans la fiscalité. Elles ont produit une véritable révolution juridique qui s’est traduite par des décisions fortes des tribunaux dont on ne peut ignorer les conséquences pratiques.
D’abord le Conseil d’Etat a fait évoluer sa jurisprudence dans un sens qui donne une importance primordiale à la règle internationale.
La jurisprudence du Conseil s’est convertie au droit communautaire et au droit international à partir des années 1992, puis le Conseil a fait prévaloir sans réserve les traités sur les lois internes, y compris les lois postérieures. Puis il a affirmé sa pleine compétence pour interpréter les conventions internationales. Enfin il s’est estimé lié par la jurisprudence de la Cour de justice des communautés européennes et a déclaré recevable les moyens tirés de la non-conformité des textes français. Ainsi le Conseil d’Etat peut écarter un texte français comme incompatible avec une directive et peut saisir la Cour de Justice d’une question préjudicielle en interprétation.
Il s’est agi d’une évolution dont on n’a pris réellement la mesure que dans la période récente.

Ensuite le rôle de la Cour de Justice des Communautés Européennes est incontournable. Elle détient de fait un « quasi pouvoir législatif ».
Elle a pour mission – selon le traité – d’interpréter le droit communautaire et de s’assurer de son application uniforme dans l’ensemble de la communauté. Disons qu’elle ne s’en prive pas et qu’elle s’applique à censurer toute loi nationale qui ne serait pas compatible avec la norme.
Elle peut naturellement censurer des dispositions qui entrent dans le domaine de compétence de la Communauté – la fiscalité indirecte –. Mais elle peut aussi censurer – indirectement – des dispositions, qui n’apparaissent pas d’évidence, de sa compétence, comme les impôts directs.
Ainsi les décisions de la CJCE créent une véritable « législation européenne » qui s’impose aux législateurs nationaux, et sur laquelle les Etats et l’Union n’ont aucune possibilité de recours.
La CJCE a commencé à intervenir timidement – en 1986 dans un arrêt « Commission contre France » – qui a été l’amorce d’un profond mouvement de fond qui n’a pas l’air de devoir s’interrompre, puisque l’invocation par les « plaideurs » du non respect par une loi, d’une des quatre libertés, est chose facile en raison de l’imprécision même de ces notions.

Premier exemple : La législation française n’autorisait pas les entreprises à récupérer la TVA afférente aux frais de restauration, et ce, pour des raisons d’équité et des raisons budgétaires.
La CJCE a considéré en 2000 – dans le cadre d’une instance (arrêt du 19 septembre 2000) – que cette interdiction n’était pas conforme à la réglementation communautaire et en a interdit le maintien.
Tenant compte de l’incidence budgétaire de cette décision, l’administration fiscale française l’a appliquée en tentant par voie d’instruction d’en limiter la portée. Elle n’a autorisé la récupération de TVA que sur les seules dépenses concernant les clients et les fournisseurs de l’entreprise et a continué à l’exclure pour les dépenses engagées en faveur du personnel et des dirigeants.
En 2002, le Conseil d’Etat a été amené à sanctionner cette doctrine administrative « restrictive » sur le fondement de l’abus de pouvoir (arrêt du 27 mai 2002)
Cette jurisprudence s’est révélée très favorable aux entreprises et très coûteuse pour l’Etat. Non seulement la récupération est devenue générale mais il a fallu aussi « rembourser » les entreprises.

Un autre exemple tout aussi significatif illustre les conséquences réelles des décisions de la CJCE. Il concerne l’imposition des plus-values.
En France les plus values réalisées à l’occasion de la vente de titres par les contribuables sont imposables alors qu’une telle imposition n’existe pas dans tous les pays de l’Union.
Afin d’éviter que les contribuables ne quittent la France pour échapper à l’impôt et se domicilient- le temps de céder leurs titres – dans un pays qui exonère ces plus values, le législateur français avait retenu un dispositif qui prévoyait la possibilité d’imposer les plus-values susceptibles d’être réalisées. Ce dispositif avait, il est vrai, l’inconvénient d’apparaître comme une imposition des profits non encore réalisés.
Cette mesure a été contestée par un contribuable devant les tribunaux français et le Conseil d’Etat a décidé de surseoir à statuer. Il a posé une question préjudicielle à la CJCE afin de savoir si « une telle mesure qui permettait une imposition « au moment où un contribuable quittait le pays pour se rendre dans un autre pays de l’Union était ou non contraire au principe de liberté d’établissement posé par le traité ».
Répondant à cette question, la CJCE, en date du 11 mars 2004, a considéré que la règle nationale n’était pas conforme au traité dès lors qu’elle portait atteinte à la liberté d’établissement.
Les conséquences sont simples à imaginer : il est possible de réaliser à l’étranger des plus-values substantielles en exonération d’impôt à condition d’y être domicilié au titre de l’année de réalisation de celles-ci.
Devant de telles opportunités pouvant inciter à des « expatriations » le législateur national a été conduit à prévoir l’exonération en France des dites plus-values réalisées par les contribuables. Et la loi de finances pour 2006 les a exonérées sous condition de durée de détention.

Prenons encore l’exemple de la suppression de l’avoir fiscal à partir de 2005 Elle s’est traduite par l’octroi d’importants avantages aux grands groupes internationaux à la suite de la suppression du précompte mobilier.
Chacun connaît le mécanisme de l’avoir fiscal. Il consistait à redonner au contribuable qui percevait des dividendes d’une société française le montant de l’impôt sur les bénéfices que celle-ci avait supporté avant de distribuer les dividendes.
Il était toutefois prévu que si la société procédant à la distribution de dividendes n’avait pas préalablement payé d’impôt sur les bénéfices distribués elle devait supporter une contribution de substitution appelée « précompte mobilier » dont l’objet était de compenser l’avoir fiscal. Dans les faits, le précompte mobilier était payé par les « groupes internationaux qui percevaient des revenus exonérés d’impôt en France »
La réglementation européenne allait conduire la France à devoir rembourser les avoirs fiscaux aux résidents d’un pays européen qui percevaient des dividendes de sociétés françaises et ce, en fonction du principe de non discrimination.
Pour éviter une telle conséquence dont l’impact financier aurait été lourd il a fallu modifier le régime fiscal des dividendes. La loi a supprimé l’avoir fiscal et son corollaire le précompte mobilier. Cette réforme a principalement bénéficié aux grands groupes internationaux au détriment des ressources publiques.

On peut poursuivre et donner d’autres exemples de « démantèlement » des règles fiscales protectrices.
La France avait instauré des règles permettant d’imposer les résultats des participations détenues par des sociétés françaises dans des sociétés implantées dans des pays dits à « fiscalité dite privilégiée » sans y avoir de véritable activité économique.
La jurisprudence a considéré que de telles dispositions ne pouvaient s’appliquer lorsque les sociétés étrangères étaient implantées dans un pays avec lequel existait une convention fiscale. Il en a résulté que les impôts payés ou rappelés à ce titre ont été restitués aux entreprises.

On peut dire que les contraintes réglementaires et jurisprudentielles empêchent les Etats de mettre en place des législations plus protectrices de leurs intérêts et susceptibles de leur permettre de mener des politiques fiscales « indépendantes ».

Dès lors notre pays – comme les autres – se trouve pour le moins démuni face à la concurrence fiscale. Il nous faut en prendre la mesure.
Cela ne nous permet pas de trop espérer d’une « éventuelle » augmentation des impôts sur les entreprises, les hauts revenus et le patrimoine.

C’est l’objet de la seconde partie de l’exposé.

Sur quels revenus joue principalement la concurrence fiscale et au profit de qui ?
Il est facile de comprendre que la concurrence fiscale ne peut bénéficier qu’aux assiettes « délocalisables » : les bénéfices des entreprises, les produits financiers, les hauts revenus et les contribuables eux-mêmes. La délocalisation n’étant réellement utile que si l’avantage fiscal est substantiel.
Personne aujourd’hui n’ignore cette réalité.
Les questions fiscales sont désormais posées en terme de « concurrence » de « fiscalité comparée » et non plus comme par le passé en terme d’équité, de justice sociale ou de redistribution – On peut certes le regretter mais c’est devenu ainsi – et ce, même si les études concernant les délocalisations débouchent sur des résultats pour le moins contrastés et souvent sujets à critiques.
Il en est pour preuve l’observation de l’évolution des fiscalités depuis plus d’une décennie et plus particulièrement au cours de ces dernières années dans l’ensemble des pays.

Envisageons rapidement les questions liées à la fiscalité des entreprises.

Si l’on analyse les conditions d’imposition des bénéfices des entreprises on constate une diminution générale du taux de l’impôt sur les sociétés qui se situe en France à 33,33%, taux qui est comparable à ceux généralement constatés au sein de l’Union européenne.
Mais des pays de l’Union pratiquent des taux très faibles et même le taux zéro.
Et ceux qui avaient des taux proches du nôtre continuent à les baisser. Aussi il serait peu réaliste de pronostiquer une augmentation du taux de l’impôt sur les sociétés dans les circonstances actuelles.

Si l’on regarde le régime d’imposition des plus values de cession de participations détenues par les sociétés on constate une même évolution vers la diminution de l’impôt. Ces plus-values vont être purement et simplement exonérées à partir de 2007 et elles bénéficient déjà d’un taux de 8% alors qu’elles supportaient jusqu’à présent celui de 19%.
Pourquoi cette évolution ? Tout simplement parce certains pays européens – Belgique, Pays-Bas, Luxembourg…- ont des régimes d’exonération qui attirent les sociétés « holdings » sur leur territoire. Aussi, pour garder des sociétés holdings en France il a été décidé de faire comme les autres. Peut-on proposer de revenir sur cette mesure ?

Si l’on observe l’évolution de la Taxe professionnelle on constate une diminution encore plus marquée avec pour corollaire un transfert massif de charges sur le budget de l’Etat… La taxe professionnelle qui était calculée en tenant compte de la masse salariale et de l’importance des investissements est devenue progressivement une taxe sur la valeur ajoutée de l’entreprise. La part relative aux salaires a été supprimée sur cinq ans, les nouveaux investissements ont été exonérés, le plafonnement de la cotisation en fonction de la valeur ajoutée a été aménagé… Tout cela a débouché sur une taxe « sur la valeur ajoutée » que d’ailleurs certains commencent déjà à contester dans son principe au motif « que la France aurait créée une nouvelle taxe sur la valeur ajoutée » ce qui, naturellement, est interdit par les directives européennes.

Ces quelques exemples et rappels montrent qu’il ne serait pas responsable ni raisonnable – dans les circonstances et l’environnement actuel – de laisser croire que l’on peut attendre beaucoup « d’un accroissement des impositions sur les entreprises ». Sans doute des améliorations ponctuelles sont envisageables et susceptibles d’accroître les ressources de l’Etat, mais dont l’incidence budgétaire réelle ne saurait être à la hauteur des enjeux.

Analysons maintenant les impôts supportés par des particuliers susceptibles de se « délocaliser »…
Ces personnes peuvent être des dirigeants des entreprises, des salariés les mieux rémunérés et des détenteurs de capitaux mobiliers. Pour ces contribuables il faut tenir compte globalement de la fiscalité des revenus et de la fiscalité du patrimoine.
L’impôt sur le revenu en France est tout à fait comparable et même moins élevé que dans bon nombre de pays voisins. Aussi, on peut dire sans trop se tromper, que la « délocalisation » uniquement motivée par un impôt sur le revenu excessif ne constitue pas un vrai risque. De ce point de vue il peut exister certaines marges de manœuvre.
Aussi les risques de « délocalisation » ne peuvent provenir que du cumul des impositions – impôt sur le revenu au taux marginal, impôt sur les plus-values mobilières, et impôt sur le patrimoine – Ce risque ne concerne sans doute que peu de personnes mais il est réel.
Peut-on en faire abstraction au motif qu’il ne touche encore que peu de personnes ? Doit-on au contraire en tenir compte ? Il s’agit d’un débat sérieux et sans doute politiquement sensible, mais ce que nous devons savoir si il était décidé d’en faire abstraction, c’est que techniquement, aujourd’hui, il ne sera pas possible ou du moins très difficile – d’instaurer des règles susceptibles d’éviter la « déperdition » de la matière fiscale pour notre pays. Parce qu’elles seraient condamnées par la CJCE.
Tant que cette « forme de surveillance pointilleuse » de la CJCE existera – et on ne voit pas comment ce contrôle pourrait disparaître puisqu’il illustre une forme d’harmonisation par le bas – la logique de la concurrence fiscale s’imposera aux Etats même malgré eux.
Peut-être serait-il utile que les Etats se montrent davantage « pugnaces » et « exigeants » pour faire valoir les impératifs de protection de leurs intérêts. Ce qui n’est pas le cas.
Il suffit simplement d’observer ce qui s’est passé et ce qui se passe pour en être convaincu. Quelques rappels : Exonération des plus-values mobilières à terme, exonération des plus values mobilières et professionnelles réalisées au moment du départ à la retraite des dirigeants, instauration de régimes de « stock options », aménagement du régime des donations…. Et c’est la même chose partout.

Bien sûr, la question de l’impôt de solidarité sur la fortune reste posée. Elle est débattue et la France semble résister.
Le mouvement de baisse des impôts – ou du moins de certains impôts – ne semble pas devoir être remis en cause. Et il peu probable que l’on assiste à un « véritable changement de cap » du moins tant que n’existera pas une véritable « harmonisation fiscale ».

Longtemps j’ai pensé que la règle de l’unanimité était garante de notre « souveraineté fiscale et donc de notre indépendance ». Je crois que cette position était fondée tant que l’Union était à neuf, à douze ou à quinze et surtout tant que cette « souveraineté » n’était pas mise à mal par la Cour de Justice des Communautés Européennes.
Mais aujourd’hui dans ce nouvel environnement « l’harmonisation fiscale » est sans doute nécessaire aux équilibres budgétaires des principaux pays européens.

Alors quelle est notre marge « fiscale » dans la situation telle qu’elle est ?
Il semble que les solutions fiscales aux problèmes budgétaires ne résident pas – si l’on recherche des recettes nouvelles substantielles – dans l’imposition des « riches » ou « des produits financiers » ou encore des « grands groupes multinationaux ». Non pas parce que cela ne serait pas bien, au contraire, mais tout simplement parce que ce n’est – semble-t-il – plus possible sauf à modifier les règles.

Alors il faut explorer d’autres pistes :

• Celle de l’augmentation de taux de la TVA : Le choix du taux demeure de notre responsabilité : la TVA frappe autant les produits importés que les produits nationaux. Son taux n’a pratiquement pas d’incidence sur la « délocalisation » de la consommation. L’augmentation d’un point de TVA produit des recettes budgétaires significatives et l’expérience d’une augmentation forte – de deux points – a déjà été faite dans le passé avec de réels résultats budgétaires, mais il vrai avec des conséquences politiques différentes.

• Celle de l’augmentation de l’impôt sur le revenu : une augmentation de l’impôt par une redéfinition des tranches et une limitation forte des diverses réductions et crédits d’impôt, tout cela sans accroître le taux marginal d‘imposition.

• Celle du renforcement de la « lutte contre la fraude » au sens large – fiscale et sociale – et en ciblant mieux la « vraie fraude » et en mettant en œuvre de nouveaux moyens dont l’existence même serait plus dissuasive.

• Celle – peut-être risquée – du renforcement de l’imposition sur « la propriété immobilière » qui il faut bien le dire n’est pas susceptible de se délocaliser.

Mais je ne suis pas sûr que cet ensemble de propositions soit très populaire… Je m’en excuse.

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