Intervention de Bruno Amable
Intervention prononcée lors de la table-ronde du 28 novembre 2005 Mondialisation régulée des échanges et préférence européenne
En effet, mon sujet de recherche porte sur la différenciation des pays développés et des types de capitalismes. J’ai publié plusieurs articles et, récemment, un ouvrage tendant à montrer que ce qu’on a l’habitude de considérer comme le modèle du capitalisme est en fait quelque chose de très différencié.
Lorsqu’on se limite aux pays développés de l’OCDE, on peut distinguer au moins cinq grands types de capitalismes. Je ne vais pas rentrer dans les détails mais ce que nous connaissons en France et en Europe comme notre modèle de société développée repose sur une articulation de certaines formes d’institutions pas forcément très précises mais qui remplissent certaines fonctions. Le modèle que nous connaissons en France et plus généralement en Europe continentale, c’est, en tant qu’idéal type :
· un certain type de protection sociale,
· un certain type de protection de l’emploi,
· un certain type de relations financières entre les entreprises et les banques plutôt que les marchés financiers,
· une concurrence relativement modérée – mais pas la concurrence sauvage – sur les marchés de produits
· et, d’une manière générale, un certain type d’interventions publiques dans les domaines tels que l’éducation.
Ceci a des conséquences sur les formes de relations entre les agents, c’est-à-dire sur des choses aussi importantes que les inégalités de revenus, le modèle sociétal au sens large : des choses que la théorie économique n’appréhende que par certains côtés et analyse avec difficulté.
Ce qui est important dans la définition des types de capitalismes, c’est non seulement les formes plus ou moins précises que peuvent prendre les institutions [il y a plusieurs façons d’assurer la sécurité de l’emploi : ce qui importe n’est pas seulement la forme précise mais la grande fonction qu’elle remplit] mais surtout les articulations entre ces formes institutionnelles et la complémentarité entre diverses formes institutionnelles.
Le problème de l’Europe n’est pas seulement exogène, mais aussi endogène : le big bang libéral a affecté nos sociétés et nos économies d’une façon telle que notre modèle a perdu en cohérence (cohérence qui était peut-être déjà mise en danger pour des raisons endogènes). En tout cas, il est certain que le big bang libéral n’a pas conduit à la définition d’un nouveau modèle cohérent et performant. C’est pourquoi nous sommes dans un modèle un peu hybride, en état de décomposition, très libéralisé dans certains domaines : les relations financières … et peu libéralisé dans d’autres comme la protection sociale qui restera probablement le dernier domaine de résistance.
Du point de vue du commerce international, de la compétitivité, peut-on avoir des relations très claires entre les différents modèles de capitalismes et la spécialisation internationale, la capacité à s’insérer dans les nouvelles révolutions technologiques ?
La réponse est relativement ambiguë. Elle est particulièrement ambiguë dans le cadre du modèle continental européen, un peu ce que Michel Albert avait appelé le « modèle rhénan » (penser à France-Allemagne pour se fixer les idées). Une fois qu’on a dit c’est France-Allemagne, on comprend bien qu’il ne peut pas y avoir de lien très net très fort entre un modèle de capitalisme qui serait celui de la France et de l’Allemagne et un type de spécialisation internationale, quand on pense aux différences entre la France et l’Allemagne. Quand on fait des études un peu plus poussées, cette impression est confirmée : aucun type particulier de spécialisation internationale n’est associé au modèle continental européen de capitalisme. Finalement, c’est peut-être ce qui le distingue en négatif des autres types de capitalisme : le capitalisme néo-libéral des anglo-saxons ou le capitalisme asiatique (Japon, Corée) qui, eux, sont caractérisés par des types de spécialisations internationales plus marquées.
Ca renforce le problème que pose le big bang libéral :
Faut-il, pour être performant, que le modèle du capitalisme européen se transforme en un modèle néolibéral (en prêtant au modèle néolibéral en général toutes les vertus économiques du monde) ?
Pour illustrer cela, on évoque généralement la nouvelle révolution technologique autour des technologies de l’information et de la communication dans laquelle le modèle anglo-saxon s’insère bien – ce qui est partiellement vrai – et il faudrait donc que, pour bien s’insérer dans la révolution technologique et être compétitifs sur les marchés internationaux, la France, l’Allemagne et l’Europe en général se convertissent au modèle économique néolibéral. Cela en oubliant qu’il y a d’autres modèles de capitalisme (tel le modèle social-démocrate du Nord qui, lui aussi, est plutôt bien inséré dans la nouvelle révolution technologique des TIC) et que ce n’est peut-être pas la seule solution. D’autant que les pays qui se rapprochent le plus du modèle idéal typique anglo-saxon ne sont pas des modèles de compétitivité extérieure. Ni la Grande Bretagne, ni les Etats-Unis ne se caractérisent par des excédents extérieurs ou par la compétitivité extraordinaire de leur territoire. Leurs firmes sont très compétitives au sens où leurs actionnaires touchent de très gros dividendes, mais les territoires anglo-saxons ne sont pas véritablement des pôles de compétitivité extérieure fantastiques. L’adéquation simple qui est parfois faite entre compétitivité et modèle néolibéral est – au moins – à moitié fausse. Ce ne serait donc pas une solution pour retrouver la compétitivité extérieure en se convertissant au modèle néolibéral, ce qui signifierait abandonner la protection sociale redistributrice, abandonner la protection de l’emploi, abandonner le secteur public de l’éducation …
Je m’attachais jusqu’ici à la concurrence entre pays développés, entre pays de l’OCDE.
Si on regarde la concurrence vis-à-vis de la Chine et des autres pays, de toute façon le big bang libéral, la conversion radicale de nos sociétés au modèle néolibéral, ne sont pas une solution non plus. Pourquoi la Chine est-elle compétitive ? C’est, nous dit-on, grâce à des coûts de main d’œuvre très faibles. Ce n’est pas parce qu’on se convertira au modèle néolibéral anglo-saxon qu’on réussira à être compétitif avec les coûts de main d’œuvre de la Chine. De toute façon, c’est sans espoir. La solution n’est pas là non plus. La pression compétitive de la Chine ou de l’Inde ne saurait être un argument très fort pour la conversion au modèle néolibéral.
Plus généralement et pour quitter la comparaison des modèles de capitalismes, qu’est-ce que les économistes sont capables de dire, en théorie et sur le plan pratique, sur le lien entre compétitivité extérieure, commerce extérieur, croissance, développement ?
Beaucoup d’études appliquées ont été faites ces dernières années qui tendaient à trouver le lien possible entre commerce extérieur (au sens libéralisation, insertion dans les flux de commerce international) et croissance (au sens de croissance du niveau de vie, croissance du bien-être). La moitié ou les trois quarts des économistes qui se livraient à ces études avaient une idée derrière la tête : prouver que le libre-échange était une garantie absolue de croissance et que plus on était inséré dans les échanges internationaux, mieux c’était.
Or, la moitié des tests pratiqués montraient que ça ne marchait pas : on n’arrivait pas à montrer de façon sérieuse, robuste que la libéralisation des échanges est une garantie de croissance. C’est plus compliqué que ça.
S’il y a un résultat sur lequel la majorité des économistes seraient prêts à s’entendre, c’est de dire que ce n’est pas tellement le fait d’être inséré dans les échanges mondiaux, d’être libéralisé qui est cause de croissance et de bien-être, c’est la qualité de la spécialisation qui compte :
Si votre spécialisation vous permet de bien vous insérer dans les échanges mondiaux, de tirer parti de la libéralisation des échanges, vous avez de la croissance.
Si vous avez une mauvaise spécialisation, vous perdez au libre-échange.
C’est un bémol relativement sérieux sur un dogme souvent prêté à tort aux économistes : celui du libre-échange. Les économistes ne disent pas : « le libre-échange, c’est bien. » mais « le libre-échange, c’est bien dans certaines conditions », ce que confirment les études empiriques. Il faut donc plus de prudence sur ce sujet.
Ceci m’amène à faire une parenthèse sur les deux économistes suédois Heckscher et Ohlin, fameux théorème de l’économie internationale, connu sous le nom de Heckscher-Ohlin-Samuelson. C’est Samuelson qui l’a mis en musique de la façon la plus précise. Contrairement à ce que j’ai entendu tout à l’heure, le théorème d’Heckscher-Ohlin-Samuelson s’intéresse à la répartition, il ne dit pas du tout que le libre-échange est harmonieux et profite à tout le monde. Un des résultats du théorème d’Heckscher-Ohlin-Samuelson, c’est qu’il y a des facteurs qui perdent à l’échange international. Globalement, certes, tout va bien pour l’économie mondiale considérée comme un tout lorsqu’on s’ouvre à l’échange international mais si vous êtes le facteur rare dans le pays qui s’ouvre, vous perdez à l’échange, l’échange international est une très mauvaise affaire. Donc, dans et avec Heckscher, Ohlin et Samuelson, il y a du conflit à la base, ce n’est pas du tout l’histoire paisible et harmonieuse qu’on pourrait croire.
Heckscher-Ohlin-Samuelson dit : vous avez un gain de commerce international lorsque vous tirez profit de vos avantages comparatifs. Toutes les histoires que j’entends sur la Chine et l’Inde sont des histoires d’avantages absolus et non d’avantages comparatifs. Dans ce cas, il faut être très prudent sur les avantages qu’il y aurait à la libéralisation.
Autre chose, sur Heckscher-Ohlin-Samuelson et sur les bienfaits de l’ouverture au commerce international : il y a quantité d’hypothèses nécessaires : même niveau technique d’un pays à l’autre et concurrence parfaite. Lorsqu’on est en concurrence imparfaite, il faut invoquer d’autres résultats.
Ceci étant dit, que diraient les économistes sur l’ouverture au commerce international et aux échanges ?
Comme je le disais, si c’est la bonne spécialisation qui compte pour profiter des bienfaits de l’ouverture au commerce international, qui ne sont pas niables (il ne s’agit pas de dire que l’autarcie est forcément désirable), dans le long terme, les résultats sont relativement clairs : on s’en tire bien lorsqu’on s’insère bien dans l’échange international. Si on veut bien s’en tirer en termes de croissance du PIB, il faut bien s’insérer dans les échanges internationaux.
Ceci revient à se poser la question de la place, dans la division internationale du travail.
L’un des problèmes posés par les nouveaux pays émergents (Chine, Inde et autres), c’est qu’on a du mal à voir le long terme :
Dans un très long terme quelles seraient les répartitions des activités, la division internationale du travail entre ces pays énormes (dont le niveau de technologie, à terme, rejoindra le niveau européen) et le bloc des anciens pays industrialisés ?
Si ces pays, qui ont une fraction non négligeable de l’activité industrielle localisée sur leur territoire, atteignent un niveau de vie à peu près égal à celui des pays européens les moins avancés, on a du mal à voir la « soutenabilité » ne serait-ce qu’écologique, de toute cette histoire.
Si ces pays deviennent les ateliers du monde pour une large partie de la production industrielle, il va falloir des flux de transport absolument délirants entre l’Europe, l’Asie, l’Amérique du Nord. Dans quel horizon est-ce réalisable, avec des coûts de l’énergie qui ne vont probablement pas rester ce qu’ils sont en ce moment et sont plutôt appelés à monter ? Cette histoire est-elle écologiquement soutenable avec un milliard de Chinois et un milliard d’Indiens qui se mettent à consommer la même quantité d’énergie que les Européens ?
Voilà pourquoi j’ai un peu de mal à envisager un long terme de ce point de vue-là.
Mais même les court et moyen termes sont difficiles à envisager.
Je trouve qu’une partie des histoires qu’on lit sont difficiles à admettre. J’admets que la mondialisation accompagnée de la révolution technologique amène des changements dans les chaînes de valeur des entreprises : des relocalisations, des délocalisations, avec tout ce qu’on a dit sur les problèmes énergétiques et les problèmes de transports.
Ceci étant dit, je pense qu’il y a un mythe de la chaîne de valeur mondialisée qui, sur une large partie des activités industrielles, relève d’une histoire peu crédible plutôt que de la transformation réalisable.
On connaît des exemples où c’est fait : dans les activités produisant ce qui se transporte bien, ce qui s’échange à distance sans problème, ce qui ne nécessite pas de face to face crucial. Dans d’autres activités, on doit être plutôt dans une chaîne de valeurs déplacée, mais déplacée pas trop loin.
J’a lu quelque part que, dans le domaine industriel, pour avoir des approvisionnements à peu près fiables, il faut vingt-quatre heures de transport en camion, au-delà de ce délai les problèmes commencent (pour une chaîne de valeurs de l’input utilisée dans le processus industriel, pas pour de l’échange ricardien). Si c’est vrai, il est clair qu’une partie des histoires qu’on raconte sur la chaîne des valeurs mondialisée ne tient pas debout.
Dans un article que j’avais écrit avec Philippe Askenazy, il y avait un exemple qui n’est plus tout à fait vrai, c’était l’histoire de Zara, la chaîne galicienne de vêtements. Ce n’est pourtant pas du high tech… Jusqu’à une période récente, toutes les usines de Zara étaient situées en Galice, parce que leur business model était la réactivité, la capacité d’agir très vite. Quand ils avaient une idée, il fallait la mettre en production, puis dans le magasin très vite. Le turn over des modèles dans les magasins Zara était extrêmement rapide. Toute cette histoire est infaisable avec une chaîne des valeurs mondialisée, ça ne tient que si on a une maîtrise relativement peu distante de la chaîne de production.
Si c’est vrai pour un secteur aussi peu high tech que le textile, ce doit être vrai pour beaucoup d’autres secteurs. Ce qui ne veut pas dire que les firmes ne délocalisent pas mais qu’elles vont probablement délocaliser pour le marché et pas forcément pour réaliser une chaîne de production partout dans le monde.
Autre mythe : la spécialisation des sociétés européennes dans les seuls services.
Il est relativement risqué de se bercer de cette illusion pour des raisons qui ont été maintes fois écrites : une bonne partie des services s’appuient sur l’industrie, sont en liaison avec l’industrie. Une bonne partie des services dont on voit la montée ont pour origine l’externalisation… Si on appliquait des normes comptable et statistique constantes on s’apercevrait que, certes, les services montent mais pas autant que ce qu’on peut dire. Et surtout, pour autant qu’on puisse les mesurer, les gains de productivité, dans une bonne partie des activités de services, sont très faibles. Si on se spécialise sur l’activité de services, ça veut dire que si on veut une croissance du niveau de vie suffisante, il va falloir augmenter les prix. Ce n’est pas nécessairement garanti, tout dépend du type de services dans lequel on se spécialise.
Donc, l’idée que l’Europe pourrait se spécialiser dans les services et abandonner l’industrie est probablement un mythe. Je n’y crois absolument pas.
Et c’est probablement un mythe dangereux qui nous éloigne d’une partie des solutions que nous pouvons envisager à court et moyen termes.
Quel type d’initiatives pourrait-on prendre face à ces nouveaux défis ?
· Défi de la concurrence entre systèmes, entre modèles de capitalismes à l’intérieur des économies développées, des pays de l’OCDE
· Défi de la concurrence des pays émergents sur les segments à forte intensité de main d’œuvre à bas coût comme sur des segments plus technologiques, des segments à forte valeur ajoutée, comme on dit parfois, de façon un peu impropre.
Là il ne faut se priver d’aucune arme.
Economiste de profession, j’ai une sorte de prévention contre le protectionnisme. C’est un biais professionnel, c’est aussi un biais tactique :
Si jamais on met trop l’accent sur le protectionnisme, on offre des verges pour se faire battre. Il vaut mieux adopter des stratégies de défense moins directes. Si on met des protections – cela a été dit – de nombreux industriels ne demanderont pas mieux que de tenir encore dix ans pour faire des marges sans s’adapter.
Ce qui ne veut pas dire qu’il ne faut pas faire de protection. Je ne suis pas, en tant qu’économiste, favorable à la doctrine du protectionnisme, cela ne veut pas dire que je ne suis pas favorable à des protections.
Même la théorie économique n’est pas contre les protections, contrairement à ce qu’on pourrait croire. La théorie économique dit qu’il y a des bienfaits au libre-échange à condition de remplir certaines conditions. Notamment, il peut y avoir bienfaits du libre-échange si ça permet une meilleure réallocation des facteurs de production. Le problème est que si le libre-échange conduit à ce que dans un pays les facteurs de production ne soient pas réalloués mais inemployés – typiquement si ça conduit à mettre des gens au chômage – il est clair qu’on est hors cadre des bienfaits du libre-échange. Si on a des difficultés de réadaptation de la main d’œuvre vers d’autres activités, il est clair que la protection est, non seulement souhaitable, mais légitime d’un point de vue de théorie économique : Vous avez parfaitement le droit de faire de la protection pour favoriser les réadaptations.
Il ne faut donc pas systématiquement voir les protections comme étant des protections de marges que se feraient les industriels à l’abri des tarifs mais aussi comme la possibilité de favoriser des réallocations de facteurs qui ne se feront pas absolument spontanément sous l’aiguillon du marché.
Beaucoup de choses intéressantes ont déjà été dites à propos du dumping social.
Je voudrais juste mettre l’accent sur un ou deux points.
C’est une question compliquée : Lier le commerce international à l’adoption de certaines normes sociales peut se révéler contre-productif. Une bonne partie de l’adoption de ces normes sociales est endogène au développement des pays. Si, en mettant des barrières, on empêche les pays de se développer, si on empêche ce processus endogène d’adoption de normes sociales et on va exactement à l’encontre de l’objectif recherché.
Ce problème devient très vite politique :
Si nous faisons du commerce avec ces pays, sommes-nous susceptibles d’enclencher un processus endogène d’adoption de normes sociales – ce qui suppose un minimum de démocratie dans les pays considérés – ?
Ou bien :
Est-ce que, si nous commerçons avec cette dictature, jamais ne se déclenchera un processus endogène d’adoption de normes sociales ni le développement social en même temps que le développement économique ?
De nombreux travaux sont menés en ce moment sur les liens entre développement politique, développement social et développement économique. Les résultats ne sont pas aussi simples, on ne peut pas affirmer que le développement économique va entraîner le développement social et le développement politique vers la démocratie.
Les choses sont plus compliquées et on n’a pas, pour l’instant, de certitude, de résultat clair. Il faudrait plus de recherches théoriques, plus d’études empiriques pour avoir un peu plus d’idées claires sur ces sujets.
Or une bonne partie des débats qui nous occupent (Europe-Chine, Etats-Unis-Chine) a évidemment à voir avec cet aspect de la question.
Dernier point : il n’y a pas que la défense dans la tactique, il y a aussi l’attaque.
Il s’agit d’avoir des stratégies offensives de réadaptation de nos appareils productifs dans les pays du modèle européen et en France en particulier.
Les pays du modèle européen continental ont été largués par les Etats-Unis, par le modèle asiatique et par le modèle social-démocrate d’Europe du Nord en ce qui concerne la qualification de la main d’œuvre, la recherche-développement, la science fondamentale, et tous leurs indicateurs avancés de développement économique et de développement industriel (indicateurs de recherche-développement, de formation…) sont à l’orange.
Si on veut réorienter nos appareils productifs, c’est évidemment sur ces indicateurs-là qu’il faut agir. Dans l’optique de s’insérer dans la mondialisation, dans le commerce international de la bonne façon, considérant notre niveau de développement et celui que nous souhaitons avoir, considérant le type de société que nous voulons, il est clair qu’il faut faire un effort beaucoup plus important qu’on ne l’a fait au cours des dix ou quinze dernières années sur la formation, sur la recherche-développement, sur la science.
Les économistes le disent depuis au moins quinze ou vingt ans et peu de choses sont faites.
Il suffit de regarder les données sur un indicateur aussi simple que les dépenses de recherche-développement : elles stagnent en France depuis au moins dix ou quinze ans Il y a un effet de ciseaux tout à fait déplorable – là aussi, c’est peut-être le big bang libéral – qui a voulu que les dépenses de recherche-développement de l’Etat devaient baisser tandis que celles des entreprises privées devaient augmenter. Celles de l’Etat ont baissé, le problème est que les dépenses privées ont augmenté de manière insuffisante pour compenser le retrait de l’Etat alors que globalement ça aurait dû augmenter.
Cette dynamique vertueuse a eu lieu dans de nombreux pays mais pas dans les pays de l’Europe continentale, probablement pour des raisons structurelles.
J’insiste sur le fait qu’il n’y a pas que la défense, il y a beaucoup de choses à faire dans l’attaque, dans la construction de notre capacité à bien nous insérer dans la division internationale du travail.
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