L’école de la République ne peut pas échouer
Intervention de Matthieu Lahaye, spécialiste des politiques éducatives, lors du colloque "La jeunesse française face aux grands défis de la nation" du mardi 26 septembre 2023.
Merci.
Merci à tous.
Après l’exposé de Joachim Le Floch-Imad, dont on ne peut que partager les inquiétudes, on se prend à douter qu’il y ait encore une solution. Nous allons tout de même tenter de la trouver car c’est une absolue nécessité pour les jeunes de ce pays, pour le pays lui-même – à moins que nous ayons décidé de renoncer délibérément à persister dans l’être.
L’école est une institution au sens plein du terme. C’est en effet à l’école que s’institue la jeunesse, qu’elle s’invente aussi. Quelle définition donner du concept de jeunesse ? Sinon une définition culturelle au pluriel. En effet, je ne suis pas certain qu’il y ait jamais eu une jeunesse. N’y a-t-il pas toujours eu des jeunesses ? Historiquement, il suffit de convoquer l’opposition quasi proverbiale entre les jeunesses spartiates et les jeunesses athéniennes pour comprendre qu’en réalité les jeunesses sont d’abord et avant tout la projection fantasmée du monde adulte. Comme Joachim l’a très bien dit, s’il y a crise, c’est d’abord la crise des représentations du monde adulte. Comment ce monde adulte perçoit-il son passé et son avenir ? Comment le monde adulte perçoit-il les jeunes et quels sont les devoirs qu’il se donne à leur égard ? Le problème est évidemment là. La crise de l’école, c’est peut-être la crise de la jeunesse mais c’est avant tout la crise des imaginaires de nos sociétés.
On souligne souvent les déficiences de l’école de la République. J’aimerais quand même rappeler certaines réalités. Notre école scolarise 13 millions d’élèves (80 % dans le public et 20 % dans le privé sous-contrat) et emploie 1,2 million de personnels, dont 800 000 professeurs. En cette rentrée surgissent ici ou là des problèmes, des absences de professeurs. Et ce n’est pas acceptable. Malgré tout ce grand pays arrive à aligner chaque lundi matin à 8 heures 800 000 professeurs devant 13 millions d’élèves, ce qui constitue un véritable tour de force administratif ! On le doit aux cadres de l’Éducation nationale ; on le doit à l’engagement des professeurs. Disons-le, notre école a une puissance administrative absolument considérable. Il faut donc raison garder dans la critique et ne pas s’adonner à cette fâcheuse manie du dénigrement, qui consiste souvent à adopter la langue de ceux qui n’aiment pas la singularité française, issue d’une histoire si particulière, celle d’une nation enfantée par l’État central. Avec le ministère de l’Éducation nationale, nous disposons d’un outil administratif absolument exceptionnel que d’une certaine manière les Allemands nous envient : depuis son bureau, 110 rue de Grenelle, en une heure, le ministre de l’éducation nationale a la possibilité de passer une directive à 30 recteurs, 101 directions départementales, 1 260 inspecteurs de circonscriptions de l’Éducation nationale et, dans la foulée, très rapidement aux 800 000 professeurs.
La question essentielle est de savoir ce que nous en faisons ? Et par là, ce que nous voulons pour notre jeunesse ? Et c’est là que surgit la question politique.
Nous connaissons tous les résultats scolaires décevants de nos élèves[1]. Dans ce pays, la moitié des élèves entrent en sixième sans savoir que 5/10 = 1/2. La moitié des élèves accèdent en seconde générale ou technologique sans savoir que (1/2)2 = ¼. Et on a voulu faire croire que le problème des mathématiques se situait en première générale ! Cécité incroyable d’une élite obsédée par son nombril qui refuse de voir que l’enjeu est ailleurs : la cause du peuple.
La Direction de l’évaluation fait passer la même dictée aux élèves de CM2 depuis 1987. Le nombre de fautes est en augmentation considérable. Il est intéressant à cet égard de regarder l’évolution du type de fautes que font les élèves. Hier comme aujourd’hui, l’orthographe d’usage est plutôt maîtrisée. Pas plus hier qu’aujourd’hui, les élèves n’écrivent « maizon » mais bien « maison » et le chat a bien son « t ». En revanche, l’orthographe grammaticale est devenue un Everest. Les marques du pluriel manquent et quand elles existent il n’est pas rare de voir des « s » pour marquer le pluriel des verbes. Ce qui s’est étiolé, ce sont les automatismes que l’on acquiert par un entraînement soutenu, et parfois un peu répétitif.
Pour répondre aux maux de l’école, les transformations structurelles sont très souvent avancées. Et les structures ont leur importance. Mais, force est de constater que le premier réflexe consiste à penser la question scolaire d’abord et avant tout en termes de structures. Et chacun y va finalement de son couplet convoquant surtout ce sur quoi il n’a pas autorité pour expliquer la piètre performance des élèves. Les moyens sont régulièrement invoqués (avec son expression la plus concrète : le nombre d’élèves par classe), la formation des maîtres (qui n’est pas satisfaisante) … Mais les données issues des tests PISA montrent qu’à un certain niveau d’investissement, les progrès des élèves ne dépendent plus du montant investi. Le problème majeur, la question pédagogique, est trop peu évoqué et c’est assez étrange pour une institution de savoir. Si, depuis les années 1960, on a bien identifié le poids de la sociologie sur les résultats des élèves, depuis le début des années 1990, la recherche internationale a prouvé que des pédagogies efficaces pouvaient être plus fortes que la sociologie.
De quelle histoire ces résultats scolaires sont-ils le nom ? D’une période de grande inconséquence, de désinvolture, de faux-semblants, enfin ces périodes qui préparent les grandes crises politiques. Cette période où la France sacrifie son industrie au profit d’une économie tertiaire perçue comme l’horizon émancipateur de l’ouvrier sommé de devenir cadre. Cette période où tout un peuple est entretenu dans l’idée que la solidarité ne repose pas sur le travail de tous mais est synonyme de jouissance illimitée grâce à la redistribution, pervertissant le modèle social français de la responsabilité de tous à l’égard de tous, véritable trésor national. Dans les années 1960, 60 % des Français considéraient le travail comme important. Aujourd’hui, selon Jérôme Fourquet, ils sont 21 %. Difficile de faire école, par essence fondée sur l’effort, dans une telle société.
Cette société du loisir a discrédité les savoirs techniques et a opposé ce qui n’aurait jamais dû l’être, la maîtrise des savoirs fondamentaux et la pensée. Dès lors, cette éthique de la perfection au cœur de l’école élémentaire est apparue comme un formalisme désuet, voire inhibiteur pour la créativité de l’enfant. Il revenait à ce dernier de créer son propre savoir en résolvant des problèmes complexes dès le plus jeune âge. Les scientifiques s’accordent aujourd’hui pour dire que cette pédagogie de la découverte, qui a son utilité pour les élèves experts, est très inefficace pour l’apprentissage des compétences élémentaires, particulièrement pour les plus fragiles.
Résultat : l’école de la République peine à réduire les inégalités et force est de constater que les élèves développent un rapport singulier à la vérité scientifique dont on leur a un peu trop appris qu’elle devait être passée au crible d’eux-mêmes pour accéder au statut de savoir. L’épistémologie de la science ne peut pas constituer une pédagogie de la science, du moins pour l’école élémentaire.
L’apprentissage de la lecture offre un autre exemple très concret. Comme souvent, de fausses oppositions ont été installées entre l’apprentissage du code et la compréhension. Pour quelles raisons ? Par ignorance ! Par idéologie aussi ! Car certains ont pu faire du discrédit de l’apprentissage du décodage un marqueur identitaire d’une chimérique contre-culture à la culture dite bourgeoise. L’ouvrage Réapprendre à lire de Garcia et Oller[2] explique très bien cette histoire, celle de la dévalorisation du décodage perçu comme une compétence non créatrice de pensée à la différence de l’enseignement de la compréhension qui était noble. Or aujourd’hui toutes les études des sciences cognitives démontrent que la maîtrise du code, qui passe par la répétition et l’exercice, est indispensable pour accéder à la compréhension qui doit par ailleurs être enseignée de manière rigoureuse et progressive.
Finalement nous avons condamné les élèves à un triste paradoxe, celui des adultes : sommés d’être intelligents tout de suite, ils étaient exposés à des exercices très complexes sans que leur soient fournis les moyens de réussir, c’est-à-dire une démarche très progressive avec un enseignement selon des méthodes éprouvées présentées par le maître. Alors même que l’enseignement professionnel est fondé sur cette démarche de présentation et de répétition du bon geste, on a sommé les élèves d’apprendre par eux-mêmes. Là encore sans mauvaise intention car il est vrai que nous apprenons souvent par nous-mêmes sauf que les savoirs scolaires, sommet d’une civilisation scientifique et humaniste, ne peuvent s’acquérir sans la médiation de technique pédagogique, à l’exception de quelques esprits très intelligents.
Je pense que nous sommes en train de sortir de cet imaginaire grâce aux sciences de l’éducation et aux sciences cognitives. Il reste bien des obstacles intellectuels comme la manière dont certains usent de la « liberté pédagogique », qui est fondamentale car un professeur doit adapter son enseignement à ses élèves comme un médecin adapte son traitement à son patient, mais ne peut pas être un bouclier d’immunité contre les pédagogies dont l’efficacité est prouvée par la science et la pratique.
Le problème de l’école est un problème intellectuel et moral. Et il consiste à replacer le professeur, l’adulte, dans son rôle de transmetteur de savoir à l’aide des pratiques éprouvées : progression du simple au complexe, supervision du travail des élèves, identification des besoins de chaque élève, retours systématiques sur leur travail. Le professeur ne doit être ni le spectateur de sa classe, ni le commentateur, ni l’animateur : il donne aux esprits la forme de la liberté c’est-à-dire celle de la raison.
Joachim a évoqué le comportement. Quel est le discours de l’institution scolaire sur le comportement dans nos classes ? Il existe évidemment, notamment sur des points spécifiques, comme le harcèlement dont l’un des terreaux est la dégradation du climat scolaire constatée par l’enquête PISA. Mais il s’inscrit rarement dans une démarche globale à l’échelle de l’école ou de l’établissement avec une charte très explicite des comportements à adopter dans les différents lieux de l’école et surtout un protocole très clair lorsque les élèves n’adoptent pas les bons comportements. Pourtant des programmes très ambitieux existent dans le monde, notamment aux États-Unis, au Canada et en Belgique. L’objectif est de prévenir les mauvais comportements et d’agir dès qu’ils surgissent. Et que de critiques entend-on en France à l’égard de ces démarches globales et rationnelles : école du dressage, école de la correction avec toujours ce prisme naturaliste qui valorise le naturel et jette le soupçon sur la civilisation. Aujourd’hui même, dans tous les collèges de France beaucoup de professeurs se sont interrogés sur cet élève ingérable au fond de la classe : comment faire pour que la situation ne dégénère pas ? Comment faire pour reprendre le contrôle sur cet élève ? Et si cela ne marche pas ai-je le droit de le faire sortir de mon cours ? Ai-je le droit de lui infliger une punition ? Les professeurs ne peuvent pas rester seuls face à ces questions. Et la crainte de ne pas pouvoir gérer sa classe n’aide pas à attirer les jeunes vers ce métier. Le manque de consensus à cet égard trahit le désarroi d’un monde adulte, fasciné par la spontanéité adolescente et refusant de considérer que l’angoisse immense des jeunes est de trouver le chemin pour s’insérer dans un monde déjà là qui ne les attend pas. Pour cela, ils ont besoin qu’on les aide à avoir raison d’eux-mêmes.
Et puis pour finir cette exploration des imaginaires, j’aimerais parler du discours sociologique dominant. Historiquement la classe moyenne intellectuelle, composée notamment par les professeurs, a une fonction sociale décisive : tisser le lien entre les classes populaires et l’élite par l’instruction. Or, force est de constater qu’une part non négligeable de cette classe moyenne s’est spécialisée dans une autre cause, la défense de toutes les victimes, victime de l’histoire, victime de la sociologie, du genre… et que sais-je. Si l’intention est louable, les conséquences sont lourdes car cette vision n’a rien de dynamique socialement, sinon entretenir une dynamique du ressentiment, qui est enfermante. Dès lors que pour beaucoup des membres de cette classe moyenne l’objectif n’est plus d’émanciper le peuple par le progrès intellectuel et matériel, par l’ascension sociale en permettant aux élèves d’intégrer l’élite du pays, l’exigence académique a moins de sens. Pourquoi exiger d’un élève cette ascèse de la répétition, cet effort indispensable sur lui-même pour s’élever, si l’on considère que non seulement c’est une victime mais qu’en plus il ne gagnerait rien à sortir de sa classe ? L’éthique de la perfection dont nous parlions plus haut ne peut être guidée que par l’idée qu’un enfant du peuple, en une ou deux générations, doit pouvoir intégrer les meilleures écoles, la meilleure formation professionnelle et que sa dignité intrinsèque d’homme repose sur la maîtrise de ces compétences fondamentales.
De véritables a priori sociaux conduisent à surprotéger les élèves des classes défavorisées des apprentissages par une sorte de mauvaise conscience qui consiste à penser que leurs difficultés est une forme de stigmatisation alors qu’elle est le processus normal dans un apprentissage qu’il faut adapter à leurs besoins. Je me souviens d’une professeur des écoles formidable, qui, systématiquement, lorsqu’elle travaillait sur la résolution de problèmes, proposait aux élèves les plus fragiles, issus de milieux défavorisés, des aides, sans même qu’ils le demandent. Cela avec les meilleures intentions. Pour qu’ils ne se sentent pas pointés du doigt. Cette vision misérabiliste qui en réalité discrimine et exclut est un goudron mortifère. Changeons notre regard : ces élèves peuvent aussi bien réussir que les autres et c’est pour cette raison qu’il faut leur enseigner avec les méthodes efficaces et attendre beaucoup d’eux.
Ce prisme social est d’autant plus fort que le collège est en réalité fait pour les enfants de la classe moyenne. Dans ces milieux, l’école commence avant l’école et se poursuit après l’école. Les parents suivent les devoirs et apportent des compléments éducatifs à grand renfort d’enseignements extrascolaires. L’enseignement par la découverte des notions, si difficile pour ceux qui n’ont pas de base, si peu efficace pour ceux qui n’ont que l’école pour apprendre, convient parfaitement à cette classe. Et je peux vous dire que cette classe protège ses petits privilèges avec beaucoup de force et de ruse. La principale est de s’ériger en défenseur du peuple en défendant un collège qui propose certes une égalité dans l’offre d’enseignement mais sans se soucier de l’égalité dans la réussite. Considérez que selon une étude de la DEPP, seuls 5 % des élèves en très grande difficulté en mathématiques en 6e arrivent à se hisser parmi les meilleurs en 3e. Comment comprendre qu’on impose à des élèves qui ont des difficultés l’apprentissage d’une seconde langue en 5e alors qu’on les aide relativement peu à consolider leurs difficultés et que s’ils font en définitive une formation professionnelle après la 3e, on leur demandera souvent d’abandonner cette langue. Sous couvert d’un humanisme généreux joué avec des accents populaires, on perpétue une structure qui ne laisse pas beaucoup de place au peuple.
Les faux-semblants sont immenses et commandent d’être visionnaire… La crise que nous vivons nous oblige surtout à faire une place au peuple qui, on le voit jour après jour, réclame sa place historique car le peuple gagne toujours.
Comment sortir de cette situation ?
Il me semble qu’il faut revenir à des choses simples. La République, c’est la clarté. Il est peut-être temps que les Français soient saisis de vraies propositions et qu’ils s’expriment. L’école de la République n’appartient ni au ministère, ni aux élèves, ni aux familles mais aux citoyens. Il me semble que durant les campagnes présidentielles de ces trente dernières années l’éducation est hors des débats.
Je pense qu’il faut de la clarté et que les Français doivent dire clairement l’école qu’ils souhaitent.
Quelques pistes :
- peut-on se donner les moyens de bien former nos professeurs ?
- peut-on se dire que le problème majeur de notre école est une question pédagogique, dans la gestion des apprentissages et des comportements ?
- peut-on dire qu’il y a des pédagogies dont l’efficacité est prouvée par la science et d’autres non ?
- peut-on revenir à plus de cohérence, c’est-à-dire à une école élémentaire qui comme son nom l’indique fait de l’élémentaire : lire, écrire, compter, apprendre à bien se comporter et à éveiller sa curiosité sur le monde ?
- peut-on assumer devant les Français que le parcours entre la classe de 6e à la 3e peut n’être pas le même pour tous les enfants ? Et que l’égalité de réussite prime sur l’égalité de l’offre ?
Ces quelques questions simples me semblent devoir être posées et il me semble que la sortie de la crise de l’école passera par le débat avec les Français. L’école attend les citoyens français. L’école est en situation de faiblesse parce que le peuple français n’est pas uni autour de son école du fait du manque d’une volonté – où du refus – d’un vrai grand débat public sur son école qu’il revient à la classe politique d’organiser.
Marie-Françoise Bechtel
Merci beaucoup.
Il y avait dans votre intervention une matière très riche, en bon écho avec l’intervention qui précédait. Vous dites l’un et l’autre que l’État, par « quelque moyen que ce soit », doit quelque chose à la jeunesse à travers ses politiques publiques. Et quelle politique publique est mieux placée pour répondre aux besoins objectifs de la jeunesse que la politique de l’éducation nationale ?
Vous avez fait mention d’un sujet que nous avons souvent traité à la Fondation, celui de la formation des maîtres. Aujourd’hui les maîtres qui enseignent aux élèves ont eux-mêmes reçu une instruction désastreuse, à coup de pédagogisme (« apprendre à apprendre »). Nous en sommes à la deuxième génération. Ce point est très important parce qu’il arrive que les maîtres ne comprennent même pas ce qu’on leur demande. J’ai lu récemment dans la presse qu’un grand nombre de maîtres du primaire n’ont pas appris à apprendre à lire aux élèves. Alors ils utilisent un logiciel gratuit en vente libre sur internet : la lecture globale ! Cela révèle la misère d’un grand pays au PIB élevé, un pays à forte tradition éducative ! Difficile, quand on en est là, de redresser la barre. Un débat public ? Pourquoi pas. Mais je rappelle que lorsque Jean-Pierre Chevènement, ici présent, avait déclaré : « Il faut que les jeunes Français apprennent à lire, à écrire et à compter », 80 % des Français le suivaient. On peut donc se demander si ce n’est pas plutôt aux responsables politiques de proposer aux Français un discours dont les sondages auront tôt fait de dire ce qu’il y a à en penser.
Merci beaucoup en tout cas du côté engagé de votre réaction. Voir un tel degré d’investissement chez de hauts responsables de l’Éducation nationale donne de l’espoir.
En parlant de degré d’investissement je vais me tourner vers le troisième intervenant qui a la charge de nous parler de l’enseignement technique, de ses enjeux et de ses perspectives.
Je vous livre sur le sujet une anecdote. Lorsque j’étais députée, il y a quelques années, le proviseur du lycée d’enseignement professionnel à vocation régionale de Chauny, une ville assez peu favorisée du nord de l’Aisne, me disait non sans quelque désespoir organiser chaque année une très vaste opération informant sur les débouchés professionnels, des débouchés industriels basiques jusqu’à Sciences Po Lille : les parents des classes défavorisées n’y participaient jamais. Il faut donc aller les chercher. La demande d’éducation de la part des parents est un vrai sujet. Il faut dire qu’en France ce sont souvent les parents – je l’ai vécu aussi sur le terrain – qui s’opposent à l’apprentissage. Un obstacle psychologique fait qu’en France, les parents, y compris des classes défavorisées, veulent que leurs enfants aient des diplômes. Certes, nous sommes le pays de la peau d’âne ; l’obstacle psychologique est donc fort, comment le lever ?
Je vais donc donner la parole à Michel Lugnier, inspecteur général de l’Éducation nationale, docteur en sciences de l’éducation et auteur de plusieurs rapports consacrés à l’orientation et à l’enseignement professionnel, un sujet qui se branche parfaitement sur ce que nous venons d’entendre.
[1] L’Éducation nationale en chiffres 2023 : [année 2022-2023] / Ministère de l’Éducation nationale et de la Jeunesse. Publication de la Direction de l’évaluation, de la prospective et de la performance, Paris, 2023.
[2] Sandrine Garcia et Anne-Claudine Oller, Réapprendre à lire. De la querelle des méthodes à l’action pédagogique, Paris, éd. du Seuil, 2015.
Le cahier imprimé du colloque « La jeunesse française face aux grands défis de la nation » est disponible à la vente dans la boutique en ligne de la Fondation.
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