La formation professionnelle et l’entreprise au cœur de l’intégration républicaine : orienter la jeunesse grâce aux filières d’excellence

Contribution fournie par Régis Marcon, chef étoilé, co-auteur avec la députée des Hauts-de-Seine Céline Calvez du rapport sur l’avenir de la voie professionnelle (remis au ministre de l’Éducation nationale, Jean-Michel Blanquer, le 22 février 2018), lors du séminaire « Enseigner la République » du mercredi 20 janvier 2021

La formation professionnelle présente de nombreux bénéfices. Non seulement elle permet de développer des compétences techniques (hard skills) et des compétences comportementales (soft skills) mais elle favorise le développement personnel, voire l’intégration dans la société.

Une des erreurs en France est d’avoir considéré l’apprentissage des métiers comme une voie de garage, une orientation par défaut, créant ainsi des clivages dans notre société. Les choses évoluent heureusement, et beaucoup d’efforts sont faits pour valoriser les métiers par tous les acteurs de la formation, et la dernière réforme professionnelle va dans ce sens. Les chiffres parlent aussi, la majorité de ces jeunes trouvent un emploi après leur formation, de même que l’on retrouve beaucoup de jeunes en réorientation qui partent vers des formations professionnelles.

Cette voie est une véritable chance pour nos jeunes, de même que pour les immigrés ; pour la plupart elles permettent d’accéder au métier de leur choix et de s’y épanouir. Pour les immigrés c’est une double chance, celle de favoriser l’insertion dans la société française et l’accès à un emploi.

Dans notre pays, qui paradoxalement compte plus de 2,5 millions de chômeurs, la plupart des entreprises, surtout les TPE et PME, sont dans des métiers en tension. L’arrivée de jeunes et de jeunes immigrés par le biais d’un contrat d’intégration républicaine est une chance, elle l’a déjà été, alors sachons la saisir une nouvelle fois.

Nous avons de nombreux exemples d’immigrés qui ont réussi et sont maintenant des références. Dans mon métier par exemple : Mauro Colagreco, Chef 3*, premier restaurant du monde aux Fifty Best, ou Kei Kobayashi, Chef 3* à Paris.

Associer l’apprentissage des métiers avec le partage des valeurs républicaines, c’est le défi d’aujourd’hui et de demain ; dans ce domaine des lycées et des CFA il est plus facile de faire comprendre ces valeurs durant des cours théoriques, et surtout dans la pratique car elles ont plus de chance d’être comprises et acquises dans un milieu où le jeune se projette.

Les dernières réformes professionnelles en lycées et en CFA vont dans ce sens.

La formation professionnelle est une opportunité pour nos jeunes particulièrement dans cette période COVID.

Jean-Pierre Chevènement

M. Marcon est un chef étoilé. La promotion des filières d’excellence est en effet une façon de réconcilier un certain nombre de jeunes avec ce qui est un peu extraordinaire, avec la beauté, avec le fait d’exceller. Faire de la France un pays d’excellence dans tous les domaines pourrait être un objectif. La restauration est un secteur qui souffre beaucoup actuellement. Mais il y a d’autres secteurs, d’autres domaines dans lesquels on peut promouvoir l’apprentissage de savoirs de pointe.

Je voudrais lier le combat laïque avec le combat pour le savoir en général, non seulement le savoir abstrait mais le savoir pratique, le savoir des métiers. Je voudrais lier le combat laïque avec l’égalité, avec la justice sociale, avec la découverte de la beauté, avec l’idée que la nation, relais indispensable, permet aussi de découvrir le monde. Dans tout cela il y a une dimension extrêmement importante, la dimension culturelle.

C’est un combat idéologique qu’il faut mener pour l’égalité, pour la justice, pour le savoir, pour la connaissance, pour l’esprit critique, pour la beauté. Tout cela doit être mené en secouant une certaine paresse dans la société française. Je ne mets pas en cause les responsables, le gouvernement en général, mais il me semble qu’il faut apporter l’esprit militant, l’esprit de combat d’idées, partout où cela est nécessaire, y compris dans les salles de classe.

Je vois très bien ce que décrit M. Roder : des enseignants sympathiques mais qui ne comprennent pas les enjeux, qui ne saisissent pas la balle au bond et ne voient pas la portée intellectuelle, idéologique, du combat qu’ils doivent mener pour « faire lever la pâte. » C’est ce que faisaient les instituteurs de la Troisième République. Vous allez dire que je rabâche, que je radote même, prisonnier de schémas enfantins, mais j’ai vu comment on faisait de petits paysans des citoyens, comment mes parents leur apprenaient à se moucher et comment on leur apprenait aussi à s’exprimer. Ce combat a été mené victorieusement par des générations d’instituteurs formés dans des écoles normales. Il faut dire que les écoles normales avaient du bon parce qu’elles enseignaient des disciplines comme l’histoire, la philosophie, la géographie et étaient des écoles très militantes. Je ne suis pas sûr que les IUFM qui les ont remplacées, confiant la tâche de former les enseignants aux universités, dans l’état d’une certaine déréliction où nous sommes, soient la clef. Il faut comprendre que la lutte est nécessaire, la lutte d’idées bien entendu. Mais la lutte d’idées passe par la prise de conscience de ce qu’est la réalité de la société et de ce que nous devons faire pour l’améliorer et la rapprocher des exigences de l’éthique républicaine. Je ne veux pas vous infliger plus que de raison un cours que des esprits malveillants qualifieraient de « catéchisme républicain ».

Je vais maintenant élargir le débat. Nous avons une école qui a les moyens mais qui est en crise. Nous voyons les statistiques sur la dégradation du niveau scolaire en français, en mathématiques. On ne peut que s’alarmer de voir les nouvelles générations qui ne sont pas alimentées au lait de la culture et d’une éducation exigeante. Cet esprit de facilité qui a gagné le pays a des retombées extrêmement nuisibles. Donc il faut retrouver le sens du combat républicain à l’école.

Que faire ?

Natacha Polony puis Souâd Ayada vont tenter de répondre à cette question.

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Le cahier imprimé du colloque « Enseigner la République » est disponible à la vente dans la boutique en ligne de la Fondation.

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