Introduction – L’Europe, comment ça marche et comment la redresser ?

Introduction d’Alain Dejammet, ambassadeur de France, président du Conseil scientifique de la Fondation Res Publica, lors du colloque « L’Europe, comment ça marche et comment la redresser ? » du 20 mars 2018.

Mesdames,
Messieurs,
Chers amis,

Beaucoup d’entre vous sont des habitués de cette salle dont les murs résonnent encore des vociférations des « souverainistes » à propos de l’Union européenne. Mais les souverainistes eux-mêmes connaissent parfois des périodes de rémission et ils s’interrogent, cherchant à savoir ce qui se passe en réalité. Ils savent que l’essence de la souveraineté tient dans la capacité à s’engager, à conclure, à négocier, à reconnaître l’autre. Ils savent que la souveraineté s’exerce dans le contrat, dans la négociation. Donc ils cherchent à savoir ce qu’est cet « autre ». Dans l’armée, l’autre c’est l’adversaire et des cours de connaissance de l’adversaire sont donnés par les adjudants. Dans la vie quotidienne, nous sommes la cible de rafales d’inspecteurs des finances qui cherchent à faire de la « pédagogie ». Ici nous sommes à la Fondation Res Publica, dans une enceinte courtoise, ouverte, harmonieuse où l’on pratique l’art de la table ronde. C’est la raison pour laquelle nous avons invité des hommes de terrain, les meilleurs praticiens de cette chose qu’est l’Union européenne et qui en savent les mérites. Peut-être en aborderont-ils aussi les dérives puisqu’ils sont – discrètement – invités, s’ils ont ou recueillent des idées, à nous dire les moyens de redresser, peut-être, certaines de ces dérives.

La plupart de ceux qui sont ici connaissent ces hommes de terrain auxquels nous avons fait appel. Leur « terrain » n’a pas toujours été très exotique. Certes, pour l’un cela a pu être, très brièvement, les délices de Capoue et Rome. Pour l’autre ce fut Londres ou Bonn, terres des espions. Pour le troisième, ce fut pendant une courte période Washington et les soirées dévergondées organisées par Vanity Fair pour les correspondants de presse à la Maison Blanche… Mais la plupart du temps leur terrain a été Bruxelles, le waterzoï, les frites, la Mort subite, le Thalys… Ils ont vécu une vie difficile mais tous ont exercé les fonctions les plus éminentes, aussi bien dans la diplomatie française qu’à Bruxelles. Ils furent tour à tour directeur de cabinet, directeur de cabinet du vice-président de la Commission, directeur de cabinet du ministre, représentant permanent, directeur de la coopération européenne, directeur des Affaires économiques et financières, ambassadeur auprès de l’Union européenne… Ils sont véritablement les meilleurs connaisseurs, les meilleurs praticiens de l’Europe.

C’est donc à eux que nous allons demander ce qui se passe dans les instances de cette Union européenne. Le premier orateur sera Pierre Sellal, qui a été représentant de la France auprès de l’Union européenne, secrétaire général du ministère français des Affaires étrangères, exemple à jamais de sagesse et de discernement.

Nous entendrons ensuite Pierre de Boissieu, dont le petit chandail bleu fascinait les ministres et les « biquets » [1]. Identification même de l’Union européenne, Pierre de Boissieu a été au cœur de la bête, lui qui fut non seulement vice-président de la Commission, ancien représentant permanent de la France auprès des Communautés européennes, mais aussi ancien secrétaire général du Conseil de l’Union Européenne (il a donc été aussi de l’autre côté du miroir).

C’est aussi le cas d’un troisième personnage, un peu différent. Héros d’une bande dessinée, il fut incarné au cinéma par un acteur danois dans un film où il arrive à maîtriser un ministre assez survolté [2]. Mais, sous le nom de Pierre Vimont, il a été également représentant de la France auprès de l’Union européenne, puis, surtout, passant de l’autre côté du mur de façade de Bruxelles, le premier secrétaire général exécutif du Service européen pour l’action extérieure.

Ils ont donc tous des visions de l’intérieur et de l’extérieur. Ce sont, je le répète, les meilleurs connaisseurs qui sont réunis ici aujourd’hui pour essayer de nous expliquer « comment ça marche ». Nous sommes tous effectivement friands de savoir comment ça fonctionne et – éventuellement – quels sont les problèmes et, peut-être, les possibilités de redresser un peu tout cela.

Ensuite ils dialogueront entre eux sous la conduite du président de la Fondation Res Publica, Jean-Pierre Chevènement, puis avec la salle où j’aperçois nombre d’experts et d’anciens diplomates en poste à Bruxelles.

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[1] Les « biquets » et les « biquettes », ainsi nommait-on la petite troupe des jeunes collaborateurs qui suivaient Pierre de Boissieu dans les couloirs du Quai d’Orsay.
[2] M. Dejammet fait allusion à la bande dessinée « Quai d’Orsay » de Christophe Blain et Abel Lanzac (pseudonyme du diplomate Antoine Baudry) puis au film qu’elle inspira à Bertrand Tavernier où Niels Arestrup compose un directeur de cabinet extraordinaire, (Claude Maupas) qui n’est pas sans rappeler Pierre Vimont, figure légendaire du Quai.

Le cahier imprimé du colloque « L’Europe, comment ça marche et comment la redresser ? » est disponible à la vente dans la boutique en ligne de la Fondation.

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