Débat final, animé par Jean-Pierre Chevènement, Président de la Fondation Res Publica, au colloque « Le Maghreb et son nord », le 17 avril 2014.
Merci, Monsieur le président. Vous nous avez fait revivre le rêve des « nouvelles Andalousies » dont parlait Jacques Berque [1]. Un rêve tout à fait réalisable qui, un jour prochain, peut se concrétiser.
C’est du point de vue du nord que je parlerai de ce qui se passe du côté du Maghreb et au-delà, en Afrique.
Parmi les défis auxquels nous sommes confrontés, j’évoquerai d’abord celui du maintien de notre propre modèle social menacé par l’érosion de notre base productive et par la très faible croissance des pays européens – que vous avez rappelée – qui nous entraîne vers une paupérisation relative.
L’une des questions que nous avons à nous poser consiste à nous demander si nous avons réalisé le potentiel de croissance que la science et la technologie, disponibles pour tous les peuples, mettent à notre portée. La réponse est non. Chacun sait que le potentiel de la France est d’au moins 2,5 % de son PNB par an. La Grande-Bretagne, qui ne souffre pas d’une monnaie surévaluée, a une croissance de 2,5 %. Les États-Unis, qui peuvent faire varier la monnaie mondiale selon leurs besoins, ont une croissance de 3,5 %. Mais l’Europe a une croissance négative. La croissance de la France, cette année 2013, est de 0 %, même si, au dernier trimestre, des cris de victoire ont accueilli l’annonce d’une croissance de … 0,3 % ! Un résultat plus que médiocre dont il apparaît que certains se satisfont.
Je pense maintenant au Maghreb et aux pays du sud qui auraient intérêt à ce que le marché européen se développe plus vite. Pour l’Algérie, qui devra écouler son gaz naturel (liquéfié ou non) et son pétrole (dont les réserves restent abondantes), le problème du « réglage » de l’économie en Europe et des règles du jeu que l’Europe s’est données ou se donnera est posé.
Si la croissance allemande, de 0,4 % pour l’année dernière (2013), peinera à atteindre 1,7 % cette année, ce pays présente quand même un excédent commercial de deux cents milliards ! Il faut donc trouver une conciliation entre la relative prépondérance économique qui fait de l’Allemagne le pays décisionnaire par excellence (qui peut imposer pour objectif unique à la Banque centrale la lutte contre l’inflation et aux finances publiques des trajectoires qui, mises en marche parallèlement dans tous les pays, ne peuvent qu’aboutir à une stagnation économique de longue durée) avec la diversité culturelle et l’hétérogénéité économique des autres nations européennes. Disant cela, je ne fais qu’énoncer un problème qui s’est posé à maintes reprises dans l’histoire et se pose cette fois-ci dans des termes pacifiques, ce qui est quand même un moindre mal. Il faut trouver un meilleur équilibre.
Si la France n’est pas capable de poser ce problème, et de le poser de façon amicale pour que nous en sortions de manière concertée, quel pays d’Europe le fera ? Aucun ! C’est le rôle de la France. Un rôle qu’apparemment nous avons un peu oublié jusqu’à présent.
Les transferts de technologie, de savoir, l’acquisition des connaissances, absolument fondamentaux, ne se font pas partout à la même vitesse en raison de facteurs politiques. Si la Chine croît beaucoup plus vite que l’Inde c’est qu’elle a fait son unité nationale et conquis son indépendance sous le maoïsme (au prix de quelles souffrances terribles !). C’est un pays homogène qui, grâce à la politique décidée par Deng Xiaoping en 1979, s’est ouvert aux investissements étrangers, non seulement aux capitaux mais aux savoir-faire, aux technologies, cela avant même les réseaux numériques. Le PIB chinois est au moins quatre fois plus important que celui de l’Inde. L’Inde dépassera la Chine dans vingt ou trente ans par sa démographie mais elle est loin d’avoir rattrapé la Chine économiquement. C’est que la Chine a mis en œuvre les techniques comme les Japonais l’avaient fait au milieu du XIXe siècle, à l’époque de l’ère Meiji (quand le mot d’ordre était : « Technologie occidentale, âme japonaise ! »), avec les conséquences que nous savons. Je ne préconiserai pas cette recette à la cantonade. Je dirai qu’elle n’exclut pas l’esprit de modération, une certaine intelligence… Bref, qu’elle proscrit l’hubris (la démesure).
Je constate quand même qu’il y a des pays qui savent mettre en œuvre des stratégies de développement.
Ce que vous avez dit sur l’Algérie est vrai. Ce que j’ai vu au Maroc est frappant. Et je dois dire que la Tunisie a donné l’exemple d’un développement induit par l’entreprise qui est assez remarquable.
D’autres pays n’y parviennent pas. Je me souviens d’Houphouët-Boigny me disant que les soixante ethnies composant la Côte d’Ivoire avaient été unifiées grâce à la France pour former un pays uni. Malheureusement la suite a montré que ce n’était pas aussi évident et qu’il y a des pays naturellement fragiles. En Afrique, la plupart des pays sont fragiles.
Ce problème politique est absolument central, fondamental.
On a parlé – M. Montebourg notamment – de co-localisation. J’ai regardé le tableau de notre balance des paiements depuis 1999. De 1999 à 2011 la France, a investi deux mille milliards d’euros dans l’Union Européenne… et quinze milliards d’euros au Maghreb (dont huit au Maroc). La disproportion est frappante. Ces chiffres sont tout à fait étonnants !
On se réjouit des investissements étrangers en France. Le Président de la République a reçu aujourd’hui un certain nombre de patrons de multinationales. Effectivement, bon an mal an la France arrive à attirer cinquante milliards d’IDE. Mais nous exportons cent cinquante milliards par an ! On ne le sait pas, on ne le dit pas, la France a toujours été un grand pays exportateur de capitaux. Nous avons dirigé des sommes considérables avant 1914 vers l’Empire russe et vers l’Empire ottoman. Si nous n’avons pas toujours retrouvé nos billes nous avons quand même contribué à un certain essor économique. Aujourd’hui nous restons un grand pays exportateur de capitaux. Mais il faudrait que la France identifie politiquement le Maghreb comme un enjeu stratégique absolument majeur, capital, du point de vue de ses propres intérêts, et qu’elle dirige une partie de cet argent vers ces pays, par des méthodes qu’il convient de discuter avec eux, pour les aider à s’en sortir par le haut.
C’est tout à fait possible et vous nous avez fait rêver en décrivant les uns et les autres les possibilités latentes de vos pays.
Pour nous, la civilisation est toujours venue de la Méditerranée : de Grèce, de Rome mais avant cela de l’Égypte dont nous connaissons l’influence qu’elle a eue sur les civilisations crétoise et grecque. L’agriculture nous est venue de Mésopotamie, berceau du néolithique et le rôle des Arabes dès le Moyen-âge n’a plus besoin d’être rappelé. C’est par eux que se sont transmis non seulement l’héritage de l’Antiquité mais aussi beaucoup de concepts ou d’inventions. Le sud est la grande voie civilisatrice.
D’autres influences nous sont venues par le nord (les Celtes, les Germains…). L’originalité de la France est d’avoir réussi à combiner des influences extrêmement diverses en un mélange finalement pas si disharmonieux. C’est un peu le rôle de la France, petit cap de l’Eurasie où il n’y a pas de montagnes entre le nord et le sud (sauf le Massif Central, aisé à contourner), de réaliser ce nécessaire mélange d’influences venues du monde entier.
C’est dans cette vision d’universalité que nous devrons à l’avenir essayer d’être nous-mêmes un pont entre l’Europe et l’Afrique, comme le Maghreb doit l’être aussi entre l’Europe et l’Afrique sahélienne et subsahélienne. En effet la croissance africaine qui nous fait rêver n’adviendra que s’il y a aussi la sécurité. C’est un point absolument décisif et un défi commun.
Je me tourne, comme le veut la règle, vers les intervenants pour leur demander s’ils souhaitent se répondre les uns aux autres, ajouter quelque chose à leurs propos.
Mostapha Bousmina
La France a les atouts civilisationnels, culturels, qui lui permettraient d’être le moteur de cette intégration régionale. Elle connaît cette région, et elle y a des amitiés.
Le Maghreb sous-estime ses capacités.
L’Angleterre est en train de se rendre compte qu’elle a fait une grande erreur en se focalisant uniquement sur les banques et les services. C’est une bulle qui peut exploser à n’importe quel moment. L’Angleterre s’est peu à peu désindustrialisée. Le secteur financier est important, mais il ne crée pas de richesses et pas de technologie.
L’Allemagne est un grand pays industriel, mais son économie n’est pas aussi diversifiée que celle de la France. L’Allemagne a concentré son économie sur la métallurgie (et un peu sur les grands groupes pharmaceutiques) et orienté toute sa production vers l’export. La consommation française est beaucoup plus importante que la consommation allemande. L’Italie elle-même, le pays qui vit avec le plus de difficultés, a une économie beaucoup plus diversifiée que celle de l’Allemagne. Les Allemands ont développé un modèle unique au détriment d’un modèle social qu’ils n’ont pas (salaires très bas, système de sécurité sociale imparfait). La France a un très bon modèle social mais elle a un problème de gouvernance. La France a aussi l’industrie aéronautique, l’industrie militaire, l’industrie pharmaceutique et parapharmaceutique, l’agro-alimentaire et les cosmétiques. Ce qui manque à la France, c’est une bonne gouvernance et une libéralisation des potentialités.
On se trompe aussi souvent sur la Chine. Quand la Chine est rentrée sur la scène internationale économique, les bien-pensants, surtout en France, assuraient que la Chine ne fabriquait que de la camelote, des produits de basse qualité. C’est une erreur de jugement fatale. La Chine est capable de tout produire, du très bas de gamme à la très haute qualité.
Beaucoup de gens prétendaient que nous surpassions la Chine grâce à notre capacité d’innovation ; or la Chine est avec les États-Unis l’une des deux régions du monde où on innove le plus. Elle a dépassé le Japon et la Corée en termes d’innovation.
On affirme aussi qu’avec l’amélioration des conditions de vie en Chine, les salaires des Chinois vont augmenter, ce qui entraînera une hausse des prix de leurs produits. C’est encore une erreur ! et c’est méconnaître la Chine.
Quand on parle de la Chine, il faut en fait distinguer au moins trois Chine :
La première Chine concerne les grandes villes comme Shanghai, Pékin, Chongqing, Tinajin, Guanggzhou, Shenzhen et Wuhan, ce qui représente environ 100 millions d’habitants dont presque la moitié (cinquante millions) ont un niveau de vie est plus ou moins comparable à celui des Américains ou des Européens.
La deuxième Chine concerne la première ceinture des grandes villes et compte à peu près cinq cents millions d’habitants qui fournissent les produits aux grandes villes. Cette deuxième Chine est formée dans sa majorité par une main d’œuvre bon marché (sous-payée) dont le niveau de vie est inférieur à celui du Maghreb.
La troisième Chine, celle du milieu rural et qui représente la plus grande partie, connaît un sous-développement d’un autre âge.
Le salaire des Chinois ne va pas augmenter du jour au lendemain. Seuls les salaires des citadins vont augmenter. La deuxième et la troisième Chine constituent un réservoir de mains d’œuvre extraordinaire pour au moins un siècle.
C’est à l’Europe de changer de modèle économique parce que la Chine ne va pas arrêter sa progression et son développement.
Je n’en dirai pas autant de l’Inde. M. Mebtoul évoquait le PIB de l’Algérie. Le PIB ne signifie rien, s’il ne se traduit pas en termes de bien-être des citoyens. On voit en Inde des milliers de gens dormir dans la rue, dans un état de pauvreté extrême qui n’a pas son équivalent en Afrique. Au retour d’un voyage en Inde, il nous faut au minimum trois ou quatre jours pour nous remettre de ce choc de la pauvreté. L’Inde n’est pas un modèle et reste, somme toute, un pays qui ne réussit pas à réduire les inégalités et l’extrême pauvreté en dépit de son PIB tiré par l’activité de quelques grandes compagnies et par le nombre d’habitants. Même s’ils sont entrés dans l’ère de l’espace, la population reste dans sa majorité pauvre. Le PIB pris tout seul ne veut en fin de compte absolument rien dire.
Dans la salle
Ma question, qui s’adresse essentiellement à M. Mebtoul et peut-être à M. Ghilès, concerne la sphère informelle. M. Ghilès a effleuré le problème en parlant d’économie souterraine menaçant la stabilité et la sécurité de cette région et M. Mebtoul a avancé un chiffre de 50 %.
On parle d’intégration maghrébine. Je pense que la sphère informelle est un facteur d’intégration. Les échanges transfrontières qui se font de manière quasi officieuse contribuent à créer une intégration de fait qui sort des statistiques officielles.
Quel est l’impact des politiques de subventions dans le processus d’accélération de la sphère informelle (produits pétroliers, textiles etc.) de l’Algérie vers le Maroc et la Tunisie ?
Francis Ghilès
L’informel, les frontières-passoires sont partout une véritable catastrophe. Dans le sud de l’Italie, l’Europe n’a rien fait pour combattre l’informel et la mafia. Marseille, présentée comme une des villes françaises qui réussit, est le royaume de l’informel. En Algérie, l’informel croît depuis des années.
Je dirai très froidement que l’Algérie aurait une chance de réussir si le prix du pétrole baissait à vingt dollars le baril. Les gens se mettraient à travailler, on aiderait les vraies entreprises. Car il y a de vraies entreprises. Mais que d’informel ! Que de trafics ! Les Chinois construisent en Algérie des autoroutes qui coûtent trois fois le prix offert par les compagnies françaises ou allemandes ! International Crisis Group vient de faire une étude sur la Tunisie [2] sur l’informel et les frontières passoires qui se révèlent une calamité à tous les points de vue. L’informel n’intègre rien du tout ! Il assure la prospérité des mafias et ôte aux jeunes l’envie de travailler. Aujourd’hui toutes sortes de produits et de drogues viennent d’Asie à travers la Libye. Cela ne constitue pas une économie.
Dans nos pays, le recours à l’informel (quand vous retapez votre appartement, par exemple) est parfois motivé par coût des impôts et de la TVA. Même en Angleterre, qui n’est pas un pays d’informel, on se tourne vers l’informel parce que l’État pressurise à l’excès.
De même, en France, en Espagne (où je vis), en Angleterre (où j’ai longtemps vécu), les capitaux fuient, non parce qu’il y a des tricheurs mais à cause de la pression fiscale et des tracasseries administratives.
Mais ce qu’on n’a pas encore dit c’est qu’au moins trois cents milliards de dollars de capital privé nord-africain appartenant aux élites algériennes surtout (à cause du pétrole), mais aussi marocaines et tunisiennes est investi à l’étranger. Cela en dit long sur la confiance que les élites du Maghreb ont dans le futur de la région !
En Tunisie, la fuite des capitaux s’est accélérée à partir de 2007. Quand moi-même et quelques autres en avions fait la remarque lors de conférences, nos noms avaient été très soigneusement enlevés de la liste des intervenants à certains séminaires financés à Paris, à Bruxelles et ailleurs. Il ne fallait surtout pas déranger les choses ! La Tunisie était un modèle !
Aujourd’hui on nous dit que le Maroc est un modèle… Si j’étais marocain, je me méfierais !
C’est aux élites maghrébines de décider si elles veulent un futur pour cette région. Ce n’est ni à la France, ni à l’Angleterre.
Je suis à moitié anglais et je ne vous laisserai pas réduire l’Angleterre à une bulle bancaire. Depuis l’époque de Mme Thatcher, l’Angleterre a reconstitué sur son territoire une industrie de l’automobile, détenue par les Japonais, qui se porte bien et exporte beaucoup alors qu’en France où l’industrie de l’automobile était florissante, l’une des deux compagnies est en état de faillite. Les choses ne sont pas aussi simples.
Vous avez soulevé la question des subventions. En Algérie une étude publique réalisée par NABNI (Notre Algérie Bâtie sur de Nouvelles Idées) montre qu’avec la subvention le gaz coûte ½ dollar le BTU, ce qui en fait le moins cher du monde. C’est de la folie économique furieuse ! La consommation de gaz en Algérie pour la production d’électricité croît à une telle vitesse que NABNI et des anciens de la Sonatrach envisagent qu’en 2025 l’Algérie consommera plus de gaz qu’elle n’en exportera, ce qui serait la catastrophe totale. Je ne pense pas qu’on en arrivera là parce qu’un débat naît à ce sujet en Algérie. Le ministre de l’Intérieur et le ministre de l’Energie reconnaissent que 1,2 milliards de dollars de produits pétroliers fuient aux frontières. Mais à qui la faute ? Avec une différence de prix de 20 %, c’est inévitable !
Après le coup de Gafsa [3] en 1978, j’étais reçu chez le gouverneur de Gafsa : « Monsieur le gouverneur, lui dis-je, en Tunisie le café (en réalité un mélange de pois chiches et de café) n’est généralement pas très bon. Comment se fait-il que votre café soit aussi bon ? » « Mais mon cher ami, me répondit-il, El Oued, du côté algérien de la frontière toute proche est la capitale régionale du café ! » Déjà à cette époque les produits algériens, tel le café, plus fortement subventionnés étaient objets de contrebande.
En Algérie, comme dans tous les pays qui ont une politique de subventions, celles-ci imposent à l’économie une distorsion telle qu’on ne peut plus parler de gouvernance de l’économie.
Il faut une vérité des prix. Je ne dis pas cela parce que je suis un bon capitaliste, ce que je suis par ailleurs ! Les aides aux personnes dont les revenus sont insuffisants, une école de qualité gratuite, des soins pour tous : c’est le modèle français qui mérite d’être défendu. Mais les subventions, dont ce pays a usé et abusé, sont indéfendables.
Au Maghreb, un débat commence à naître sur les subventions. On peut penser que les réformes arriveront.
J’observe avec intérêt la Tunisie où semble se construire un système pluriel, où il y a une grande liberté d’expression, mais même en Algérie, la presse dit des choses intéressantes (les meilleurs articles sont sur le site « Maghreb émergent »). Je ne vais pas employer le mot de « Démocratie » parce que nous adorons prêcher ce que nous ne pratiquons pas (notamment avec les Palestiniens). Néanmoins on voit en Tunisie un système démocratique pluriel. Ce pays doit conforter ses entrepreneurs, ses compagnies grandes (comme celle que dirige Walid Bel Hadj Amor) et petites qui sont remarquables. Mais il y a aussi une bande de voyous dont il faut trouver le moyen de se débarrasser.
Que faire avec les régions proches de la frontière algérienne ?
Que faire avec Gafsa où depuis cent vingt ans on extrait du phosphate et où les populations n’ont jamais vu la couleur de l’argent ?
C’est le grand challenge. Ce sont les questions qu’il faut poser d’abord au Maghreb, dans la presse et avec des hommes politiques qui s’expriment librement et ouvertement, ce qui n’est pas encore le cas.
Sur ce que peut faire l’Europe, je dirai d’abord que toute l’Europe est concernée. Finissons-en avec le discours sur les liens historiques que la France entretient avec le Maghreb. D’autres pays (Suède, Danemark, Hollande, Angleterre…) font énormément de choses au Maghreb.
Laissez les compagnies et les universités se construire toutes seules (puisqu’aujourd’hui, même dans ce pays on accepte le financement privé des universités). Laissez les grands universitaires, les patrons d’universités, les universités suédoises, allemandes, anglaises… entrer dans le jeu. Où est le problème ? Il n’y a pas que l’université française. Regardez le monde tel qu’il est ! Et si on regarde le monde tel qu’il est, le niveau d’éducation des Nord-Africains n’est pas mauvais. Et même si les lois aident plus les femmes en Tunisie qu’en Algérie et au Maroc, les femmes marocaines et les femmes tunisiennes accèdent aux études.
Un bon conseil si vous voulez faire avancer le Maghreb : confiez aux femmes la moitié des postes clés actuellement tenus par des hommes… Et vous verrez le résultat dans dix ans !
Abderrahmane Mebtoul
Je connais très bien le dossier des subventions, du moins pour le cas algérien puisque j’ai eu à diriger pour le compte du gouvernement algérien le dossier des subventions avec le bureau d’études américain Ernest Young entre 2005 et 2006.
Mais je voudrais d’abord évoquer le modèle énergétique de ce qu’on appelle les pays émergents.
Il y a tout un débat actuellement entre différents experts et politiques du fait de la politique de la FED. L’idée née des prospectives de 2010-2011, après la crise de 2008, selon laquelle les pays émergents allaient tirer la croissance de l’économie mondiale, est de plus en plus remise en cause. Or on observe un ralentissement de la croissance de la majorité des pays émergents. La croissance chinoise par exemple, annoncée à 12 % ou 13 %, n’atteint que 7 % (alors qu’il lui faut 9 % à 10 % de taux de croissance pour maintenir le front social). Je ne parle pas du Brésil, de l’Inde etc. C’est tout un débat.
Quant au modèle de consommation énergétique (j’ai passé vingt-cinq ans de ma vie dans l’énergie), imaginez-vous si les pays émergents avaient le même modèle de consommation d’énergie que les États-Unis, il nous faudrait cinq fois les ressources de la planète. C’est tout le débat de la transition énergétique qui est posé.
En ce qui concerne les subventions, je voudrais un peu nuancer le propos. L’Algérie participe à la stabilisation régionale grâce aux subventions. 25 % du carburant consommé en Tunisie, selon les chiffres officiels les plus récents, vient du trafic. De même, alors que la population algérienne n’a pas doublé, nous sommes un des plus gros importateurs du monde de céréales à cause des trafics vers le Niger, le Mali et le Maroc (malgré la fermeture des frontières). Il est vrai qu’on enseigne en première année d’économie que les subventions faussent la vérité des prix et l’allocation rationnelle des ressources, comme l’a dit M. Ghilès. C’est le dicton du FMI, de la Banque mondiale. Mais nos amis africains reconnaissent que grâce aux subventions l’Algérie joue un rôle dans la stabilité régionale en subventionnant, d’une certaine manière, d’autres pays. C’est un élément important.
Il faut distinguer deux segments de la sphère informelle : la sphère informelle productive et la sphère informelle marchande spéculative. Par exemple, si les gens qui confectionnent dans des caves des vêtements, des chaussures etc. ne paient pas de taxes, ils contribuent néanmoins à la création de la valeur. Malheureusement, en Algérie et dans pas mal de pays c’est la sphère marchande spéculative qui domine. J’ai eu à travailler sur la sphère informelle depuis une dizaine d’années avec Hernando de Soto [4], à ma connaissance un des plus grands spécialistes de la sphère informelle. Il a d’ailleurs contribué à un de mes ouvrages en 2006 sur la sphère informelle en Algérie. Lors d’un voyage en Algérie, Hernando, se promenant près de la foire, a remarqué sous les maisons des caves immenses qui ne se justifiaient que si elles étaient destinées à abriter des activités.
La sphère informelle naît des dysfonctionnements de l’appareil de l’État. C’est le produit de la bureaucratie, comme je l’ai montré dans l’étude de l’IFRI [5]. Et il existe des liens entre la corruption et la sphère informelle. Selon les calculs repris à partir des éléments fournis par la Banque centrale d’Algérie, en 2012, la sphère informelle contrôlait en Algérie 64 milliards de dollars. Elle tisse des liens de corruption. Ce n’est pas sans conséquences sur les préparatifs de l’élection présidentielle où nous constatons l’introduction de la mafia politique ou financière. Elle a un grand pouvoir tissant des liens dialectiques avec la bureaucratie qui tire sa puissance de cette sphère. Dans ce cadre, nous ne sommes plus dans l’Algérie des années 1990 où les militaires pouvaient faire ce qu’ils voulaient. Un autre élément, un segment du pouvoir rentre en jeu pour les élections présidentielles de 2014, c’est le pouvoir de l’argent.
S’il est vrai que les trafics au niveau des frontières contournent la myopie des bureaucraties locales, c’est parce qu’il y a trop de bureaucratie que les gens se livrent à des transferts illégaux.
Je reviens à ce qu’a dit M. Ghilès à propos des subventions. Prenons le cas de Sonelgaz, savez-vous que le prix de l’électricité est plafonné depuis 2005 ? Savez-vous que le ticket de restaurant pour les étudiants est plafonné à 1,5 ou 2 dinars depuis 1974 (150 dinars = un euro sur le marché parallèle, 105 dinars sur le marché officiel) ? Le Premier ministre vient de donner un chiffre pharamineux : les subventions et les transferts sociaux représentent en Algérie 30 % du PIB (qui est de 210 milliards de dollars) donnant environ 70 milliards de dollars. Cela est rendu possible grâce à la rente des hydrocarbures et ce pour calmer transitoirement le front social. Cela ne peut continuer quitte à conduire le pays à une dérive en cas de chute brutale du cours des hydrocarbures.
Le problème de la sphère informelle est très complexe. Au-delà du petit commerce informel de la rue, il y a ce qu’on appelle un pouvoir d’oligopole. Une centaine de personnes contrôlent cette masse monétaire. Elles ont leurs entrées au niveau des sphères du pouvoir. Cela a des implications sur la politique économique d’un pays parce qu’il est plus facile d’importer que de produire localement, parce qu’ils sont liés à l’import-export. Et comme ils sont liés par des réseaux aux plus hautes sphères du pouvoir, ils réorientent la politique économique à leur manière.
Comment créer une économie productive au Maghreb quand la sphère informelle domine et concentre l’argent ? Les montants générés par le trafic de drogue au Maroc (analysés dans l’étude de l’IFRI) sont pharamineux. Comme je l’ai dit à mes amis marocains à Rabat, ceux qui s’opposent à l’intégration maghrébine sont les gens liés au cartel de la drogue et des segments qui, au niveau de l’Algérie, ne souhaitent pas qu’il y ait des relations apaisées entre l’Algérie et le Maroc. Ce n’est pas si simple.
Mostapha Bousmina
Je ne veux pas intervenir ni polémiquer mais tout cela est franchement exagéré.
Walid Bel Hadj Amor
L’informel est le fait de la dictature. Quand une dictature est incapable de créer des emplois, de développer un pays, elle favorise l’informel pour que les petites gens puissent survivre (et ne fassent pas la révolution). On ne trouve pas beaucoup d’informel dans les pays développés (on peut à cet égard se demander si Naples fait partie de l’Italie dans son système organisationnel).
Vous confondez la contrebande et l’économie informelle qui sont deux choses complètement différentes. La contrebande est criminelle. L’informel, sont des entreprises qui travaillent et produisent mais ne sont pas intégrées dans le tissu économique, ne payent pas de charges ni d’impôts et n’ont pas d’existence légale.
Dans la salle
En France, l’informel est estimé à quatre-vingts milliards d’euros : une contradiction flagrante à votre opposition entre informel et démocratie.
Walid Bel Hadj Amor
Aujourd’hui, après la révolution, la contrebande représente 12 % à 15 % de l’économie tunisienne. L’informel, lui, représente 40 % à 50 % de cette économie.
Pourquoi l’appareil de l’État ne lutte-t-il pas contre l’informel ? C’est que le niveau de chômage est tel que si on empêche Mohamed Bouazizi de vendre des légumes et des fruits avec sa brouette dans les rues de Sidi Bouzid, il s’immole… avec les conséquences que l’on sait.
Vous niez le lien entre dictature et informel. Mais Mohamed Bouazizi en est un exemple parfait. Il était un diplômé qui n’avait pas trouvé de travail et la seule possibilité pour lui était de prendre une brouette et de vendre des fruits et des légumes. À un certain moment le pouvoir a laissé faire. Demain il peut y avoir des dizaines de milliers de Mohamed Bouazizi au Maghreb et si vous faites respecter la loi en exigeant d’eux une patente et un local commercial, en leur demandant de payer la TVA et des impôts, tout se dérègle.
Quand un pouvoir est fort d’une démocratie, quand il a la confiance du peuple, permettez-moi de penser qu’il est capable de faire autre chose qu’une dictature.
Francis Ghilès
On a beaucoup parlé de la Chine. Quand Deng Xiaoping a lancé les réformes en 1979, il a invité les Chinois de la diaspora en vagues successives, leur a présenté ses plans pour trente ans et leur a demandé d’investir en Chine. Les règles de l’investissement étaient garanties. Les deux tiers de l’investissement étranger en Chine proviennent de la diaspora chinoise.
Aux trois cents milliards de dollars que les élites maghrébines détiennent à l’extérieur s’ajoutent les avoirs de la diaspora en France, en Europe, au Canada, aux États-Unis. Pourquoi ne pas inviter les diasporas marocaine, algérienne, tunisienne à investir dans leur pays en leur présentant un projet sur trente ans ? Le Maroc a ouvert un peu, mais si peu. Je connais des Français d’origine algérienne qui retournent en Algérie depuis quelques années malgré les difficultés et qui se battent pour lancer des entreprises. Cela se fait en Tunisie où six membres du gouvernement sont des Franco-tunisiens. On attend à Alger ou à Rabat un gouvernement comprenant six ministres franco-algériens ou franco-marocains. Peut-être les choses commenceront-elles à bouger.
Il faut aussi prendre conscience que la moitié des gens ont moins de trente ans et ignorent tout des débats qui nous agitent.
Il y a des exemples. Non seulement en Chine mais aussi en Inde et au Brésil. J’ai des amis qui dirigent un consortium qui, dans des compagnies en Angleterre et aux États-Unis, s’est capitalisé à cent milliards de dollars : les Indus Valley investments. Depuis dix ou quinze ans, ils vont en Inde montent des start up, font de l’enseignement, sortent des filles de la pauvreté. Tout cela est rendu possible parce qu’il y a une grande liberté du côté du gouvernement indien qui laisse faire.
Cet exemple devrait être suivi par le Maroc, l’Algérie, la Tunisie. Cela aurait un effet énorme. On n’aurait pas besoin des fonds de Bruxelles, ni des fonds d’aide publique français ou autres.
Si on pouvait tenir plus de débats de ce genre en France, Monsieur le ministre, compte tenu de l’importance de la diaspora et de l’intérêt que la France a porté au Maghreb depuis plus de cent ans, je pense qu’ils intéresseraient sans doute les Chinois, les Allemands, les Anglais …
Mostapha Bousmina
Je souscris entièrement à ce que vous avez dit concernant la diaspora.
Dans le cas du Maroc, un effort colossal est fait. Il y a un ministère de la Diaspora (des Marocains résidents à l’étranger) et un conseil dédié à la diaspora (CCME : Conseil de la Communauté Marocaine à l’Étranger) et une stratégie qui nécessite d’être améliorée. Moi-même, je suis rentré il y a cinq ans sur sollicitation. J’ai fait rentrer avec moi de nombreuses personnes, tous des docteurs et des ingénieurs exerçant en Amérique du nord. En plus de la diaspora, j’ai ramené au Maroc des Canadiens d’origine, des Américains, des Français, des Bulgares, Russes, des Japonais, des Malgaches… qui vivent actuellement au Maroc.
Tout n’est pas noir, tout n’est pas rose. Je regarde le Maroc honnêtement. J’ai quitté ce pays très jeune et j’y suis revenu périodiquement. Année après année, j’ai observé un changement extraordinaire. Il y a encore beaucoup de problèmes, mais c’est un pays qui fait des efforts. Le chauffeur de taxi qui m’amenait me disait tout à l’heure être retourné à Tanger après dix ans et avoir eu de la peine à reconnaître cette ville, tellement elle s’est développée. On pourrait dire la même chose des autres villes du Maroc qui ne cessent de connaitre un développement soutenu. Le Maroc est le pays d’Afrique qui a le plus d’autoroutes. Les ports sont en plein essor : Tanger Med commence à prendre beaucoup de marchés dans la région méditerranéenne, bref, le Maroc connait actuellement un développement sans pareil et dans tous les secteurs.
Les Algériens font eux aussi des projets.
On peut faire le choix de prendre des lunettes noires qui obscurcissent notre vision de la réalité. Ce n’est pas du réalisme, c’est la volonté de ne voir que ce qui ne marche pas. Il y a certes des choses qui ne marchent pas, mais il y a aussi des choses qui marchent. Et quand ça marche, il faut le souligner. Au Maroc, grâce à une initiative nationale, l’INDH (Initiative nationale du développement humain), des gens extrêmement pauvres ont vu leurs conditions de vie s’améliorer (des études et des chiffres le prouvent). Il y a une ascension sociale. Cela me fait plaisir. Je ne dis pas que tout est bon, que tout est rose, mais le pays avance et il avance dans le bon sens avec méthode et courage. Bien sûr, il faudrait aller beaucoup plus loin, beaucoup plus vite, je souscris entièrement.
Je n’ai pas la mentalité de l’assisté. Je ne veux pas d’aide, je veux un co-développement, un partenariat, que ça soit avec M. X ou avec M. Y. (vous aviez raison tout à l’heure de signaler qu’il y a aussi des universités allemandes). J’ai parlé de la France parce que la plupart de cette diaspora est en France. Il y a des liens naturels avec ce pays et c’est normal. Moi-même, j’ai fait mes études dans ce pays avant de poursuivre ma formation ailleurs. La majorité de la classe dirigeante, en Tunisie, en Algérie, a étudié quelque part en France. Il y a cette relation particulière avec la France. Mais vous avez raison, il n’y a pas que la France. Il y a d’autres pays, il faut élargir ses horizons.
Francis Ghilès
Simplement, quand en Inde une compagnie française se présente et gagne un marché dans un pays où les Anglais sont très présents, la presse anglaise ne titre pas : « Les Français nous ont pris une part de marché ». Tout le monde est partout. La moitié du CAC 40 appartient à des étrangers. Cela ne veut plus rien dire. Nous sommes dans un monde globalisé où le capital circule librement
Abderrahmane Mebtoul
Vous venez de souligner un élément important. Nous avons surtout besoin d’un transfert managérial et technologique. Le rapport de la Banque africaine de développement dont la réunion s’est tenue à Marrakech en juin ou juillet 2013 est alarmant. Les transferts de l’Afrique entre 1980 et 2009, c’est 1480 milliards de dollars.
Face aux discours des Européens : « On va vous aider, on va vous aider ! », M. Ghilès affirme que cette aide est inutile et propose de redonner confiance pour que les capitaux puissent revenir au Maghreb. Ce n’est pas l’Europe ou l’Occident qui est en train d’aider l’Afrique, c’est l’Afrique, du fait de la corruption d’une grande partie de ses dirigeants qui est en train d’aider l’Europe et l’Occident. Le montant des transferts est pharamineux : 90 % du PIB africain ! Le rapport de la Banque africaine du développement l’a quantifié par pays. L’Algérie arrive en quatrième position, le Nigeria en première ou deuxième position. C’est le constat de la déliquescence des dirigeants de l’Afrique.
Je souhaiterais qu’on revienne à un élément très important : les liens entre l’éthique et le développement. Les fondateurs de l’économie politique, Adam Smith, David Ricardo, nous ont appris que le travail est la richesse des nations. Ceci nous ramène à la démocratie et à l’État de droit. La priorité est de redonner confiance pour que ces capitaux puissent revenir. L’Afrique et le Maghreb ont aussi besoin de beaucoup plus de transfert technologique et managérial. C’est le cycle des civilisations. C’est vous qui avez maintenant la maîtrise du savoir-faire. À une période vous ne l’aviez pas.
Jean-Pierre Chevènement
Pascal, dans ses Pensées, a écrit que « la vraie morale se moque de la morale ».
Pour faire revenir la confiance, nous avons besoin de beaucoup de débats pleins d’empathie, comme celui-ci, où on se dit un certain nombre de vérités. À un certain moment j’ai cru l’UMA (Union du monde arabe) menacée. Quand vous avez évoqué les subventions aux pays voisins, j’ai pensé un instant que l’Entente cordiale allait être rompue et que nous allions revenir aux affrontements héréditaires avec nos voisins d’Outre-Manche ! Mais, tout compte fait, nous nous en sommes bien sortis…
Merci à tous. Nous avons des défis à relever en commun, dans un esprit de fraternité et d’égalité. L’aspect culturel est extrêmement important. Je crois qu’il a marqué nos échanges. J’en remercie très sincèrement les intervenants ainsi que tous les assistants.
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[1] « Andalousies », la leçon de clôture de Jacques Berque au Collège de France en 1981 (publiée en appendice à l’essai Les Arabes) se conclut ainsi : « J’appelle à des Andalousies toujours recommencées, dont nous portons en nous à la fois les décombres amoncelés et l’inlassable espérance. »
Les Arabes, suivi de Andalousies, Jacques Berque, éd.Sindbad/Actes Sud, 1997 (1973 et 1981 pour les premières éditions)
[2] La Tunisie des frontières : jihad et contrebande. Rapport International Crisis Group Moyen-Orient/Afrique du Nord (N°14828 nov. 2013)
[3] Gafsa, gouvernorat tunisien situé à la frontière algérienne. Cette région minière a connu en 1978 des grèves et des mouvements sociaux. Deux ans plus tard, Gafsa fut le cadre d’une attaque par un commando armé.
[4] Hernando de Soto est un économiste péruvien qui s’intéresse particulièrement au rôle de l’accès à la propriété dans l’émancipation et l’enrichissement des populations les plus pauvres et à l’importance de l’économie souterraine dans les pays en développement. Aux mots « illégal » ou « informel », il préfère le terme « extra-légal ».
[5] Le Maghreb face au poids de la sphère informelle, dans Le Maghreb face aux nouveaux enjeux mondiaux, Abderrahmane Mebtoul, note de l’IFRI, décembre 2013.
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