La quasi-totalité des musulmans dans le monde (plus de 1,5 milliard d’individus) se concentrent dans une région qui s’étend du Maroc à l’Indonésie. Ce monde musulman ne constitue toutefois pas un bloc homogène puisque de très nombreuses rivalités ethniques et religieuses le morcellent. Cette étude composée de trois cartes propose quelques éléments de compréhension. Etude cartographique réalisée pour la Fondation Res Publica par Kevin Limonier, allocataire de recherche et moniteur d’enseignement supérieur, Institut Français de Géopolitique (Université Paris 8) et David Amsellem, doctorant-allocataire de recherche au Centre de Recherche et d’Analyse Géopolitique (CRAG), Université Paris VIII.
naturelles).
En Asie, c’est l’Indonésie qui héberge la plus grande communauté musulmane du monde (plus de 200 millions), laquelle représente d’ailleurs près de 90 % de la population du pays. Le cas de l’Inde est intéressant à souligner : si ce pays abrite une des plus grandes communautés musulmanes du monde (180 millions), cette dernière reste minoritaire (14 %) dans un pays peuplé à 80 % d’hindous.
Cette situation démographique explique, en partie, l’infl uence des États sunnites au Moyen-Orient, dont l’unité a été cimentée par la lutte contre Israël au sein de la Ligue arabe. Mais depuis plusieurs années, le rapport de force entre Chiites et Sunnites s’inverse dans la région en faveur des premiers.
En eff et, la chute de Saddam Hussein en 2003 a fait tomber le dernier rempart qui empêchait l’Iran chiite d’y pénétrer et depuis, la République islamique a su manoeuvrer très habilement pour y étendre son in fluence.
D’abord, en s’alliant avec le Hezbollah, la milice chiite libanaise, ce qui lui a permis d’ incarner le rôle d’Adversaire contre Israël, une cause encore très fédératrice dans la région et que personne n’occupait depuis – au moins – la n du régime de Saddam en 2003. Ensuite, en s’appuyant sur les communautés chiites de l’ensemble des pays, ce qui a permis l’émergence d’un « arc chiite » qui part du Yémen et va jusqu’au Liban. En n, en pro tant des nombreuses déstabilisations politiques dans le monde arabe à la suite du « printemps arabe », lequel a principalement touché des États sunnites arabes (Tunisie, Lybie, Égypte, pays du golfe).
À l’heure actuelle, toutes les conditions sont réunies pour que l’Iran, État chiite et non arabe , renforce son in fluence au sein de ce Moyen-Orient arabe et sunnite.
La cartographie de ces communautés religieuses révèle trois principaux phénomènes : d’abord, qu’un Etat peut héberger plusieurs courants sunnites (c’est le cas de l’Egypte ou de la Turquie), ainsi qu’une ou plusieurs communautés chiites (c’est le cas de l’Arabie saoudite). Ensuite, que la géographie des communautés religieuses ne se borne pas aux frontières politiques des Etats. Enfi n, que les Jafari d’Arabie saoudite, issus du même courant chiite que les iraniens, irakiens et koweïtiens, se situent le long du golfe persique, là où se trouve l’essentiel des réserves pétrolières du pays ; cela pourrait représenter un risque non négligeable pour l’Arabie saoudite.
Au sein de ce monde musulman morcelé, il existe de nombreux confl its où l’on constate la présence de salafi stes, des radicaux islamistes. C’est le cas en Afrique (combattants d’AQMI – Al-Qaida au Maghreb Islamique), en Egypte (Frères musulmans) ou encore dans l’actuelle guerre civile syrienne.
Or, le Salafisme s’inspire du hanbalisme, une branche de l’Islam sunnite dont les adeptes se concentrent essentiellement en Arabie saoudite et au Qatar. Cela n’est pas sans conséquences sur les liens entre ces deux pays et les combattants salafi stes dans la plupart des confl its en cours.
Au début des années 2000 déjà, dans le cadre de la guerre en Afghanistan, le soutien financier de l’Arabie saoudite au Pakistan avait permis le développement du Hanbalisme dans ce pays, ce qui a permis l’émergence des Talibans.
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