La Russie dans le marché mondial du gaz: une suprématie contestée ?

Étude cartographique réalisée pour la Fondation Res Publica par Kevin Limonier, allocataire de recherche et moniteur d’enseignement supérieur, Institut Français de Géopolitique (Université Paris 8) et David Amsellem, doctorant-allocataire de recherche au Centre de Recherche et d’Analyse Géopolitique (CRAG), Université Paris VIII.

La Russie tient une place centrale dans les marchés gaziers mondiaux. L’économie russe est en grande partie bâtie sur les exportations d’hydrocarbures, si bien que la santé économique du pays dépend fortement des cours du gaz et du pétrole (encadré A). Cependant, plusieurs phénomènes viennent bousculer cette suprématie : D’une part, la diversification cation des marchés, due à la montée en puissance des pays d’Asie, nécessite un redéploiement des infrastructures gazières russes vers l’est, alors que le marché traditionnel de Moscou est l’Europe (carte 1).

D’autre part, la montée en puissance du gaz naturel liquéfié (GNL) contribue à mondialiser des marchés gaziers qui étaient jusqu’à présent régionaux. Condensé à l’état liquide, le gaz naturel est en effet transportable par méthaniers, offrant une alternative au transport par gazoducs. Durant la décennie 2000-2010, cette technologie a connu un essor considérable. Elle contribue à la diversification cation des routes d’approvisionnement pour les grands pays consommateurs (carte 1), mais également à la montée en puissance de nouveaux producteurs (encadré B).

Les gaz et pétroles de schiste pourraient quant à eux devenir à terme une problématique majeure pour la Russie. On estime que grâce à eux, les États-Unis pourraient devenir le premier producteur mondial d’hydrocarbures d’ici 2020. De même, les importantes réserves dont dispose la Chine pourraient remettre en question la stratégie russe d’ouverture de son marché gazier en extrême-orient (carte 2.). A l’ouest, d’importants clients du gaz russe tels que la Pologne ou l’Ukraine ont déjà été séduits par les potentialités du schiste, malgré de potentielles retombées écologiques négatives.

La position de l’Allemagne, grand consommateur de gaz russe, pourrait évoluer après les prochaines élections fédérales. Enfin, l’effondrement des prix du gaz américain dès 2009 (encadré B) est principalement dû à l’augmentation de la production de gaz et de pétrole de schiste. Même si rien ne permet d’indiquer que cette tendance se poursuivra, ce pourrait être le premier signe d’un changement structurel qui risque de menacer les intérêts vitaux de la Fédération de Russie.

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